La start-up belge qui veut optimiser la livraison à domicile

Michael Darchambeau, Jonathan Weber, Mélanie Applincourt, fondateurs d'Urbantz " Nous sommes en phase de scale-up et avons l'ambition de devenir un acteur qui compte, d'abord au niveau européen, puis global. " © FRÉDÉRIC SIERAKOWSKI / ISOPIX

Devenir le logiciel incontournable pour gérer les derniers kilomètres d’une livraison à domicile. Voilà le pari de la start-up bruxelloise Urbantz qui prend déjà en charge ce créneau logistique pour le groupe Carrefour en France. Jusqu’ici très discrète, la jeune pousse vient de lever 6 millions d’euros. Ce qui la place dans le club, select, des start-up en vue.

Ils sont une quarantaine à s’activer au 11e étage de ce bâtiment de l’avenue Louise. Un plateau à la vue imprenable sur Bruxelles, parfaitement design, pour regrouper ses jeunes équipes. Urbantz, qui développe une solution logicielle pour optimiser la gestion du ” dernier kilomètre ” dans la livraison, est jusqu’ici restée plutôt discrète dans notre écosystème national. Mais sa récente levée de fonds va désormais la propulser dans la catégorie des start-up belges en vue. Elle vient en effet de réaliser sa série A pour un montant de 6 millions d’euros qui proviennent majoritairement de deux fonds. Le premier n’est autre que Korys, le fonds de la famille Colruyt que l’on retrouve notamment derrière Biocartis, Bio-Life, Newpharma, Ontoforce, etc. L’autre n’est pas belge. Il s’agit du venture capitalist londonien Environnemental Technologies Fund (ETF) Partners.

Nous assurons une activité de livraison plus efficace, mais aussi plus durable.

L’un et l’autre ont visiblement été séduits par l’approche d’Urbantz. Fondée en 2015, la start-up a développé une solution SaaS ( software as a service) pour optimiser les tournées de livraison. Dans le jargon, on parle d’un TMS, soit d’un transport management system. La jeune pousse ne possède bien sûr aucune camionnette ni aucune flotte. Elle se focalise sur le développement d’une plateforme numérique. L’un de ses fondateurs, Michael Darchambeau, avait eu une expérience dans le transport durable pour le ” dernier kilomètre ” à Paris et s’était rendu compte, à l’époque, que la problématique de ” scalabilité ” d’un tel business passait par le système d’informations. ” Il fallait réceptionner les colis qui arrivaient par centaines et consolider les livraisons, se souvient l’entrepreneur. Mais sans une IT puissante, ce n’était pas possible aussi efficacement. Et puis, nous n’avions pas beaucoup de visibilité une fois que les livreurs quittaient l’entrepôt… ”

Voilà d’où est née l’idée d’Urbantz. Michael Darchambeau s’est ensuite associé à Jonathan Weber, Mélanie Applincourt, Dimitri De Boose (CEO actuel de Bsit) et Jérémie Jacquet (Adneom) pour fonder Urbantz – les deux derniers ne s’impliquant plus opérationnellement dans la start-up. Leur volonté est claire : digitaliser et optimiser les tournées des entreprises de transport de taille moyenne qui, parfois encore, se passent d’outils numériques poussés pour organiser les livraisons. Il s’agit d’optimiser les déplacements. Cela consiste à déterminer les chemins les plus courts, à éviter que plusieurs camionnettes ne passent le même jour dans la même rue, à diminuer les trajets à vide, etc. ” De la sorte, nous assurons une activité de livraison plus efficace, mais aussi plus durable “, souligne Jonathan Weber, CEO d’Urbantz.

Modèle “SaaS”

La start-up a adopté un business model assez classique dans l’univers du SaaS : un abonnement lié à des volumes. Un peu comme dans les télécoms : les entreprises prennent des packs qui couvrent un certain nombre d’unités (ici des livraisons). A l’unité, l’usage du logiciel ne coûte aux clients que quelques dizaines de centimes par livraison. ” Dans le coût d’une livraison, cela reste marginal pour nos clients, mais nous représentons un élément différenciant “, plaide Jonathan Weber. Pour la start-up, ces ” quelques dizaines de centimes ” commencent en effet à chiffrer. Les responsables d’Urbantz ne dévoilent pas leur chiffre d’affaires actuel. Mais on peut aisément imaginer que le MRR (revenu récurrent mensuel) de la jeune pousse dépasse 100.000 euros chaque mois. C’est en général le niveau de MRR des entreprises actives en software as a service lorsqu’elles opèrent leur série A.

D’abord convaincre les ” retailers ”

A la base, Urbantz pensait s’adresser essentiellement aux petites et moyennes entreprises de livraison qui assurent des transports à domicile de gros colis, meubles, encombrants comme des frigos et des machines à laver, pour le compte d’autres entreprises. Bref, des produits qui n’entrent pas facilement dans les réseaux comme bpost. Mais aujourd’hui, elle cible directement les grands comptes comme les retailers ou les commerçants. Urbantz a, par exemple, signé un contrat avec Carrefour en France qui utilise le SaaS de la start-up belge pour l’ensemble de la logistique ” dernier kilomètre ” sur le territoire hexagonal. ” Nous nous adressons à ces grands comptes, et cela nous intéresse tout particulièrement parce que nous gérons la logistique de livraison mais également toute la relation (sms, enquête de satisfaction, etc.) avec le consommateur final, détaille Jonathan Weber. De plus, nous offrons une vraie transparence à nos clients. Sans nous, un grand retailer n’a pas de vue sur les livraisons une fois qu’il a confié ses colis au transporteur. Pourtant, il est en première ligne lorsque le client final se plaint de ne pas avoir reçu son colis. Avec Urbantz, le transporteur, le client mais aussi le retailer ont tous une vue sur la livraison. ” Ce qui change fortement le paradigme puisque les grands distributeurs peuvent dès lors prendre un abonnement Urbantz et imposer cette solution aux entreprises de transport avec lesquelles ils travaillent.

Mais d’après le CEO d’Urbantz, cela ne crée pas forcément de tension avec celles-ci. ” Il peut y avoir une réticence au changement, admet Jonathan Weber, mais les transporteurs de taille moyenne savent que la manière dont ils travaillent n’est pas forcément la plus efficace. Et c’est normal : ils n’ont pas les moyens ni les compétences pour développer une technologie de ce genre. ”

La levée de fonds à 6 millions d’euros intervient après 2 millions précédemment levés auprès de grandes familles belges, de business angels et de deux fonds : Sambrinvest et Seeder Fund. Les fondateurs conservent ensemble la majorité de la boîte. Mais, comme la plupart des start-up en phase de forte croissance, ils lèvent des fonds pour permettre à leur start-up d’encore accélérer. A commencer par recruter plus de personnel. Urbantz compte passer des 40 employés actuels à quelque 60 ou 65 personnes d’ici la fin de l’année. Et 100 en fin d’année 2021. Urbantz recrute différents types de profils : des commerciaux, des développeurs et des spécialistes de la data…

Des deals dans une dizaine de pays

” Nous levons des fonds pour nous renforcer, détaille le CEO. Renforcer les équipes, les process, l’outil. Nous sommes en phase de scale-up et avons l’ambition de devenir un acteur qui compte, d’abord au niveau européen, puis global. C’est atteignable, vu le peu de concurrents auxquels nous faisons face et les conditions de marché : la livraison est en plein boom et l’écologie au sein des villes devient un gros enjeu. ”

Actuellement, le plus gros marché d’Urbantz se trouve en France et en Belgique. Mais la start-up a déjà noué des deals dans une dizaine de pays, en ce compris la Finlande, la Lituanie, l’Europe du Sud ou le Moyen-Orient.

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