Dépense publique: les pays d’Europe multiplient les mesures face à la flambée des prix de l’énergie
Aides au paiement des factures, ristournes à la pompe, blocages des prix, nationalisations… Chaque semaine ou presque donne lieu à de nouvelles annonces sonnantes et trébuchantes en Europe pour soutenir les ménages et les entreprises face à la flambée des prix de l’énergie.
Aides au paiement des factures, ristournes à la pompe, blocages des prix, nationalisations… Chaque semaine ou presque donne lieu à de nouvelles annonces sonnantes et trébuchantes en Europe pour soutenir les ménages et les entreprises face à la flambée des prix de l’énergie.
Au point, une fois n’est pas coutume, de faire de la dépense publique un sujet de fierté à l’échelle européenne.
En annonçant vendredi un nouveau paquet de 14 milliards d’euros, le chef du gouvernement italien Mario Draghi a affirmé que l’Italie était “parmi les pays ayant dépensé le plus en Europe” contre la crise énergétique.
Rome est en effet bien placée, selon un classement publié mercredi par l’institut bruxellois Bruegel qui analyse la période allant de septembre 2021 à septembre 2022: l’Italie est le deuxième Etat européen le plus dépensier avec 59,2 milliards d’euros promis ou dépensés en faveur des ménages et les entreprises, soit 3,3% de son PIB.
En tête figure l’Allemagne avec 100,2 milliards d’euros et 2,8% du PIB.
La France, dont les dirigeants se félicitent d’avoir mis en place dès novembre 2021 un coûteux “bouclier tarifaire” sur les prix du gaz et de l’électricité, arrive troisième avec 53,6 milliards d’euros engagés, soit 2,2% du PIB.
314 milliards dépensés
Les pays de l’Union européenne ont déjà annoncé ou alloué au total 314 milliards d’euros depuis un an, a calculé l’institut européen. Les mesures prises vont des subventions aux transports en commun en Allemagne au blocage des prix de l’énergie en France, ou encore la mise en place d’une taxe sur les superprofits en Italie.
“On peut s’attendre à ce que ce nombre continue d’augmenter à mesure que les prix de l’énergie resteront élevés”, anticipe auprès de l’AFP l’un des chercheurs à l’origine du classement, Simone Tagliapietra, alors que l’Allemagne a encore annoncé mercredi la nationalisation du géant gazier Uniper.
Pour lui, “ces mesures sont devenues structurelles alors qu’elles étaient initialement construites pour répondre à un problème ponctuel”.
Aux niveaux de prix actuels sur les marchés, les factures de gaz et d’électricité d’un ménage européen pourraient atteindre 500 euros par mois en moyenne en début d’année prochaine, a calculé début septembre la banque américaine Goldman Sachs. Le prix moyen de la facture d’énergie était de 160 euros en 2021, rappelle-t-elle.
Problème: ces arsenaux budgétaires surviennent au sortir de deux années de pandémie qui ont vu l’endettement public se creuser fortement, le menant au premier trimestre de cette année à 153% du PIB en Italie, 127% au Portugal, 189% en Grèce, 114% en France, ou 118% en Espagne.
“Ce n’est clairement pas soutenable en termes de finances publiques”, juge Simone Tagliapietra, qui insiste sur la nécessité de focaliser les aides sur les ménages et les entreprises les plus vulnérables.
Remontée des taux
D’autant que la décennie durant laquelle les Etats européens ont pu emprunter à des taux très bon marché est révolue depuis que la Banque centrale européenne (BCE) s’est engagée dans une bataille contre la flambée inflationniste avec des hausses de taux.
La France a vu mardi son taux d’emprunt à dix ans franchir un plus haut en huit ans, à 2,5%, pendant que l’Allemagne emprunte à 1,8% contre un taux négatif en début d’année. L’Italie a de son côté dépassé les 4%, contre environ 1% en début d’année, ravivant le spectre d’une crise de la dette sur le continent.
“il est critique d’éviter des crises des dettes qui pourraient avoir de profonds effets déstabilisateurs et mettre l’existence même de l’Union européenne en danger”, a alerté le Fonds monétaire international (FMI) dans un récent texte concernant l’Europe, proposant des réformes aux règles budgétaires. Suspendues jusque fin 2023, ces règles imposent actuellement un déficit public à 3% et une dette à 60%.
L’institution de Washington propose de différencier les règles en fonction de l’état des finances de chaque Etat, ainsi que de donner davantage de pouvoir aux autorités indépendantes chargées de vérifier la viabilité des budgets nationaux.
La Commission européenne prévoit de son côté de dévoiler vers la fin octobre ses grandes orientations de réforme pour un Pacte qui a volé en éclat avec les crises à répétition.