Les “mystery calls”, une nouvelle arme contre la discrimination à l’embauche?

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Si des mesures existaient déjà pour lutter contre la discrimination à l’embauche, celles-ci n’étaient en pratique pas efficaces. Le législateur est intervenu en vue de réduire les conditions entourant les “mystery calls” afin de détecter les discriminations.

Il y a quatre ans, les inspecteurs sociaux ont reçu du législateur le pouvoir de détecter les discriminations à l’embauche au moyen d’appels mystères. De telles discriminations correspondent au traitement différencié de potentiels travailleurs, sans justification objective et raisonnable à l’égard du poste de travail à pourvoir.

Dans le cadre de ces mystery calls, l’inspecteur social peut se faire passer pour un travailleur ou un travailleur potentiel afin de vérifier si une discrimination fondée sur un critère protégé légalement (par exemple: le sexe, l’âge, l’origine ou l’orientation sexuelle) est commise par l’employeur.

Trois conditions cumulatives devaient être remplies afin de pouvoir procéder à un appel mystère : il devait exister des indications objectives de discrimination, révélées à la suite d’une plainte ou d’un signalement et qui devaient être soutenues par des résultats de datamining et de datamatching. Le datamining est un processus utilisé pour extraire des données utilisables d’un ensemble plus large de données brutes tandis que le datamatching consiste à comparer deux ensembles de données différents et à les faire correspondre l’un à l’autre.

En plus de cette triple exigence, la loi prévoyait que les faits punissables (mais exemptés de peine) commis par l’inspection sociale (par exemple: faux en écriture, port de faux nom, etc.) devaient être moins graves que les faits punissables recherchés. La réunion de l’ensemble de ces conditions cumulatives n’était donc presque jamais rencontrée, de sorte que très peu d’inspecteurs sociaux recouraient à des appels mystères pour détecter des comportements discriminatoires.

Des conditions moins strictes

Pour pallier ce problème, le législateur a décidé de modifier les conditions dans lesquelles les inspecteurs sociaux peuvent y recourir. Depuis le 8 mai 2022, ces inspecteurs peuvent désormais s’appuyer soit sur des indications objectives de discrimination, soit sur une plainte étayée ou un signalement, soit sur la base de résultats de datamining et de datamatching, afin de pouvoir procéder à un appel mystère. Le cumul des trois conditions n’est donc plus nécessaire.

En outre, le législateur estime désormais que les faits punissables de l’inspection sociale doivent uniquement être proportionnels à l’objectif visé. Il ne sera plus exigé que les faits punissables de l’inspection sociale soient moins graves que le comportement discriminatoire de l’employeur.

Recours à des tiers

Enfin, les inspecteurs sociaux peuvent dorénavant recourir à des tiers (ne faisant pas partie de l’inspection sociale) dans l’application des tests de discrimination, ce qui n’était pas le cas auparavant. A titre d’exemple, il pourrait désormais être demandé à des individus externes de postuler fictivement auprès d’entreprises soupçonnées de discrimination.

Au vu de toutes ces modifications législatives, les employeurs peuvent donc s’attendre à recevoir davantage de mystery calls de la part d’inspecteurs sociaux ou de tiers pour détecter des comportements discriminatoires sur le marché du travail.

Par Marie Berthet, avocate en droit du travail chez CMS

Marie Berthet, avocate en droit du travail chez CMS
Marie Berthet, avocate en droit du travail chez CMS© pg

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