Quelques jours à Bologne

Une ville qui ne manque pas d'atouts. Ci-dessus: panorama depuis l'église San Michele in Bosco. En haut à droite: les arcades, caractéristiques de la ville, qui surplombent ses trottoirs sur 37 km. En bas à droite, la tour Asinelli, qui date pour l'essentiel de 1109. © Sylvie Bresson

Charles-Quint se fit sacrer empereur dans la capitale de l’Emilie-Romagne, réputée pour ses spécialités culinaires autant que pour ses palais, arcades et autres témoins de son prestigieux passé.

Longtemps snobée au profit de la Toscane en général et de Florence en particulier, Bologne est aujourd’hui en pleine ascension touristique. Normal, la cité ne manque pas d’atouts. Bologne, c’est d’abord la piazza Maggiore, sur laquelle trône la basilique San Petronio, grandiose à l’intérieur mais inachevée à l’extérieur : seul le bas de la façade a reçu son décor de marbre. Elle se prolonge par la piazza del Nettuno, ainsi nommée car accueillant une statue de Neptune due à Jean Bologne. Souvent présenté comme ” sculpteur flamand “, il est en fait né à Douai et a étudié à Mons avant de faire carrière en Italie. Au fait, le trident de Neptune vous en rappelle un autre ? Tout juste : il fut pris comme modèle par Maserati. Plusieurs palais remarquables complètent le décor : dei Notai, dei Banchi, del Podesta et d’Accursio. Ce dernier est aussi appelé Palazzo Comunale, car il héberge la mairie. Y est également logé le musée regroupant les collections d’art de la ville, rouvert au public en avril.

Quelques jours à Bologne
© Sylvie Bresson

L’Atomium du 12e siècle

C’est non loin de là, au bout de la via Rizzoli, que trône la tour Asinelli, une des 20 survivantes des près de 200 tours qui couvraient la ville dès le Moyen Age. Devenu emblème de la cité, cet édifice de briques date pour l’essentiel de 1109 et pointe à 97 mètres. Stupéfiant ! Des escaliers en bois conduisent au sommet ; les 498 marches étant assez basses, l’ascension est moins pénible qu’on ne pourrait le craindre… On peut y grimper toutes les demi-heures, par groupe de 70 personnes maximum, sans réservation. La vue sur Bologne y est d’autant plus fabuleuse qu’on plonge sur le centre historique. Outre la coupole de la basilique San Petronio, accessible bien qu’en travaux, deux vues plus lointaines sont également réputées. Au sud, le parvis de l’église San Michele in Bosco. Au sud-ouest, l’église San Luca. Située sur une colline, cette dernière est un lieu de pèlerinage, mais aussi un but de promenade et de jogging (on s’y bouscule le week-end ! ). San Luca est reliée au centre-ville par un chemin couvert de 3,8 km comptant 666 arches. Ce portique passe pour le plus long du monde.

Portique ici, arcades en ville. C’est une grande tradition bolonaise, souvent maintenue dans les constructions neuves du centre-ville. Ces trottoirs couverts par les immeubles, qui s’étendent sur pas moins de 37 km, permettent de traverser la ville en étant presque partout à l’abri, tant du soleil que de la pluie. Plus encore que les tours éparses, les arcades omniprésentes participent à la personnalité de la ville. Les plus anciennes, qui datent du 13e siècle, étaient souvent très élevées.

Du ” quadrilatero ” à la Fico

Douterait-on que Bologne soit justement réputée pour sa bonne chère qu’une visite du quadrilatero, l’hyper-centre situé à l’est de la piazza Maggiore, en ferait la démonstration. La via Drapperie héberge plusieurs boutiques historiques proposant des spécialités maison : l’épicerie Tamburini, propice à une halte gourmande, ou encore Paolo Atti et ses pâtisseries sucrées et salées. Suivent des poissonneries hautes en couleurs, des marchands de fromages et de charcuteries : jambon séché et mortadelle, la spécialité de Bologne. Si vous vous méfiez de cette pâte rosâtre aux ingrédients mal identifiés, c’est peut-être l’occasion de vous réconcilier avec elle… Les touristes sont assez nombreux à déambuler dans le quartier, mais les Bolonais plus nombreux encore à y faire leurs achats. Pittoresque et authentique donc. On ne néglige pas les ruelles transversales, en particulier la via Pescherie Vecchie qui abrite une discrète auberge du 15e siècle. Attention : c’est le numéro 1D (et non 1), qui se situe au milieu de la rue. Et qu’observe-t-on, imprimé sur le côté droit de la façade ? Un petit texte signé… Amélie Nothomb. Une dernière halte, dans la rue suivante, la via Clavature, pour jeter un oeil sur une curiosité célèbre : les personnages en terracotta de l’église Santa Maria della Vita, qui pleurent le Christ avec une expression de stupeur pour le moins déroutante.

Quelques jours à Bologne
© Sylvie Bresson

Loin du ventre de la cité, une visite s’impose au Fico, immense centre commercial dédié à la nourriture, imaginé par le fondateur de la chaîne Eataly. Ses 100.000 m2 accueillent non seulement des boutiques et restaurants de toutes sortes, mais encore quelques ateliers de fabrication bien visibles du public : mortadelle, fromage, pâtes, crème glacée, etc. On remonte plus en amont encore du produit avec les vaches, chèvres et poules parquées à l’extérieur. La totale ! Les ateliers d’initiation sont légion. Maîtriser la fabrication de la crème glacée ? Facile chez Carpigiani. C’est 300 euros pour une journée et jusqu’à 4.100 euros pour 19 jours… Détail pratique : on peut joindre le Fico en bus au départ de la gare.

LA PIAZZA DEL NETTUNO, sa fontaine et un trident que les amateurs de bolides connaissent bien...
LA PIAZZA DEL NETTUNO, sa fontaine et un trident que les amateurs de bolides connaissent bien…© Sylvie Bresson

A table : ” cotoletta ” et ” pignoletto ”

Quelques restaurants pour goûter aux spécialités bolonaises. Elles sont très classiques à l’Osteria Bottega, maison réputée sans être inoubliable, située via Catarina, pittoresque rue datant du Moyen Age. Une succulente curiosité : l’épaisse tranche de lard pata negra. La cotoletta alla bolognese (veau avec jambon et fromage) est par contre un peu différenciée au Ristorante Bolognese, un nom quelconque dans un immeuble qui l’est autant, près de la gare. Mais un joli sous-sol et un repas de qualité. Comme les Bolonais, les touristes asiatiques le savent déjà et les autres devraient suivre… Même plat très revisité (un peu trop ? ) chez Arcimboldo, établissement dont la réputation grimpe à juste titre. Magnifique lasagne verde, autre spécialité de la ville. Situé en bordure d’un quartier rempli de petits restos à touristes et de cafés pour étudiants, Sale Grosso est spécialisé dans les poissons. Clientèle très locale, comme l’ambiance.

Deux spécialités de pâtes servies (presque) partout : les tagliatelles al ragu (avec sauce bolognaise) d’une part, les tortellini et tortelloni de l’autre. Les premiers, avec i, sont fourrés de viande et les seconds, avec o, fourrés de fromage. On ne saurait ignorer cette nuance ! Au rayon vin, si le lambrusco, ce rouge pétillant, provient de la région proche (Modène), il est un (petit) blanc peu connu produit sur les collines entourant Bologne : le pignoletto.

LES TORTELLONI, spécialité locale, à ne pas confondre avec les tortellini...
LES TORTELLONI, spécialité locale, à ne pas confondre avec les tortellini…© Sylvie Bresson

De Giotto à Morandi

Même si elle ne peut rivaliser avec ses confrères florentins, la Pinacothèque, le plus vaste musée de Bologne, vous plonge avec bonheur dans la richesse et la finesse de la peinture italienne ancienne. Elle est axée sur les tableaux du 13e au 18e siècle. En vedette : un triptyque de Giotto. Plusieurs autres musées ont leur spécificité. Dans le quartier de l’université (la plus vieille d’Occident ! ), face à quelques fresques contestataires, le palais Poggi en abrite deux. On ne quitte pas celui des cires anatomiques (18e siècle) sans aller jusqu’à la dernière petite salle, pour admirer… deux jolies tapisseries bruxelloises du 16e s. En face : le musée des arts militaires, qui possède de superbes maquettes de navires du passé. Musées jumeaux aussi que ceux du palais Archiginnasio, voisin de la basilique : d’un côté la fameuse salle d’anatomie (1637), de l’autre une bibliothèque, aussi richement décorée que les couloirs du palais. Un écusson y évoque la Flandre et Bruxelles.

Si les musées archéologique et de la musique ne sont pas incontournables, on note que la salle 13 du sympathique musée d’histoire de la ville est consacrée au sacre de Charles-Quint par le pape, en 1530. Sa visite se termine par une jolie salle d’apparat. Un petit coup de coeur : le Museo Medievale, qui recèle divers objets fort remarquables. Et un gros coup de coeur : les Collezioni Comunali d’Arte, dans le Palazzo Comunale évoqué plus haut. Sans doute le plus agréable et le plus intéressant à la fois, en raison tant de la diversité des oeuvres exposées que de la riche décoration des pièces : ravissantes frises sur le haut des murs et superbes plafonds à caissons. C’est vrai ailleurs, mais ce l’est ici plus encore. On observe au passage une interpellante maquette de la ville au Moyen Age : une forêt de tours !

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LE “QUADRILATERO”, hyper-centre historique, réputé pour ses commerces de bouche.© Sylvie Bresson

Même réputée pour son passé, une cité ne saurait aujourd’hui se passer d’un musée d’art contemporain. Bologne a donc le sien : le MAMbo. On y retient dès l’entrée un cocasse Funerali di Togliatti. Devinette : combien de fois le visage de Lénine y apparaît-il ? Le MAMbo abrite aussi la donation Morandi, le peintre vedette de la ville (1890-1964). Ses innombrables natures mortes représentent compulsivement quelques bouteilles, vases, cruchons, etc., et sa bouteille fétiche est exposée sous verre. Le jour de notre visite, une vingtaine de jeunes Chinois les reproduisaient au crayon. Pour amateurs avertis…

Le charme de Santo Stefano

Innombrables églises bolonaises… Plusieurs sont immenses, baroques, étrangement sobres (sauf Giacomo Maggiore) et d’un intérêt assez limité. Un trio sort du lot : San Domenico, pour l’extraordinaire tombeau du saint. On est frappé par l’ange de droite, dû à Michel-Ange, aussi viril que celui de gauche est féminin. San Francesco ensuite, très beau gothique dépouillé, flanquée d’étranges coffres, façon tombeaux de sultans. Ce sont ceux des ” glossateurs “, ou commentateurs du droit. Pionniers des avocats coupeurs de cheveux en quatre, en somme. Santo Stefano enfin et surtout, ensemble de plusieurs lieux de culte très anciens. On craque pour l’église du Saint-Sépulchre et celle des saints Vital et Agricola, dont certains éléments remontent au 8e siècle. La place Santo Stefano est bordée de bâtiments superbes, tels les palais Salina et Isolani, ce dernier traversé par le corte Isolani : un long passage tout neuf, bordé de jolies boutiques et de petits restos sympas. Il débouche sur la magnifique strada Maggiore, en dessous d’une arcade du 13e siècle perchée à neuf mètres. Sympathique lien entre la Bologne d’autrefois et celle d’aujourd’hui…

Ferrari, Lamborghini e co

Si l’office de tourisme de Bologne joue à fond la carte de la bonne chère en proposant des itinéraires gourmands en ville et des excursions dans la région, l’une de ces dernières associe la Food Valley à la Motor Valley (en anglais dans le texte… italien). C’est que Modène et Maranello ne sont pas loin. Et là, on est chez Ferrari. Pas loin non plus, Ducati et Lamborghini, dont on visite aussi les musées et usines avec d’autres tours guidés. Et plus si affinités : un tour privé en Ferrari F458 pour 690 euros, en Lamborghini Gallardo pour 565 euros.

Quelques jours à Bologne
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En pratique

Brussels Airlines assure un vol quotidien avec départ en début d’après-midi. Moins cher, Ryanair part de Charleroi. Trends-Tendances a choisi le Royal Carlton Hotel (photo), à la clientèle très business, pour sa localisation optimale. Situé dans une rue calme donnant sur un axe principal, cet établissement quatre étoiles est en effet très facilement accessible par ses propres moyens, tant en voiture (garage de 400 places ! ) qu’avec l’Aerobus venant de l’aéroport. Ce surprenant immeuble moderne de couleur ocre, planté dans un jardin, à l’intérieur classique et feutré, est situé en bordure de la ville ancienne, dont on rejoint le coeur en une dizaine de minutes à pied. Situé sur la piazza Maggiore, l’office de tourisme de la ville propose une Bologna Welcome Card donnant accès (une seule fois) aux musées et à quelques autres attractions ; version Easy à 25 euros et version Plus à 40 euros. Particularité : ces cartes sont valables un an. Les transports en commun ne sont pas compris, mais guère utiles pour visiter la cité. Renseignements sur le site www.bolognawelcome.com (en anglais), fort complet et proposant de nombreuses excusions.

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Les bonnes adresses d’Yves Caprara

CEO de Prayon, le géant liégeois des produits phosphatés, Yves Caprara est revenu ébloui de Bologne. En logeant dans le nord de la ville, il conseille de se rendre dans le centre par la majestueuse via Independenzia, pour ses arcades et boutiques. En journée, visite à la Galleria Cavour, pour choisir les plus beaux cuirs des couturiers italiens. En n’oubliant pas que les belles boutiques s’étirent aussi le long de la piazza Galvani voisine. Et en se laissant tenter, au coin, par l’élégant Caffe Zanarini, pour ses petits gâteaux comme pour ses crèmes glacées.

En soirée, avant de goûter à la cuisine raffinée des petits restaurants du centre, on prend l’ aperitivo, souvent en compagnie d’étudiants, dans les établissements où l’on découpe le jambon de Parme et sert les vins de la région. Une adresse recommandée : La Prosciuterra, via G. Oberdan. Pittoresque à souhait, en effet, et souvent bondée. Ajoutons-y pour le dessert, au n°15 de la même rue, la gelateria Pellegrino, fondée en 1934. Excellent parfum zabayone.

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