Philippe Ledent

2021 ne sera pas lisse

Philippe Ledent Senior economist chez ING Belgique, chargé de cours à l'UCLouvain.

En un seul mot: accrochez-vous… dans tous les sens du terme.

“Bonne année et bonne santé!”… Rarement ces mots auront-ils pris autant de sens. L’arrivée des vaccins permet heureusement d’avoir la perspective d’une année meilleure. C’est l’espoir que nous avons toutes et tous. Sur le plan économique, la plupart des prévisions pour 2021 sont également fondées sur la vaccination de masse et la victoire de la science sur le Covid. Après une année marquée par une contraction inédite du PIB de la plupart des économies, 2021 verrait une reprise vigoureuse. C’est ce que l’on peut raisonnablement attendre compte tenu des données disponibles actuellement et du scénario le plus probable en matière de vaccination.

En un seul mot: accrochez-vous… dans tous les sens du terme.

Pour autant, il ne faut pas se voiler la face, la situation économique restera difficile encore un moment. Dès lors, un peu à l’image de ma mise en garde de l’été dernier sur la nécessité de se préparer à une éventuelle deuxième vague (qui est devenue réalité à l’automne), je ne peux que vous souhaiter de redoubler d’efforts en 2021 pour vous adapter à cette situation chaotique. Certes, on aperçoit la lumière au bout du tunnel, mais il est encore long et la lumière elle-même réserve quelques surprises.

Le changement d’année donne évidemment l’impression qu’une étape importante a été franchie. On serait passé de la survie à la délivrance, de la gestion de l’urgence aux fondations de la relance. Mais tous les virologues nous l’ont assez dit, le virus ne connaît pas les fêtes de fin d’année. Une fois la page de 2020 tournée, il a bien fallu se rendre compte que rien n’a changé. La menace d’une troisième vague est toujours présente, et les mesures de restrictions de mobilité et d’activité seront encore à l’ordre du jour pour un moment. L’année 2021 restera profondément marquée par la crise du Covid, à l’image de 2020.

Trois autres éléments feront vaciller bien des certitudes au sujet de 2021. Primo, au-delà du délai nécessaire à la vaccination de masse, on se doute qu’il ne s’agira pas d’un processus parfaitement fluide et ordonné. Il y aura inévitablement des imprévus. Secundo, la crise n’a pas encore montré son vrai visage, notamment en matière de faillites et de chômage. Cela fera de 2021 une année de contrastes, où la joie de la relance économique se mêlera aux mauvaises nouvelles pour de nombreuses entreprises. Tertio, que dire de l’héritage de la crise de 2020, qui suscitera des critiques, des manifestations, de longs débats et j’en passe? En 2020, dans l’urgence de la gestion de la crise, tout le monde était plus ou moins d’accord pour prendre les mesures de soutien, tant sur le plan monétaire que budgétaire. Mais lorsque la poussière soulevée par la pandémie retombera, les divisions sur la politique économique à mettre en oeuvre apparaîtront de plus belle, avec parfois des positions dont le radicalisme sera à la mesure de la crise. On observe par exemple déjà en France un mouvement pour demander que la Banque centrale européenne annule purement et simplement les dettes publiques qu’elle détient. Rien que ça.

En conclusion, il serait réducteur de considérer 2021 par la seule opposition à 2020. La nouvelle année ne marquera pas une sorte de retour en arrière vers le monde tel qu’on l’a laissé avant la pandémie, mais 2021 représentera au contraire un nouveau pas en avant, vers de nouveaux défis, de nouvelles contraintes, et cela nécessite de redoubler d’efforts pour s’y adapter plutôt que d’attendre que tout redevienne “normal”. Alors en un seul mot: accrochez-vous… dans tous les sens du terme.

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