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Il faudra bien parler indexation des salaires…
Ajouter un obstacle supplémentaire à tous ceux que les entreprises doivent déjà éviter aujourd’hui, honnêtement, nous ne pouvons pas nous le permettre.
Ce feu de paille qui allait s’éteindre rapidement s’est transformé en feu de forêt. Dans notre pays, les prix à la consommation sont aujourd’hui 8,3% plus élevés qu’en mars. C’est même 9,3% si l’on prend la méthode de calcul utilisée pour harmoniser les indices entre pays européens. Les causes du brasier sont multiples: la tonicité de la reprise après le confinement et les modifications causées par la transition énergétique. Mais évidemment, une grande partie de la hausse provient des ruptures des chaînes d’approvisionnement, mises sous pression par le covid et la guerre en Ukraine. La flambée des prix risque d’atteindre son paroxysme l’hiver prochain, quand il faudra se chauffer et que nos manques de gaz et de pétrole deviendront criants.
Les banques centrales paraissent dépourvues. Que peuvent-elles contre les chars? Pourtant, il est de leur devoir d’essayer de ne plus mettre de l’huile sur le feu. C’est pour cela qu’un jour ou l’autre, les taux vont remonter, car l’économie avant la guerre en Ukraine avait commencé à chauffer. Le covid avait déplacé une partie de la demande des services vers les biens de consommation dont les prix ont gonflé. Demande renforcée encore par les aides, parfois peu ciblées, octroyées aux ménages pendant la pandémie. Un peu d’eau froide ferait du bien.
Les entreprises réagissent. Vous verrez dans le dossier qui suit qu’elles utilisent tous les leviers qui sont en leur pouvoir pour trouver des solutions: trésorerie, gestion des stocks, relations avec les fournisseurs et les clients, technologie pour être moins gourmand en énergie et matières premières, flexibilité maximale des équipes pour produire beaucoup quand les prix des intrants retombent et freiner quand ils montent… Une agilité souvent remarquable.
Reste le rôle dévolu aux pouvoirs publics. Il n’est pas simple puisqu’eux non plus n’ont pas la main sur tout. Mais l’essentiel de ce qu’on leur demande est, outre de soutenir les acteurs les plus faibles, d’accompagner le changement. Aider au changement, cela veut dire éviter au maximum des mesures non ciblées (comme distribuer des chèques mazout à tout va) mais pousser tous les acteurs à changer de comportement et donc, par exemple, à favoriser dans le secteur de la construction la circularité, le recyclage des matériaux, ou à pousser ménages et entreprises à investir dans ces technologies qui doivent nous rendre plus résilients, moins voraces en matières premières et plus durables.
Aider au changement, cela signifie aussi évacuer le plus possible les obstacles locaux. Nous devons remettre à plat certains mécanismes. Et le premier est l’indexation automatique des salaires. Le débat doit absolument avoir lieu. Il ne s’agit pas de nier le besoin d’ajuster les salaires aux prix, surtout pour les revenus les plus modestes. Il s’agit plutôt de se rendre compte de l’environnement dans lequel la Belgique se trouve. Car avec l’indexation automatique, nos salaires évoluent plus vite que ceux de nos voisins qui ne s’adaptent à l’inflation qu’avec un ou deux ans de retard. Le handicap de compétitivité qui en résulte par rapport à nos voisins immédiats serait de 4% environ à la fin de cette année. En un ou deux ans, on peut perdre pas mal de parts de marché. Ajouter un obstacle supplémentaire à tous ceux que les entreprises doivent déjà éviter aujourd’hui, honnêtement, nous ne pouvons pas nous le permettre. Oui, il faudra mettre l’indexation automatique des salaires sur la table…
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