Philippe Ledent

Covid en Chine: une épine de plus dans le pied de la reprise…

Philippe Ledent Senior economist chez ING Belgique, chargé de cours à l'UCLouvain.

Il est peu probable que la Chine relâche sa politique zéro covid, notamment parce que la capacité des hôpitaux est faible par rapport à la taille de la population.

La pandémie de covid a débuté en Chine il y a plus de deux ans. Le nombre de cas y est resté officiellement très modeste. Une fois passée la première vague, la stratégie basée sur l’identification rapide des foyers de contaminations, un testing de masse et le confinement local jusqu’à l’identification de tous les cas a en effet permis à la Chine de retrouver très rapidement une activité plutôt normale. Ceci dit, le variant omicron est en train de mettre cette stratégie sous pression. Et ce n’est pas sans conséquences économiques, en Chine comme ailleurs.

Actuellement, la population de Shanghai, qui est l’un des principaux centres financiers, commerciaux et d’échanges de la Chine, est bloquée en raison de la recrudescence des infections au covid. N’oublions pas que les autorités sont incroyablement strictes. Une seule personne infectée pourrait affecter l’ensemble de la main-d’oeuvre d’une usine. Les ports suspendent leurs activités pour désinfection si une seule personne est découverte porteuse du virus.

D’autres villes et régions sont touchées par la vague omicron, et encore d’autres le seront prochainement. Il est donc raisonnable de penser que les confinements – et donc les arrêts de l’activité économique – vont encore se multiplier dans les prochaines semaines. Si un foyer est détecté très rapidement et que le confinement est décidé directement, à l’image de ce qu’il s’est passé dans la ville de Shenzhen, la stratégie zéro covid peut tenir. Mais si, comme à Shanghai, de multiples foyers tardent à être détectés, la situation peut rapidement devenir incontrôlable.

Il existe bien sûr la possibilité de relâcher la politique zéro covid et de vivre avec lui. Mais cela est peu probable, notamment parce que la capacité des hôpitaux est faible par rapport à la taille de la population. Jusqu’à présent, rien n’indique que la Chine soit prête à changer d’approche et à considérer le covid autrement que comme une urgence médicale généralisée devant être totalement éliminée.

Bref, l’épidémie de covid n’a pas encore fini de perturber l’activité économique. Concrètement, la croissance économique chinoise sera ralentie cette année, cela ne fait plus de doute. Il faudra parallèlement surveiller l’approvisionnement en denrées alimentaires du pays, de nombreux agriculteurs chinois se plaignant déjà du manque de matières premières (dont des engrais) et de main-d’oeuvre au moment crucial des semis, en raison des restrictions liées au covid. C’est d’autant plus dommageable que l’agriculture chinoise est aussi affectée par la diminution des importations de maïs ukrainien, servant principalement à l’alimentation dans l’élevage.

Mais la vague de covid n’affecte pas uniquement la Chine, bien entendu. Les restrictions et confinements signifient qu’une fois de plus, l’activité des usines et des ports, et donc les exportations, est ralentie. Cela pèse sur les chaînes d’approvisionnement. Entre la guerre en Ukraine et les confinements chinois, trouver des matières premières et des composants devient un réel défi pour les entreprises. Une récente enquête auprès des entreprises belges, coordonnée par la Banque nationale, le démontre très bien: une large part des entreprises fait à nouveau face à des problèmes d’approvisionnement, alors qu’en tout début d’année, la situation semblait s’améliorer. On ne va pas encore parler de tempête parfaite, mais la vague de covid en Chine est un orage de plus sur l’économie mondiale qu’on ne peut minimiser.

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