Pourquoi Steve Jobs est un patron à part

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Qualités, caractère, circonstances… Il réunit ce qui n’est que partagé par d’autres. Pourquoi l’ex dirigeant d’Apple jouit aujourd’hui d’une aura unique dans le monde des affaires.

Qu’est-ce que Steve Jobs a de si extraordinaire, pour que son départ suscite autant de réactions ? Admiré ou haï, il ne laisse pas indifférent. 10 raisons qui font de lui un dirigeant d’exception.

Ce n’est pas seulement un patron, c’est un gourou

Il sait comment hypnotiser une foule. Les journalistes assistaient religieusement à ses “keynotes”, ces conférences de presse où il faisait régulièrement son show. Son côté visionnaire a fait de lui une sorte de prophète de la technologie. Mais ce n’est pas le seul domaine dans le quel le maître donnait ses enseignements. Jamais avare (au moins dans ses rares interviews) de préceptes sur la vie, la mort, le travail, l’avenir…(voir ces citations rassemblées par le Wall Street Journal), ceux qui l’ont côtoyé, ou même seulement rencontré, s’en souviennent.

En témoignent par exemple les blogueurs Robert Scoble et Om Malik, apparemment scotchés par le charisme du personnage. “Seul un mec dans le secteur m’a dit de regarder au dos d’un produit pour en comprendre sa beauté. Il a inspiré tant d’entrepreneurs pour créer leur entreprise et fabriquer eux-mêmes des produits remarquables. Plus d’un CEO m’a dit ‘Je voudrais seulement faire un produit digne d’être approuvé par Steve Jobs'”, écrit le premier. “Si Apple et le come back de Steve nous apprennent quelque chose, c’est que lorsque vous avez raison et que le monde ne le voit pas de cette façon, vous devez juste être patient et attendre que le monde change d’avis (…) Après tout, il est l’homme qui peut voir l’avenir mieux que quiconque”, philosophe le second. C’est en partie grâce à ce magnétisme singulier qu’Apple a su recruter les meilleurs, car tout le monde veut travailler avec lui.

Il revient de loin

Les mythe Steve Jobs s’est en partie construit sur les fêlures du personnage. Enfant abandonné et adopté, il a affronté la maladie : un cancer du pancréas, une transplantation du foie. Cette année, c’était son troisième départ en congé maladie. Après avoir été écarté d’Apple une première fois ; après avoir surmonté ses problèmes de santé, perdu beaucoup de poids ; à chaque fois il revenait, et à chaque fois Apple faisait un carton. Dans les légendes, il n’y a pas de héros sans notion de dépassement.

C’est un grand manager, bien qu’un autocrate

Steve Jobs est un “control freak”. Il a imposé à Apple une discipline et une exigence qui ont permis à l’entreprise d’être là où elle est aujourd’hui. Les décisions se prennent vite. L’énergie ne se disperse pas. “S’assurer que nous n’empruntons pas la mauvaise voie ou que nous n’essayons pas d’en faire trop, passe par dire non à 1000 choses”, a dit Steve Jobs. En outre, il est réputé pour sa capacité à bien s’entourer, et à faire que ses collaborateurs donnent le meilleur. En interne, ça fonctionne. Selon le classement de Glassdoor, Jobs est très largement plébiscité par ses employés. En externe, ça marche aussi : il a été élu PDG de la décennie par Fortune, et meilleur patron de 2010 par la Harvard Business Review.

Il a réinventé le walkman, le téléphone, l’achat de musique…

… en lancant l’iPod, l’iPhone et iTunes. Des produits banals, utilisés par tous, dans le monde entier, dans la vie de tous les jours. Et avant, il avait inventé l’ordinateur personnel avec l’Apple II, et les systèmes d’exploitation avec des icônes comme nous en utilisons tous. Ce qui fait dire à Josh Bernoff de Forrester que c’est l’homme qui a changé le monde le plus de fois. Tout ça avec un sens parfait du timing.

Il n’hésite pas à prendre des risques et à faire table rase

Steve Jobs a tué la disquette, il a enlevé un bouton à la souris… Tout remettre toujours en question, telle est sa devise. Il le fait avec audace, et une forte capacité de persuasion. Quand Apple sort un produit, il ne sort pas d’une étude de marché, mais de ses propres certitudes de ce qui est bon, beau, et utile. “Pour quelque chose d’aussi compliqué, c’est vraiment dur de concevoir des produits dans des focus groups. Souvent, les gens ne savent pas ce qu’ils veulent jusqu’à ce que vous leur montriez”, a dit un jour Steve Jobs.

Il transforme le plomb en or

Apple en 1997, les studios Pixar en 1986. Steve Jobs a l’art de redresser les entreprises qui vivotent. Il a certes connu des échecs, lors de la création de son entreprise NeXT Computer, ou avec certains produits Apple. Mais globalement, on retiendra surtout ses réussites, dans lesquelles nul ne peut douter qu’il est pour beaucoup.

Il est mystérieux

Steve Jobs est connu pour son culte du secret, dont il se sert d’ailleurs comme stratégie de communication. Mais il en dit aussi peu sur lui-même. Sa seule biographie autorisée va sortir le 21 novembre (avec un chapitre sur sa démission). On ne le voit pas dans les magazines people, il cultive l’art de la discrétion. En même temps, il sait être très proche de ses fans, à qui il lui est souvent arriver de répondre directement par mail, quand ils lui écrivaient. On n’a pas de mal à imaginer pour lui une fin à la Greta Garbo.

Il est une marque lui-même

Si Apple est indissociable de Steve Jobs, l’homme est aussi une marque à lui tout seul, avec ses codes, son design, ses valeurs et son territoire. A lui les “keynotes”, qu’il anime systématiquement en jean, col roulé noir et baskets blanches, et toujours en finissant par son célèbre “One more thing” (“une dernière chose”), clou du spectacle. Steve Jobs est une star, une rockstar même, pour certains, avec ses caprices (comme le raconte Dominique Delport qui l’avait invité dans une de ses émissions).

Il n’a pas peur de la controverse et de se faire des ennemis

Il ne cherche pas à ce qu’on l’aime. Contrairement à d’autres grands patrons, il ne donne pas sa fortune aux oeuvres de charité. Il lance des polémiques en attaquant ses concurrents frontalement, comme il l’a fait avec Adobe ou Microsoft. Toujours sûr de lui, il s’amuse à lancer des phrases définitives, et il assume. “Le seul problème avec Microsoft est qu’il n’ont pas de goût. Ils n’ont absolument pas de goût. Et je ne veux pas dire dans les détails, mais en général, au sens où ils n’ont pas d’idées originales et ils n’apportent pas beaucoup de culture dans leurs produits”, a-t-il dit un jour en 1996. Aujourd’hui, Apple fait peur par sa volonté hégémonique, mais il ne cherche même pas à donner des gages. Et quand il balance que ses produits sont “magiques” et “révolutionnaires”, il y croit vraiment.

Il a des fans dévoués et prêts à tout

Aucune marque au monde n’a aujourd’hui des fans comme ceux d’Apple. Parce qu’une marque, en général, peut avoir des consommateurs fidèles, mais pas des fans. Ce statut de marque “rockstar” est réservé à la Pomme. Les propos des fans qui font la queue la nuit pour acheter le nouvel iPhone ou le nouvel iPad, on pourrait les entendre dans la bouche des fans des grandes idoles pop. Inversement, on trouve des gens qui détestent Apple. Des sentiments qui n’existeraient sans doute pas sans la figure de Steve Jobs, dans l’ombre de sa marque.

Raphaële Karayan

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