La vie de Norah Baume s’écoule doucement entre Paris et l’école de banlieue où elle enseigne le français. Jusqu’au jour où Sofiane, adolescent “le sourcil fier, la mine esclave de ses atours”, entre dans sa classe: “j’ai tout de suite compris qu’il était maître en son royaume”. A 26 ans, elle mène une existence bourgeoise avec son compagnon qui semble promis à une brillante carrière académique: “L’appartement que nous habitons est un appartement lumineux […]. Nous l’avons aménagé avec soin parce qu’alors nous avions l’impression qu’il nous représenterait. Nous avons voulu coller à l’image du couple intellectuel, c’était cela le plus important, montrer que nous étions cultivés”. Si elle parle au passé, c’est que le moment de la rupture approche: “Je ne suis pas malheureuse, mais je voudrais fuir”. Et elle fuit, et on tremble avec elle. Dans une langue sensuelle et précise, Lou Kanche décrit la passion impossible, les rêves plein d’incendies (voyez cette phrase incroyable: “Les champs de lin en flammes, et tout est odeur de poivre noir.”) et l’exploration de soi. Un roman pour n’importe qui a jamais rêvé de disparaître.
Lou Kanche, Rien que le soleil, éditions Grasset, 216 pages, 18,50 euros.