“Certains font leur beurre grâce à leurs relations avec les pouvoirs publics”

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Karel Anthonissen Directeur régional de l’Inspection spéciale des impôts (ISI)

“Certaines personnes décrochent de beaux projets et réalisent de gros profits grâce aux relations qu’ils entretiennent avec les pouvoirs publics, sans respecter les conditions du marché et les règles de concurrence en vigueur. Leur tournure d’esprit a de quoi surprendre.” C’est ce qu’affirme Karel Anthonissen, directeur régional de l’Inspection spéciale des impôts (ISI).

Les rapports annuels de l’ISI de Gand et mon rapport final relatif à mon administration durant ces trois dernières années comprennent un chapitre intitulé “Fraude et abus dans les relations avec les pouvoirs publics”. Ce dernier rassemble des dossiers très variés qui partagent néanmoins un point commun. Ce phénomène est flagrant. Certaines personnes décrochent de beaux projets et réalisent de gros profits grâce aux relations qu’elles entretiennent avec les pouvoirs publics, sans respecter les conditions du marché et les règles de concurrence en vigueur.

En tant qu’administration fiscale, nous ne sommes pas supposés avoir un avis officiel à ce sujet, tant que l’impôt est perçu. Mais la tournure d’esprit de certains a de quoi surprendre : “J’ai des amis qui travaillent pour les pouvoirs publics (ou je représente les pouvoirs publics). Tout cet argent m’est servi sur un plateau. Pourquoi devrais-je en rétrocéder la moitié au fisc ? Les impôts ? Ce ne sont pas l’apanage des travailleurs et des entrepreneurs acharnés qui doivent batailler pour chaque centime ?”

Pour avoir traité un grand nombre de ces dossiers avec son équipe, notre inspecteur – je préserverai son anonymat, il est à présent retraité – devrait recevoir une médaille. Confronté aux clients les plus effrontés au monde, il a fait de l’excellent travail. C’est lui qui aurait dû recevoir le titre de baron, à la place d’Albert Frère et consorts.

Au nord du pays, tout a commencé avec le chantier naval Boel à Tamise. Des documents ont été falsifiés, car une entreprise qui fait des pertes échappe à l’impôt des sociétés. Cela n’a pas empêché des administrateurs, des clients et des fonctionnaires chargés des crédits maritimes de se servir allègrement. Du jamais vu chez les hommes politiques. Nous avons aussi traité les dossiers de fonctionnaires de la Régie des Bâtiments. Les pots-de-vin dont ils avaient bénéficié devaient-ils être taxés (à 50%), confisqués (à 100%), ou les deux (150%) ? Après une longue période de problèmes avec la justice et avec notre administration, ces personnes ont finalement pu disposer de cet argent.

Les profits réalisés par certains grâce à la vente de bâtiments publics sont bien plus plantureux. La Tour des Finances en est un bel exemple. Pour vous rafraîchir la mémoire, tapez simplement “Tour des Finances – ISI” dans Google.

Et puis il y a eu le drame de Jean-Marie Dedecker. En allant travailler, je l’ai entendu parler à la radio de la vente du palais de justice de Furnes. L’inspecteur compétent s’est immédiatement saisi de l’affaire et a mené une enquête approfondie. Et même si nous partagions notre bâtiment au Zuiderpoort à Gand avec le secrétariat de la LDD, rien n’a jamais filtré. C’est pourquoi Jean-Marie Dedecker n’a rien trouvé de mieux que de mener sa propre enquête. En engageant un détective privé ! Cette affaire a signé la chute de son parti. Pour plus de détails, tapez “Dedecker – Tipperary” dans Google. Il a écopé de tous les ennuis, alors que l’argent est allé au trésor public, mais il est resté beau joueur.

Il y a un peu moins d’un mois, c’est Puers qui a attiré l’attention, et plus particulièrement la zone industrielle de Pullaar et l’ancien site de l’usine papetière De Naeyer. Les critiques sur les règlements à l’amiable à outrance ont repris de plus belle. Je condamne également la procédure, mais je dois reconnaître que personne n’a signé autant d’accords de ce genre que moi. Dans chacun des cas, il s’agissait de solutions satisfaisantes. Mais je peux vous assurer une chose : les exemples cités n’en sont pas.

La semaine dernière, l’affaire De Gucht a conduit à un dénouement intéressant. Mais malheureusement, je manque de place pour m’épancher sur le sujet.

Traduction : virginie·dupont·sprl

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