Un voyage de toutes les combines

Roman a un peu perdu la tête depuis qu’il a commencé un nouveau job. Le jeune homme de 29 ans oeuvre, depuis quelques mois, comme couchettiste sur un train de nuit. Un travail que l’auteur du roman Paris-Venise connaît très bien pour l’avoir exercé durant un an et demi. ” Mais une grande partie de ce que je raconte a été romancé. Je me sers du décor, de ce que j’ai vu, fait et entendu “, explique Florent Oiseau.

Ce jeune auteur français, âgé de 27 ans à peine, s’est fait remarquer il y a moins de deux ans avec Je vais m’y mettre. Un premier roman dans lequel il aborde la procrastination à travers le personnage d’un attachant quadragénaire qui, n’ayant jamais rien fait de sa vie, se voit dans l’obligation de trouver un job après la perte de ses allocations. Une situation décrite avec humour et humanisme. Deux qualités que l’on retrouve également dans Paris-Venise, le deuxième roman de Florent Oiseau.

Cette fois, le jeune écrivain nous embarque dans le train de nuit qui relie Paris à Venise. Lorsqu’il était lui-même couchettiste, Florent Oiseau a dû effectuer des tâches qui dépassaient ses fonctions. A l’instar de son héros, il a traqué les fraudeurs, fait barrage aux portes pour empêcher les pickpockets de monter, etc. Mais ce qui le scandalise le plus encore aujourd’hui, c’est le comportement de certains douaniers envers les sans-papiers. ” Les Italiens surtout n’avaient aucune empathie envers ces personnes qui vivent dans une galère monstre “, se souvient-il.

Paris-Venise, c’est aussi un trajet synonyme de combines en tout genre, allant du petit vol à un véritable trafic de clandestins de la part de l’équipage du train. Son jeune (anti)-héros va devoir prendre des décisions face à ces situations insoupçonnées. Malgré son empathie et son honnêteté, va-t-il agir comme ses collègues et profiter de toutes ces combines pour arrondir ses fins de mois ? Roman va se trouver des excuses – s’intégrer à l’équipe et se faire bien voir de sa jolie collègue. ” Il essaie de se donner bonne conscience. Mais petit à petit il se rend compte qu’il devient lui aussi un des maillons de cette chaîne de combines “, précise l’auteur.

Plus encore que dans son précédent roman, Florent Oiseau parvient à trouver le juste ton, à savoir un équilibre délicat entre humour et gravité. On est loin des pièges des premiers romans. L’auteur fait autant rire le lecteur qu’il ne le fait réfléchir. A travers l’histoire de Roman, celui qui a effectué une vingtaine de jobs différents malgré son jeune âge nous décrit avec empathie la galère des travailleurs et des jobistes. Il questionne le monde du travail et la manière dont la jeunesse actuelle – qui ne se reconnaît plus dans les schémas traditionnels – l’aborde. La génération du héros (et de l’auteur) se finance via des opérations de crowdfunding, refuse des métiers classiques. Et lui, Roman, où en est-il ? Cette remise en question, l’auteur aussi l’a vécue. ” Quand je faisais des petits jobs, j’avais une petite appréhension quand je devais me présenter, confie-t-il. Je craignais cette fameuse question fatidique : ‘Et toi, que fais-tu dans la vie ? ‘. C’est sûr que maintenant, c’est plus confortable. Je sens que le regard que l’on pose sur moi a changé. ” Aujourd’hui, l’auteur alterne encore écriture et job alimentaire. ” Jusqu’au jour de la consécration ! “, ironise-t-il.

On crache sur l’argent et les avantages de ceux qui en ont, on s’invente des idéaux pour justifier notre frustration de pauvre, mais quand on goûte, l’espace d’une seconde, aux trucs réservés aux riches, on ne trouve pas que ça a un goût dégueu.

Florent Oiseau, ” Paris-Venise “, éditions Allary, 240 pages, 17,30 euros.

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