Si le Bruxellois Stéphane Mandelbaum (1961-1986) s’est à ce point imprégné du travail et de l’esprit de Rimbaud, Pasolini et Francis Bacon, il est une évidence : son oeuvre graphique s’est identifiée à la marge, par la provocation et le défi plastique. Aux noms déjà cités, on doit ajouter une attirance pour la déviance sociale et la pègre, les gueules et mentalités de voyou, les déformations sociales comme celles des visages. C’est d’ailleurs parce qu’il s’est mis en tête d’être lui-même un gangster que, suite au vol d’un Modigliani avenue Louise et des bisbrouilles avec ses complices, le jeune Mandelbaum s’est fait ” exécuter ” fin 1986. On l’a retrouvé dans un terrain vague proche de Namur, le visage défiguré par l’acide. Tout cela n’aurait été qu’un autre sinistre fait divers si Mandelbaum n’avait pas trimballé un tel talent insolent : très jeune, ce gamin fortement dyslexique, fils d’un couple de peintres, a créé de façon compulsive des dessins au bic puis, plus tard, des gravures absolument remarquables où sa fascination pour la marginalité croise des sentiments plus troubles, ceux d’un jeune Juif qui aime la provocation, notamment celle qui consiste à interroger le nazisme et la Shoah. De quoi alimenter une ambiguïté sidérante. Rarement, les contradictions n’auront donné un tel choc visuel.

” Stéphane Mandelbaum “, jusqu’au 22 septembre au Musée juif de Belgique. www.mjb-jmb.org