Masques purifiants, détecteurs de virus dans l’air ambiant, casques pour retrouver un sommeil réparateur… Les nouveaux objets connectés deviennent de vrais coachs santé. Avec quelle efficacité?
Le Halo, le nouveau bracelet connecté d’Amazon, ne possède aucun écran. Contrairement à de nombreux traqueurs d’activités qui se contentent de compter vos pas, ce bracelet en tissu collecte des centaines de données sur votre santé. Des données d’une intimité bouleversante. En plus d’intégrer des fonctionnalités classiques comme l’analyse de la fréquence cardiaque, les capteurs intégrés dans ce bracelet sont en effet capables de mesurer la répartition de vos graisses corporelles. Grâce à une série de photographies réalisées nu ou en sous-vêtements, l’application va concevoir un modèle 3D du corps de l’utilisateur indiquant son taux de masse grasse. ” La mesure de la graisse corporelle par Amazon Halo est aussi précise que les méthodes utilisées par un médecin et presque deux fois plus précise que les pèse-personnes intelligents à domicile “, promettait le Dr Maulik Majmudar, principal medical officer d’Amazon Halo, lors de la présentation de ce produit.
Objectif commun de ces nouveautés: améliorer votre bien-être, détecter les signes précoces de maladies ou offrir un environnement intérieur sain.
Baromètre de l’état émotionnel
Plus surprenant, le bracelet permet d’évaluer votre état émotionnel – voire votre santé mentale, comme le prétend Amazon – grâce à l’analyse continue du ton de votre voix. En effet, si vous les y autorisez, les deux microphones du Halo enregistrent des bribes de vos conversations afin d’interpréter les émotions transmises par votre empreinte vocale. A partir de ces informations, l’application peut proposer un bilan des humeurs dominantes sur une journée. Le bracelet peut informer à quel moment son utilisateur était ” énergique “, ” enthousiaste ” ou bien ” inquiet “.
Selon Amazon, cette fonction serait un moyen ” d’améliorer sa communication et ses relations “. Car en plus de vous fournir un rapport détaillé, le Halo prodigue une série de conseils. Un peu à la manière d’un coach bien-être. Avec le temps, il apprend à vous connaître. En corrélant votre voix avec d’autres mesures, il pourrait même anticiper certaines de vos réactions. Et pourrait par exemple, vous dire: ” attention, vous êtes en train de vous énerver et nous savons par expérience que dans cinq minutes vous perdrez le contrôle “.
Même si l’initiative est originale, peut-on réellement mesurer la santé mentale d’une personne grâce à l’intonation de sa voix? ” Mesurer les émotions est encore quelque chose de très nouveau. Mais la voix est très ancrée dans notre intimité. L’empreinte vocale permet de déduire des informations sur l’âge, le genre, les origines socioculturelles, ou encore l’état de santé “, explique Maulik Majmudar. Et de préciser: ” L’idée est d’analyser vos émotions et votre état physiologique. Ce que l’intelligence artificielle va faire, c’est comprendre votre état émotionnel en continu, le comparer à des millions de personnes et détecter des patterns, des corrélations, des choses qui vont vous permettre de mieux vous comprendre et éventuellement d’anticiper vos émotions”.

Bien-être et santé
Une nouvelle dystopie façon Black Mirror? Non, la simple réalité. Le fait est que cinq ans après les débuts des montres connectées, les fonctions se sont affinées, pour se recentrer non plus sur la forme physique, mais sur le bien-être et la santé. Certaines, vendues entre 200 et 400 euros, peuvent désormais réaliser des examens fiables, sans aucune contrainte pour le client. Après le capteur de battements cardiaques, le suivi du sommeil, l’aide à la relaxation ou encore le suivi du cycle menstruel, les tocantes se sont renforcées d’un électrocardiogramme capable d’alerter l’utilisateur en cas d’arythmie. Un dispositif reconnu par les autorités médicales aux Etats-Unis et en Europe, intégré à l’Apple Watch comme à ses rivales signées Samsung ou Huawei.
Depuis 2020, ces appareils proposent aussi une mesure de la saturation en oxygène du sang, un indicateur précieux contre le Covid-19. D’autres intègrent des capteurs de fièvre. Et bientôt, les montres connectées pourront mesurer votre tension artérielle, aussi bien qu’un brassard encombrant. L’objectif final est que la montre puisse détecter d’éventuelles maladies ou épidémies avant que l’utilisateur n’en ressente les symptômes. En entrant dans nos systèmes de santé, les fabricants espèrent surtout toucher le graal: un remboursement de leurs produits par les mutuelles, ouvrant la porte à un marché décuplé.
Détecteurs de virus
La pandémie de Covid-19 a mis en lumière les nombreux bénéfices des solutions d’e-santé, de l’exploitation des données au suivi à distance des patients. Preuve de cet engouement, l’édition 2021 du Consumer Electronics Show (CES) – le plus grand salon consacré à la technologie, virtualisé pour cause de pandémie – se concentre comme jamais sur les outils facilitant le suivi des patients à distance.
Nouveaux capteurs biomédicaux et appareils permettant aux patients d’éviter des salles d’attente parfois bondées, masques anti-Covid avec ventilateurs actifs, purificateurs domestiques avec détecteurs de virus dans l’air ambiant, robots désinfectants au travail, etc., suscitent un intérêt croissant. ” Des appareils un peu fous comme des purificateurs d’air personnels, qui auraient été regardés de haut l’an dernier, vont susciter beaucoup plus d’intérêt cette année “, estime Richard Windsor, un analyste spécialisé dans les cleantechs. Leur objectif commun: améliorer votre bien-être, détecter les signes précoces de maladies ou offrir un environnement intérieur sain, permettant aux individus d’évoluer librement, sans que les virus ou autres éléments nocifs ne s’y développent.
En entrant dans nos systèmes de santé, les fabricants espèrent surtout toucher le graal: un remboursement de leurs produits par les mutuelles.
Un capteur à placer sous le menton
Autre tendance: de plus en plus d’outils initialement destinés au champ purement médical se démocratisent, changent de taille et gagnent le foyer. Vous êtes facilement irritable, fatigué dès le réveil, somnolez durant la journée, avez des troubles de la libido? Vous souffrez peut-être d’apnée du sommeil. L’apnée du sommeil consiste en ” des pauses respiratoires fréquentes pendant le sommeil, généralement accompagnées d’un ronflement sonore “, comme le définit l’Organisation mondiale de la santé. Ces arrêts respiratoires répétés privent pendant quelques secondes le corps d’oxygène et provoquent plusieurs micro-réveils.
Selon les chercheurs, ” 49% des hommes et 23% des femmes de plus de 40 ans présentent des apnées du sommeil, mais beaucoup de ces patients ne sont ni diagnostiqués ni traités “. Or en plus d’un impact sur le quotidien, les conséquences de ce trouble de la respiration engendrent des risques importants tels qu’un AVC, de l’arythmie cardiaque, du diabète, de l’hypertension artérielle ou encore de l’obésité.
Pour diagnostiquer ces troubles du sommeil, la start-up belge Sunrise a lancé il y a à peine un an un petit capteur intelligent à apposer sur le menton. Le capteur, pesant trois grammes et fruit de plus de 10 années de recherche, permet d’analyser la qualité du sommeil en s’appuyant sur l’intelligence artificielle et l’analyse des micro-mouvements du menton, produits par la contraction des muscles respiratoires au cours de nos nuits. Il suffit au patient de commander le dispositif, certifié médical pour le diagnostic professionnel, de le coupler à une application mobile et de le coller sur son menton pour la nuit. Le lendemain matin, il reçoit une analyse de son sommeil et peut aussi partager un rapport complet avec son médecin.

” Aujourd’hui, l’analyse médicale du sommeil reste compliquée, car elle se fait essentiellement en laboratoire, explique Laurent Martinot, cofondateur de Sunrise. Notre but, c’est de rendre des outils professionnels médicaux accessibles au plus grand nombre. Mais attention: on est une génération après les sleep trackers présents sur la plupart des montres connectées. Avec notre test, on délivre une information clinique, ultraprécise qui peut être partagée avec votre médecin à votre discrétion. Ce rapport suffira pour vous traiter directement. Ce n’est donc pas du bien-être, mais un vrai dispositif médical.”
L’entreprise, basée à Namur, exporte son capteur au Royaume-Uni, en France et dans les pays limitrophes. En pleine validation auprès de la Federal Drug Administration aux Etats-Unis, elle vient de remporter un prix d’innovation lors de l’édition virtuelle du Consumer Electronics Show.
AirPop, le masque intelligent
Ce n’était qu’une question de temps. Une fois que les masques sont devenus un accessoire indispensable, ils ont commencé à se draper d’accents fashion, à intégrer des tissus high-tech et, désormais, à se connecter à des applications.
Le capteur intégré au masque AirPop Active+ Smart Mask surveille la qualité de l’air que vous respirez, indique les polluants qu’il a filtrés et le moment où il faut changer le filtre. En mode actif, il analyse également la qualité et le rythme de votre respiration. Ce masque innove avec une protection respiratoire de qualité médicale N95, utilisant des ventilateurs actifs amovibles et rechargeables, ainsi que des smart pods (capsules intelligentes) qui régulent le flux d’air pour une respiration optimitale. Selon le constructeur, ces smart pods à haute efficacité de filtration bactérienne (EFB) filtrent au moins 95% des particules en suspension dans l’air et ont une grande résistance aux fluides.
www.airpophealth.com, disponible fin janvier
Airthings, le traqueur de virus
Contrairement aux purificateurs d’air ou aux robots ménagers destinés à balayer les surfaces avec de la lumière UV, les capteurs d’Airthings se contentent de jouer un rôle passif. Ils surveillent la qualité de l’air intérieur pour détecter les facteurs de risque comme le radon et les moisissures. Le dernier modèle d’Airthings, le Wave Plus présenté au CES 2021, offre aux entreprises la possibilité d’analyser les pièces pour détecter les risques de propagation de virus. Les capteurs ne repèrent pas le virus lui-même. Ils surveillent plutôt d’autres facteurs comme la température, l’humidité et le nombre de personnes dans une pièce (sur la base des émissions de CO2 des personnes qui respirent) pour évaluer le risque de transmission du virus. Chaque pièce se voit ainsi attribuer une note en temps réel, indiquant la facilité avec laquelle le virus pourrait se déplacer. Si la note est mauvaise, l’appli suggère des solutions comme l’amélioration de la circulation d’air, l’augmentation de l’humidité ou l’expulsion de toute personne supplémentaire de la pièce. Cela ne garantit pas qu’une pièce soit totalement sûre, mais pourrait constituer une nouvelle mesure de précaution pour prévenir la propagation du Covid.
www.airthings.com
2,3 milliards
En dollars, le montant qu’a déboursé Philips pour s’offrir la medtech américaine BioTelemetry, spécialisée dans la surveillance cardiaque à distance.
10 milliards
Outre-Atlantique, le Nasdaq a accueilli 95 nouvelles sociétés medtechs en 2020. Ce record a permis aux entreprises concernées de lever plus de 10 milliards de dollars au total.