Cinq choses à savoir sur l’inflation

Face à l'inflation, près de la moitié des belges se serrent la ceinture

L’inflation est de retour en Europe et aux Etats-Unis après des années de faible hausse des prix, inquiétant gouvernements, populations et banques centrales, progressivement désaccoutumés à ce phénomène souvent synonyme d’incertitudes économiques et de baisse de niveau de vie.

“Pâte à dentifrice”

“L’inflation c’est comme le dentifrice: une fois sorti du tube, il est presque impossible de l’y faire rentrer”, avait mis en garde en 1980 l’Allemand Karl-Otto Pöhl, président de la Bundesbank.

Cette citation avait été un peu oubliée car depuis la création de la monnaie unique et jusqu’à la pandémie de Covid-19, les hausses de prix étaient faibles dans la zone euro, et même inférieures à la cible de 2% fixée par la Banque centrale européenne depuis la crise financière de 2008.

Mais elle a refait surface l’été dernier avec l’accélération de l’inflation.

Comme le chômage a reculé, offrant un meilleur pouvoir de négociation aux salariés, beaucoup d’économistes craignent que les hausses de salaires fassent en retour pression sur les prix, et créent donc un cercle vicieux dont il sera difficile de sortir.

Hyperinflation

Elle est la conséquence de l’emballement des prix résultant de la perte de confiance des citoyens dans la valeur de la monnaie.

Le précédent le plus célèbre est celui de l’Allemagne au début des années 20: plombé par l’endettement lié à la Première Guerre mondiale et le poids des réparations imposées par les Alliés, le gouvernement ne parvient plus à rembourser et fait tourner la planche à billets. Les épargnants perdent confiance dans la monnaie et le cours du mark dévisse.

L’hyperinflation provoque un effondrement de l’activité économique: les épargnants sont ruinés, le niveau de vie de la majorité de la population chute, constituant un terreau fertile à la montée du nazisme, avec le krach boursier de 1929.

Plus récemment, le Venezuela a connu une période d’hyperinflation avec une hausse de prix de 130.000% en 2018, selon la banque centrale, quand le Fonds monétaire international l’évalue à 930.000%.

L’exception japonaise

Depuis près de trente ans, l’économie japonaise est confrontée à une situation atypique, avec de longues périodes de baisse de prix, appelée déflation, simplement interrompues par des phases de légère inflation.

Le phénomène est né avec l’éclatement de la bulle financière et immobilière du début des années 1990. Pour se désendetter, les entreprises et les ménages de la troisième économie mondiale ont réduit leurs dépenses, ce qui a tiré les prix vers le bas.

Malgré des dépenses publiques massives et des baisses de taux d’intérêt, gouvernement et banque centrale sont restés impuissants face au phénomène.

La déflation fait peser le risque d’un cercle vicieux, comme lors de la Grande Dépression aux Etats-Unis dans les années 1920. Les entreprises ont peur de perdre des clients si elles augmentent les prix, les consommateurs épargnent plutôt que de consommer, l’ensemble faisant chuter la demande et la production.

Le remède au poids de la dette

A défaut de rembourser sa dette, un Etat peut profiter d’une inflation élevée pour réduire le poids de son endettement par rapport au PIB, un ratio communément utilisé dans les comparaisons internationales.

En pratique, l’inflation se traduit par une hausse du PIB au travers du renchérissement des produits et services, de la hausse de la consommation via la progression des salaires… ce qui fait arithmétiquement reculer le poids de la dette par rapport au PIB, et augmente les recettes fiscales de l’Etat.

Mais attention: ce mécanisme ne s’applique pas si les dégâts causés par l’inflation entraînent une récession, et donc une baisse des recettes généralisée.

De plus, “l’inflation risque de renchérir le coût de financement de la dette”, puisque les créanciers sont plus méfiants quant à la capacité du débiteur à les rembourser, rappelait récemment le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau.

Le mythe de la fin de l’inflation

Avant que la sortie de la crise sanitaire, puis la guerre en Ukraine, ne fassent grimper l’inflation, celle-ci avait quasiment disparu des principales économies de la planète. A tel point que certains économistes s’interrogeaient sur une possible disparition de l’inflation.

Ils évoquaient plusieurs raisons: le progrès technique d’abord, qui a régulièrement permis de réduire les coûts de production et donc les prix de vente des produits manufacturés, auquel s’ajoutent la mondialisation et la concurrence, qui poussent les entreprises à réduire leurs prix.

Certains évoquent également la faible évolution des salaires sur fond de développement des emplois précaires et de la baisse de la syndicalisation dans certains pays, qui avait réduit le pouvoir de négociation des salariés dans les entreprises.

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