Philippe Ledent

“La digitalisation peut faire la différence entre la survie et la noyade pour les petites entreprises”

Philippe Ledent Senior economist chez ING Belgique, chargé de cours à l'UCLouvain.

Il ne faut pas réfléchir longtemps pour comprendre qu’une entreprise de services équipée de laptops et utilisant le cloud a eu cette année bien plus de résilience qu’une même entreprise ne disposant que d’une informatique fixe et sur site.

La digitalisation dans les entreprises (ou faudrait-il dire “des” entreprises?) est une thématique à la mode. Non seulement parce que les innovations technologiques sont nombreuses et offrent des solutions innovantes pour beaucoup de fonctions mais aussi parce que dans la période actuelle, la digitalisation permet de contrecarrer en partie les contraintes imposées par les restrictions de déplacement et le confinement dans de nombreux secteurs.

Il ne faut pas réfléchir longtemps pour comprendre qu’une entreprise de services équipée de laptops et utilisant le cloud a eu cette année bien plus de résilience qu’une même entreprise ne disposant que d’une informatique fixe et sur site. De même, un magasin disposant d’un e-shop ou un restaurant pratiquant les commandes par Internet (livrées ou à emporter) a pu assurer une certaine continuité de son activité alors que les autres ont dû tout arrêter. Mais les données confirment-elles cette intuition?

Pour les petites entreprises confrontées à un choc sans précédent, la digitalisation peut faire la différence entre la survie et la noyade.

Une récente étude du Trésor français (*), qui dépend du ministère de l’Economie et des Finances, s’intéresse justement à l’impact de la numérisation des entreprises durant le premier confinement. Pour ce faire, les données de plus de 8.000 entreprises françaises ont été étudiées. Le degré de digitalisation a été mesuré soit par la présence d’ordinateurs portables, soit par un indicateur de ventes en ligne pour les entreprises de commerce. Il apparaît clairement que dans le commerce de détail, les entreprises à jour sur le plan digital ont moins souffert que les autres. Concrètement, les auteurs de l’étude trouvent un écart de 25 points de pourcentage entre le repli du chiffre d’affaires des entreprises disposant de solutions digitales et les autres. Cet écart atteint même 35 points dans le cas de commerces non alimentaires. Dans les secteurs de l’industrie, du commerce de gros et des services spécialisés, un écart significatif est également trouvé entre les entreprises disposant de laptops et les autres. Même si une analyse détaillée devrait affiner ces résultats, il s’agit là d’une première preuve tangible que pour les petites entreprises confrontées à un choc sans précédent, la digitalisation peut faire la différence entre la survie et la noyade.

Certes, la digitalisation n’est pas la panacée. Dans certains secteurs, elle n’est même d’aucune utilité. Elle présente aussi des inconvénients, comme l’exposition à la cybercriminalité. Mais sachant qu’une part des nouveaux comportements adoptés durant les confinements (télétravail, vente en ligne, réunion et cours à distance, etc.) demeurera après la crise, ce qui n’était qu’un plan B pour de nombreuses entreprises deviendra la norme. Que vous soyez entrepreneur ou décideur, investissez, aidez, modifiez votre stratégie mais… pensez-y!

(*) Numérisation des entreprises françaises, de Romain Faquet et Vincent Malardé, dans Trésor-Eco, novembre 2020, www.tresor.economie.gouv.fr.

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