Que les absents lèvent la main

ALBANIE, VIEILLE VILLE DE KRUJA. A l'horizon 2050, Bulgarie, Bosnie, Roumanie, Serbie, Croatie et Albanie auront perdu entre 25 et 39% de leur population. © GETTY IMAGES

Eprouvés par une faible natalité et le départ des forces vives vers l’Europe de l’Ouest, plusieurs pays vont recenser leur population afin de mesurer l’ampleur du désastre démographique.

La plupart des pays européens procéderont des recensements en 2021 et, pour beaucoup d’entre eux, les résultats seront faciles à prédire. Il n’en va pas de même pour les Balkans. Depuis la chute du communisme et la fin des guerres de Yougoslavie qui l’ont suivie, les habitants des Balkans ont fait moins d’enfants et ont émigré en nombre. Un exode favorisé par les pénuries de main-d’oeuvre dans certaines régions d’Europe, comme l’Allemagne, qui facilitait l’obtention du permis de travail pour les ressortissants de pays non européens. Le fait que personne ne sache combien sont partis ni combien sont restés complique, sur place, la tâche des planificateurs.

Ainsi, la Macédoine du Nord n’a pas été recensée depuis 2002. Depuis, son institut de statistiques a consciencieusement établi des projections fondées sur les données de l’époque et évalue actuellement le nombre d’habitants à 2,08 millions. Mais il pourrait n’être en réalité que de 1,5 million. Dans certains pays, comme la Bulgarie, les données sont plus récentes. Mais quelle que soit la fiabilité des chiffres, la tendance n’en reste pas moins la même. La conjugaison de l’émigration et d’une baisse de la natalité entraîne un vieillissement de ces sociétés et, faute d’immigration, un déclin démographique.

En 1989, on comptait 8,9 millions de Bulgares. Aujourd’hui, on n’en dénombre plus que 6,9 millions. Voilà 30 ans, la Serbie (sans le Kosovo) totalisait 7,8 millions d’habitants. Aujourd’hui, ils ne seraient plus que 6,9 millions. Il y avait en Roumanie 23,2 millions de Roumains. En 2020, on estime leur nombre à 19,4 millions. Et la Moldavie a probablement perdu depuis la fin de l’ère communiste un tiers de sa population, qui s’établit actuellement à 2,7 millions d’habitants.

En ce qui concerne les naissances, le nombre moyen d’enfants par femme est de 1,37 en Albanie et de 1,26 en Bosnie-Herzégovine – soit parmi les plus faibles du monde, loin du seuil de renouvellement des générations, établi à 2,1 enfants par femme. D’autres pays, comme la Bulgarie (1,56 enfant par femme), sont plus proches de la moyenne européenne (1,55), mais sans immigration, ce n’est pas assez pour enrayer le déclin démographique.

Lourdes répercussions

Les recensements de 2021 devraient fournir aux gouvernements les données fiables dont ils ont besoin pour tout planifier, des écoles maternelles aux retraites, à l’heure où les diplômés émigrent et où seules les personnes peu qualifiées et les seniors restent au pays. Pour autant, quels que soient les chiffres précis, les perspectives ne sont guère reluisantes. Les projections estiment qu’à l’horizon 2050, la Bulgarie aura perdu 39% de sa population par rapport à 1989, la Bosnie 37%, la Roumanie 31%, la Serbie et la Croatie 24%, et l’Albanie 25%.

Des mutations aussi profondes auront à l’évidence de lourdes répercussions sociales et économiques. Pour prendre un exemple déjà visible, le chômage était jusque-là un problème dans les Balkans. La pénurie de main-d’oeuvre inquiète aujourd’hui davantage.

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