Après sa victoire aux élections, quel Brexit veut Boris Johnson?

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La large victoire promise au Premier ministre conservateur britannique Boris Johnson aux législatives lui laisse les coudées franches pour définir quel type de Brexit il compte mettre en oeuvre, en restant plus ou moins proche de l’UE, soulignent vendredi les analystes.

“Avec une large majorité, Boris Johnson peut ignorer l’ERG”, l’aile la plus radicalement europhobe de son Parti conservateur, “et choisir un Brexit plus doux s’il le souhaite”, soulignait Charles Grant directeur du groupe de réflexion Centre for European Reform (CER), sur Twitter.

Les conservateurs, emmenés par le bouillonnant Boris Johnson, ont décroché jeudi une très confortable majorité au Parlement, gagnant plusieurs dizaines de sièges supplémentaires par rapport au précédent scrutin en 2017, selon un sondage réalisé à la sortie des urnes par l’institut Ipsos/MORI.

Le scrutin a vu les conservateurs ravir aux travaillistes, qui enregistrent des pertes historiques selon ce sondage, des sièges dans son “mur rouge”, un arc allant du nord du Pays de Galles au nord de l’Angleterre, une vraie révolution.

“Le fait que le Parti conservateur détienne à présent des sièges dans le nord de l’Angleterre et les Midlands, –qui comptent encore bon nombre d’industries manufacturières, un peu d’agriculture, tous domaines qui seraient durement frappés s’il y avait un Brexit dur, ou pas d’accord de Brexit, –rend à présent plus difficile pour Boris Johson de mettre en oeuvre autre chose qu’un Brexit doux”, analyse pour l’AFP Tony Travers, professeur à la London School of Economics.

-Singapour sur la Tamise?-

Boris Johnson a mis toute sa fougue au service d’une campagne essentiellement axée sur le Brexit, répétant à l’envi “Get brexit done!” (Réalisons le Brexit) mais en se gardant bien de préciser de quoi il parle : un divorce qui maintient des relations serrées avec l’Union européenne, partenaire économique majeur du pays, ou bien un décrochage avec une divergence des normes communes jusqu’ici, en matière sociale et environnementale notamment?

Ce danger d’une sorte de Singapour sur la Tamise, paradis fiscal au secteur financier ultra-déréglementé, et concurrent de l’UE à ses portes, a déjà été relevé par plusieurs dirigeants européens, comme la chancelière allemande Angela Merkel. Ils comptent bien l’étouffer dans l’oeuf lors des négociations sur leur future relation qui vont s’ouvrir après le 31 janvier, date du Brexit.

Ces discussions sont censées déboucher sur un accord commercial d’ici la fin décembre 2020, quand expire la période de transition prévue par l’accord de sortie que Londres a conclu avec Bruxelles, et qui peut être prolongée jusqu’à deux années de plus.

Pour l’Eurasia Group, vue l’ampleur de la victoire qui lui est promise, “Boris Johnson ne sera pas redevable à la vingtaine de Brexiters acharnés du Groupe de recherche européen (ERG) qui aurait eu une influence beaucoup plus grande s’il n’avait obtenu qu’une mince majorité. Johnson devra décider s’il veut rester étroitement aligné sur l’UE ou s’il veut diverger franchement”.

Le Premier ministre a donné quelques indications sur ses intentions cette semaine pendant la campagne électorale, assurant que “l’accord conclu avec Bruxelles signifie que nous quittons l’UE avec notre relation intacte, sans taxes et sans quotas”.

“L’accord protège notre chaine de fournisseurs (…) il garantit que nous avons les équivalences complètes en matière de normes et des besoins de l’industrie”, a-t-il souligné, semblant favoriser un alignement sur l’UE.

Mais il n’a cessé parallèlement de vanter le grand accord commercial qu’il voulait conclure avec son ami américain le président Donald Trump, et qu’un tel alignement rendrait très difficile.

Pour Sam Lowe, du CER, sa victoire “accroit les chances d’un accord commercial express avec les Etats-unis, et lui permet de faire les concessions réclamées par Washington même si elles irritent pas mal de députés”.

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