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Après l’attribution du Prix Nobel d’Economie, quels sacrifices pour l’environnement?
L’attribution du prix Nobel d’économie à Paul Romer et William Nordhaus a d’abord ravi nombre de militants écologistes. On a fait remarquer que leurs études, et surtout celles de Nordhaus, font le lien entre l’économie et l’écologie et ils y ont vu une victoire de leur cause contre le réchauffement climatique. La réalité est pourtant plus nuancée.
Nordhaus a d’abord été connu pour ses recherches démontrant que les politiciens engagent des dépenses publiques principalement à la veille des élections, et que la rationalité de leur choix est essentiellement dictée par le souci d’être réélus. C’est une vérité que les tenants de l’interventionnisme public, parmi lesquels on trouve nombre d’écologistes, n’aiment en général pas qu’on leur rappelle.
Nordhaus a certes aussi été remarqué pour ses travaux sur les conséquences du réchauffement climatique. Economiste, et non climatologue, il n’a pas cherché à en déterminer la cause, mais a défini l’attitude idéale que les pouvoirs publics devraient adopter pour en limiter les effets sur l’économie. Il s’est en effet rendu compte que, si le réchauffement climatique a un coût sur l’économie, les mesures prises par les Etats pour en limiter les effets sont également coûteuses. La fameuse ” transition énergétique “, par exemple, implique des coûts considérables pour les Etats, et donc les contribuables, les entreprises et les particuliers. Nordhaus a recherché le point optimal, c’est-à-dire le réchauffement acceptable pour l’économie, celui où le coût des mesures destinées à combattre le réchauffement est le plus admissible, par rapport à celui des conséquences de ce même réchauffement.
Si le réchauffement climatique a un coût sur l’économie, les mesures prises par les Etats pour en limiter les effets sont également coûteuses.
Là où le Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, organisme politique, considère qu’on ne peut accepter un réchauffement de plus de 1,5 °C, et insiste lourdement sur le fait même qu’une augmentation de 2 °C serait complètement inacceptable, Nordhaus objecte qu’à des niveaux pareils, le coût du combat contre le réchauffement serait plus important que les dommages causés par celui-ci, et il fixe l’optimum acceptable à une augmentation moyenne des températures de 3,5 °C. Pour lui, les efforts demandés par exemple par l’accord de Paris, sont excessifs pour l’humanité.
De plus, les travaux de Nordhaus s’inscrivent dans une logique purement ” utilitariste “, en partant de l’idée qu’il appartiendrait aux Etats, voire au Giec, de faire des choix globaux en fonction de l’intérêt présumé d’une majorité. En effet, s’il existe un optimum de réchauffement moyen de 3,5 °C pour l’ensemble de la planète, cet optimum est sans doute différent suivant les contrées, et les activités des uns et des autres. Or, il n’est pas évident qu’un intérêt même majoritaire puisse être imposé à des individus qui sont affectés par les mesures anti-réchauffement. C’est la critique qui a toujours été formulée à l’égard des utilitaristes : cette doctrine impose des sacrifices à des personnes, dont les droits ne peuvent pas nécessairement être remis en cause, par le simple fait qu’ils sont minoritaires.
Des revendications ont ainsi été exprimées par des groupes environnementalistes extrêmes, qui prônent la limitation des naissances, sous prétexte que la surpopulation de la planète serait une des principales causes de réchauffement climatique, de pollution ou d’autres nuisances. De telles exigences rejoignent la politique qu’adoptait la Chine populaire, sous la direction de son parti communiste jusqu’il y a peu, et sont donc propres des régimes totalitaires. Elle remet en cause un des droits les plus fondamentaux de l’individu, celui de fonder une famille, et de choisir le nombre de ses enfants.
On sait déjà combien les politiques environnementales affectent aujourd’hui les libertés de chacun, en tentant de régir, notamment les transports, l’utilisation de l’énergie, l’habitat, et la consommation. Ici, la politique prônée par certains des mouvements de ce type irait jusqu’à affecter la liberté la plus essentielle, et qui devrait rester inconditionnelle.
C’est l’occasion de poser la question des limites du droit des Etats de s’ingérer dans la vie des gens. Les idées des Lumières impliquaient la reconnaissance de droits inconditionnels de chaque individu, auxquels les Etats devaient se soumettre, quand bien même ces libertés ne répondaient pas aux exigences de la majorité. De plus en plus, dans le domaine environnemental mais aussi dans beaucoup d’autres, on prétend limiter ces droits au nom d’une prétendue supériorité d’un intérêt général proclamé et choisi par le pouvoir. Il serait temps de rétablir les principes et de proclamer que chacun dispose de droits à ce point sacrés qu’aucun pouvoir, qu’aucune majorité, ne peut y porter atteinte.
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