Combien pèse vraiment le “7e ciel fiscal” ?

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La “richesse manquante des nations”, autrement dit les capitaux cachés dans les paradis fiscaux, atteindrait 8 % du patrimoine financier mondial, selon un chercheur parisien. Soit 6.000 milliards de dollars.

En se basant sur une enquête harmonisée conduite sous la direction du FMI depuis 2001, le Coordinated Portfolio Investment Survey (CPIS), Gabriel Zucman, chercheur à l’Ecole d’économie de Paris, a tenté d’évaluer la valeur réelle de la “richesse manquante des nations” – autrement dit, les capitaux cachés dans les paradis fiscaux.

“Bien sûr, la méthode que j’utilise est indirecte, nuance-t-il sur le site La Vie des idées. Il est impossible de chiffrer au milliard près l’argent dans les paradis fiscaux. Il est impossible de savoir exactement qui sont les détenteurs de comptes offshore. Mon étude ne donne que des ordres de grandeur.”

Le chercheur parisien chiffre néanmoins le poids des paradis fiscaux à 8 % du patrimoine financier mondial. “Fin 2008, le patrimoine financier des ménages – c’est-à-dire les dépôts bancaires, les portefeuilles d’action, les placements dans des fonds d’investissement et les contrats d’assurance-vie détenus par les ménages du monde entier – s’élevait à 75.000 milliards de dollars. Les ménages détenaient donc environ 6.000 milliards de dollars dans les paradis fiscaux.”

L’argent dans les paradis fiscaux ne dort jamais

Loin d’être de l'”argent dormant”, la grande majorité des fortunes offshore sont investies dans des titres financiers : actions, parts de fonds d’investissement, obligations. “Parmi ces titres financiers, les parts de fonds d’investissement jouent un rôle prépondérant, précise encore Gabriel Zucman. Cela n’a rien d’étonnant : investir dans un fonds, qui lui-même investit ensuite dans des obligations américaines, des actions brésiliennes, etc., rapporte bien plus qu’accumuler des liquidités sur un compte courant.”

Il est, en revanche, bien plus difficile de déterminer à qui appartiennent les fortunes dans les paradis fiscaux que de connaître le montant total des fortunes offshore et leur composition, prévient-il. “En fait, on ne dispose de bonnes données que pour la Suisse. Les banques suisses gèrent environ un tiers des fortunes offshore, donc environ 2 000 milliards de dollars fin 2008. Cela fait de la Suisse le plus important paradis fiscal pour la gestion de fortune transfrontalière.”

Sur ces 2 000 milliards, plus de 60 % appartiennent à des Européens, notamment à des Italiens, des Allemands, des Français, des Espagnols, des Portugais et des Grecs, énumère le chercheur. En deuxième position : les pays du Golfe, dont “les riches familles ont été, depuis les années 1970, des clients importants des banques suisses et londoniennes, ce qui n’est guère étonnant au regard du faible développement du système financier des pays du Golfe”.

Quant aux fortunes des dictateurs africains et des oligarques russes, elles ne constituent qu’une petite fraction des fortunes gérées par les banques suisses, prolonge l’économiste : “L’essentiel de l’argent en Suisse appartient encore à des Européens, et plus généralement à des résidents des pays riches – à l’exception du Japon. Il semble cependant que la part des émergents croisse, et que celle des Européens et des Américains décline.”

Trends.be

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