Lire la chronique d' Amid Faljaoui
Comment L’Europe met en place l’effondrement du système financier russe
Bravo ! Franchement, il n’y a pas d’autres mots à dire aux Occidentaux. En quelques jours, alors que l’on considérait que les réactions étaient trop molles face à l’invasion de l’Ukraine par la Russie, l’Occident est passé à la vitesse supérieure en matière de sanctions économiques.
Pendant que Poutine menace d’utiliser l’arme nucléaire sans qu’on sache s’il bluffe ou pas, les Européens ont enfin décidé d’utiliser l’arme atomique… financière ! Autrement dit, ils se sont enfin mis d’accord pour retirer les banques russes de la messagerie financière Swift, basée en Belgique. Autant dire qu’il sera très compliqué pour les banques russes d’exercer leur métier à l’international, sans oublier que ce retrait transforme la Russie en paria du système financier international.
Poutine rejoint désormais un club composé de l’Iran, la Corée du Nord et le Venezuela. Bref, rien de très glorieux pour le nouveau Tsar de Russie. Et ça, soulignons-le, c’est une victoire des Européens qui se sont enfin soudés. N’oublions qu’il y a quelques jours encore les Allemands et les Italiens étaient très réticents à employer cette bombe atomique financière du fait de leur dépendance au gaz russe. L’Europe a donc pu dépasser ses égoïsmes nationaux et a compris que pour faire mal aux Russes, il fallait accepter d’avoir mal soi-même avec une hausse du prix de l’énergie.
Mais ce n’est pas tout, dans ce qui pourrait être une guerre d’usure, les Européens et les autres Occidentaux se sont aussi mis d’accord pour geler les avoirs étrangers (devises, or) de la banque centrale russe. Bravo, là encore, car c’est une première historique pour un pays du G20. La banque centrale russe ne pourra donc plus défendre efficacement le rouble sa monnaie nationale. En d’autres mots, l’inflation va exploser en Russie et faire mal aux citoyens pour les forcer à faire pression sur leur dirigeant. Soyons clair, avec toutes ces mesures financières, ce qu’espère l’Occident, c’est que les citoyens russes vont prendre peur, qu’ils vont vouloir retirer en urgence des sommes d’argent de leurs banques, qu’ils vont provoquer un “bank run” ou panique bancaire. Bref, en un mot comme en cent, c’est l’effondrement du système financier russe qui a été mis en place par l’Europe et ses alliés.
Comme le soulignait l’Elysée, c’est une manière d’augmenter le prix de la guerre contre l’Ukraine et de forcer Vladimir Poutine à revoir ses plans. Toujours dans l’espoir d’isoler Poutine, les Européens travaillent de concert pour confisquer les avoirs étrangers des milliardaires russes qui ne sont pas encore concernés par les sanctions économiques. Les hauts dirigeants des entreprises publiques sont également visés et même le porte-parole de Poutine est sur cette liste selon l’agence d’informations financières Bloomberg.
Autre bonne nouvelle, les Japonais ont également rejoint cette coalition anti-Poutine car le Japon a peur que cette invasion ne donne des idées à la Chine pour envahir Taïwan. Un sondage récent montre que deux tiers des Japonais s’inquiètent de ce scénario si l’Europe et les Etats-Unis n’arrivent pas à stopper l’invasion de l’Ukraine. Les craintes sont légitimes car c’est sur cette île que sont fabriqués 60% des semi-conducteurs mondiaux. Un blocage de cette île par les Chinois et ce sont deux tiers des usines du monde qui s’arrêtent du jour au lendemain !
Question : après avoir refusé de mourir pour Kiev, les Occidentaux voudront-ils mourir pour Taipeh ? J’en doute, malgré l’accord liant les Etats-Unis à cette île. La réalité est donc évidente : après le choc du COVID, le citoyen a compris que nous étions entrés dans un monde de chocs successifs – il n’y a hélas plus de répit – un choc succède à un autre. D’ailleurs, les vérités d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. Deux exemples parmi tant d’autres : les Allemands ont enfin décidé d’augmenter leur budget militaire alors qu’ils s’y refusaient jusqu’à présent à cause de leur passé et les Ecolos seront sans doute amenés à revoir leur attitude à propos de la sortie du nucléaire. Bref, ça tangue de partout et le citoyen devra avoir l’estomac solide pour avaler toutes ces informations anxiogènes tout en gardant espoir dans l’humanité. Avouez qu’il y a des défis plus simples à relever.
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