Typhanie Afschrift

Budget: “De Bleeker n’a pas suffisamment triché pour que cela plaise au Premier ministre”

Typhanie Afschrift Professeure ordinaire à l'Université libre de Bruxelles

Les Etats croient pouvoir se permettre un déficit parce qu’ils ont le pouvoir de le faire supporter par leurs citoyens.

Le remplacement de la secrétaire d’Etat au Budget est un épisode misérable de plus dans la vie de ce piteux gouvernement que préside Alexander De Croo. Le fait que, par chance, cela se termine par la nomination d’Alexia Bertrand qui, par son brio et sa compétence, fait figure d’exception dans un tel gouvernement, ne change rien au problème. Ce happy end ne résout pas la question de fond, qui est le désastre budgétaire belge.

Budget: “De Bleeker n’a pas suffisamment triché pour que cela plaise au Premier ministre

Certes, tous les Etats de l’Union européenne connaissent un déficit. Mais la Belgique, habituée au rôle de mauvais élève, se révèle cette fois un cancre, avec l’un des déficits les plus colossaux d’une Europe déjà loin d’apparaître comme un modèle de bonne gestion. L’ancienne secrétaire d’Etat, Eva De Bleeker, a encouru les reproches de ses pairs et des partis de la coalition parce que ses calculs faisaient apparaître un déficit encore plus important que celui que le gouvernement voulait bien reconnaître. En somme, elle n’a pas suffisamment triché pour que cela plaise au Premier ministre, pourtant membre du même parti, l’Open Vld.

L’Etat belge a creusé le trou budgétaire toujours plus profond. Et il le fait tout en étant l’un des trois ou quatre pays les plus taxés au monde.

Dans un système européen où l’on tolère habituellement un déficit de 3%, la Belgique aboutit au double, un peu plus ou un peu moins de 6% suivant les calculs des uns et des autres. En réalité, personne ne se souvient avoir connu un budget réellement à l’équilibre qui, pour un Etat comme pour n’importe quelle entité, de la famille aux grandes sociétés, paraît être l’exigence normale. Il n’est déjà pas logique que l’on puisse, année après année, dépenser systématiquement plus que ses recettes. Mais l’Etat belge a creusé le trou budgétaire toujours plus profond. Et il le fait tout en étant l’un des trois ou quatre pays les plus taxés au monde. Des impôts toujours plus lourds que l’on ne parvient jamais à réduire.

Ces impôts nettement excessifs par rapport aux services rendus par l’Etat aux citoyens et ce déficit infernal sont le résultat d’un comportement systématique de tous les gouvernements, quels que soient les partis des coalitions: on dépense trop, on est incapable de réduire ou même de contrôler les dépenses parce que nos Etats ont drogué leur population à la dette. On a tout fait pour que les personnes, les associations et même les entreprises attendent sans cesse des aides de toute sorte, se comportent comme des assistés et ne supportent jamais que l’on vienne réduire les aides, subsides et autres allocations à charge du Trésor public. Cela ne change pas parce que cela arrange bien nos politiciens. Ils aiment être perçus comme des pères Noël qui distribuent des cadeaux. C’est si facile quand on ne les paye pas…

Certes, certains économistes, parfois de qualité, répètent sans cesse qu’on ne peut pas comparer un Etat à une entreprise, comme si les déficits étaient chose normale lorsqu’on exerce l’autorité. Pourtant, les Etats qui s’endettent ont besoin, comme les familles et les entreprises dans la même situation, de convaincre leurs créanciers qu’ils seront capables de rembourser. La seule différence au profit des Etats est qu’ils disposent de la possibilité d’établir des impôts parce qu’ils exercent le pouvoir. En d’autres termes, ils croient pouvoir se permettre un déficit parce qu’ils ont le pouvoir de le faire supporter par leurs citoyens. Cela rappelle cette phrase bien connue suivant laquelle “les emprunts d’aujourd’hui sont les impôts de demain”.

On s’endette sans cesse, et on l’a fait tant et plus lorsque les taux d’intérêt étaient nuls ou presque. Mais aujourd’hui, pour rembourser les emprunts d’hier, il faut encore plus s’endetter, cette fois en payant des intérêts plus élevés. L’Etat est mal géré et incapable de contrôler son budget et ses dépenses. Et à la fin, c’est toujours le contribuable qui paye.

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