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Adopter la voiture électrique? Les conséquences méconnues par l’Europe

L’industrie automobile est à la croisée des chemins. On lui demande d’aller vers l’électrique, et c’est une bonne chose. Mais la voiture électrique, c’est aussi la casse sociale assurée. On demande à l’industrie auto de moins polluer, mais cela signifie aussi que 40% de la valeur des voitures de demain ira en Asie. C’est sur ces paradoxes que voulait revenir aujourd’hui Amid Faljaoui, notre chroniqueur économique.

Mes confrères du journal économique français Les Echos ont raison de rappeler que les entreprises n’aiment pas partager. Sauf si elles n’ont pas le choix ou si ce sont des activités peu importantes.

C’est la raison pour laquelle, dans les grandes et même moyennes entreprises, les activités de restauration – la fameuse cantine – mais aussi le gardiennage et le nettoyage ont été externalisés.

Autrement dit, ce sont des fournisseurs qui s’en occupent et plus du tout l’entreprise elle-même.

Les uns le font pour faire des économies, d’autres pour éviter le seuil à partir duquel il faut un syndicat.

Peu importe les raisons, ces activités ne sont pas primordiales pour une entreprise et elles peuvent donc être sous-traitées. En revanche, pas question de partager le coeur d’activité et encore moins d’accepter de perdre une partie de la marge intéressante. Ça c’est pour la règle générale, mais comme toujours, comme en grammaire, il y a la règle générale et les exceptions.

Dans le secteur automobile, l’heure est au partage forcé. Je veux dire par là que confronté à tous les défis que doit affronter d’un seul coup le secteur automobile, ce dernier n’a plus le choix : il doit coopérer et donc accepter de partager sa marge avec des nouveaux partenaires qui sont souvent plus puissants que lui comme des Google, des Apple et autres Microsoft.

J’en parle parce que les lecteurs et lectrices qui ont pris leur voiture ce matin pour se rendre à leur travail ne se rendent pas toujours compte que l’industrie automobile est à la croisée des chemins.

Faites le décompte : elle doit faire face au déclin accéléré du diesel, elle doit tenir compte de la montée de la voiture électrique, elle doit garder à l’esprit que la voiture autonome va arriver d’ici quelques années, elle doit faire face aussi à l’arrivée prochaine des robots-taxis et d’ores et déjà, elle doit tenir compte du boom de la voiture partagée et du fait que la jeune génération est moins désireuse d’acheter une voiture que d’en avoir l’usage.

Pour nous permettre de respirer mieux, l’Europe est en train d’organiser – sans le savoir – le déplacement vers l’Asie de quasi la moitié de la valeur ajoutée de l’industrie automobile!

D’où le boom de la voiture partagée et des systèmes de mobilité alternatifs. Les plus cyniques diront “tant pis, l’industrie automobile s’est trop longtemps assises sur sa rente, elle n’a qu’à s’adapter au pas de course maintenant”.

C’est vrai en partie, mais ce qui se passe en ce moment dans l’industrie affecte tout le monde. En est-on seulement conscient ?

Prenons le cas de la voiture électrique : c’est bon pour la planète (et encore c’est à discuter), mais une voiture électrique, c’est moins de pièces et donc moins de main-d’oeuvre, donc c’est la casse sociale assurée car le jour du tout électrique – s’il voit le jour – sera aussi synonyme de drame social.

Autre exemple, la commission européenne veut accélérer l’adoption de la voiture électrique pour des motifs de lutte contre la pollution. C’est louable comme volonté.

Sauf que l’Asie a en quelque sorte un monopole sur les batteries qui sont le nerf de la guerre pour les voitures électriques.

Il faut garder à l’esprit que dans la voiture électrique, 40% de son prix sera dans la batterie. Et donc, en résumé, pour lutter contre le réchauffement climatique et donc nous permettre de respirer mieux, l’Europe est en train d’organiser – sans le savoir – le déplacement vers l’Asie de quasi la moitié de la valeur ajoutée de l’industrie automobile! Autrement dit, nous respirerons mieux en Europe, mais pour l’industrie automobile, l’Europe sera vassalisée comme c’est déjà le cas pour les télécoms et pour l’Internet. Comme quoi le Diable se cache toujours derrière les meilleures intentions.

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