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“Bart De Wever et l’intérim”

La solution à l’inextricable crise politique passera-t-elle par un gouvernement intérimaire ?

Le président du PS Paul Magnette vient de relancer l’idée, qu’il avait déjà émise peu après les élections. Il n’est pas le seul : le CEO de la Fédération des entreprises de Belgique, Pieter Timmermans, défend désormais aussi la piste de la constitution d’un exécutif temporaire. Le constat est imparable : le pays ne peut pas se payer le luxe de naviguer sans réel gouvernail, alors que le budget à politique inchangée dérape sérieusement (plus on attend, plus douloureuses seront les mesures rectificatrices), que le Brexit est imminent, que le Plan national énergie-climat attend toujours… Voilà pourquoi Pieter Timmermans a plaidé, dans les colonnes de L’Avenir, pour l’installation d’un ” gouvernement de redémarrage “, avec un programme et une durée limitée.

Si le PS et le monde patronal sont d’accord, a priori, cela devrait rouler tout seul. Eh bien non ! S’entendre sur les thèmes de discussion prioritaires ne signifie pas s’accorder sur le contenu de ces discussions. Or, la gauche et la droite n’ont évidemment pas les mêmes remèdes pour remettre le budget sur les rails, pour améliorer la mobilité autour de Bruxelles ou pour garantir le financement des pensions. Que le compromis porte sur six mois, un an ou une législature, il reste toujours aussi difficile à atteindre. Et donc, on voit mal pourquoi la gauche, la droite, le nord, le sud, les écologistes et les climato-sceptiques se mettraient soudain d’accord sur des politiques, simplement en sachant que ça ne durera que quelques mois.

Un gouvernement intérimaire peut toutefois ramener un élément crucial dans le jeu politique : la confiance. Actuellement, les présidents de parti s’observent souvent, se craignent peut-être, se tancent parfois. Mais ils ne se font jamais confiance, ils se soupçonnent mutuellement de planifier le coup de poignard dans le dos. ” La méfiance est la pire des choses qui peut arriver à la politique “, disait Guy Verhofstadt, en décembre 2007, lors de l’installation de son gouvernement intérimaire (trois mois). Sa mission était alors clairement de rétablir la confiance entre les partenaires politiques après la débâcle de l’orange bleue, afin de pouvoir initier un gouvernement de législature. La solution intérimaire avait fonctionné, suffisamment du moins pour permettre au gouvernement Leterme de voir le jour.

L’expérience mériterait-elle d’être rééditée aujourd’hui ? Dans l’immédiat, non. Certes, l’urgence est la même qu’en 2007. Mais la confiance entre les partis est sans doute encore plus basse qu’à l’époque. Et puis surtout, il y a ce parti qui n’était alors que le petit aiguillon de son cartel avec le CD&V et qui est, depuis, devenu le plus grand parti du pays. Il domine tant le paysage politique flamand qu’aucun parti du nord du pays ne souhaite avancer sans lui. Si l’on écarte la N-VA, le Vlaams Belang et le PVDA, aucune majorité n’est possible dans le rôle linguistique flamand à la Chambre. Le président de la N-VA Bart De Wever se dit prêt à prendre ses responsabilités et a même esquissé des ouvertures sociales en direction du PS (qui ne lui accorde aucune… confiance sur le coup). La poursuite de ce très lent processus de formation passe donc sans doute par une mission royale confiée à Bart De Wever, même si elle n’a qu’un microscopique espoir d’aboutir. Après, la voie d’un gouvernement intérimaire pourrait être réactivée, comme une sorte de sas nécessaire pour que les partis flamands acceptent une aventure avec une coalition minoritaire au nord du pays.

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