Les actions belges préférées des analystes

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S’il est recommandé de ventiler géographiquement ses placements, l’expérience montre qu’il n’est pas si facile, lorsqu’on est un investisseur ou un analyste belge, de se familiariser avec des entreprises, par exemple, chinoises. Voici donc une sélection des chouchous belges d’analystes belges.

Ce n’est pas parce qu’une entreprise est cotée en Bourse de Bruxelles qu’elle est belge. Depuis qu’il s’est offert SABMiller, par exemple, AB InBev est littéralement actif dans le monde entier. Le brasseur originaire du plat pays achève l’exercice sur des résultats mitigés, et sur une valorisation boursière en recul de quelques pour cent par rapport à l’an passé. Cet essoufflement d’un de ses titres-phares n’a pas empêché l’indice Bel 20 de progresser de plus de 10 % en 2017. Ni deux équipes d’analystes de mettre le plus grand brasseur du monde en exergue.

AB InBev

“Lors de l’annonce des résultats au mois de septembre, Carlos Brito, son CEO, indiquait qu’AB InBev achèverait l’exercice en beauté. Nous sommes de son avis, renchérissent les analystes de Candriam. A présent que la saison des ouragans outre-Atlantique est terminée, la situation, sur le principal marché de débouchés du groupe, ne peut que s’améliorer. Idem au Brésil, son deuxième marché. Ce pays a souffert en 2015 et 2016 d’une récession économique et d’une dévaluation de sa devise. L’agressivité de ses concurrents a en outre fait perdre des parts de marché à AB InBev. Mais l’économie brésilienne se redresse désormais, ce qui aura une influence sur le marché de la bière également.”

D’après KBC Securities, le moteur de la croissance bénéficiaire du géant planétaire redémarrera en 2018, grâce à l’intensification des synergies rendues possibles par le rachat de SABMiller et à d’autres économies de coûts encore. “Ses flux de trésorerie pérennes mettent l’entreprise en mesure de diminuer son endettement et de payer un solide dividende – nous parlons d’un rendement en dividende brut de 3,5 à 4 %.” Candriam approuve elle aussi la politique d’AB InBev : “Un an à peine après la reprise, plus de la moitié des 3,2 milliards de dollars d’économies de coûts escomptées est d’ores et déjà réalisée. Ce qui se traduira par une croissance de 5 % par an des revenus au cours des années qui viennent, et par un bond de plus de 15 % des bénéfices de l’entreprise.”

“La commercialisation des principales marques d’AB InBev dans les régions où seule SABMiller était active auparavant devrait en outre booster le chiffre d’affaires, ajoute KBC Securities. La volatilité des devises dans des pays émergents comme le Brésil et le Mexique demeure le principal risque qui pèse sur les revenus exprimés en dollars américains, puisque c’est la monnaie dans laquelle sont libellés les rapports du groupe. En Europe, celui-ci va devoir prouver sa capacité à faire face aux accises plus élevées et au ralentissement de la consommation de bière. Nous prévoyons par ailleurs un fléchissement de la part de marché aux Etats-Unis, mais estimons également que le titre avait exagérément reculé.”

Télécommunications

Les actions belges préférées des analystes
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Les entreprises télécoms belges sont appréciées par les analystes, mais chaque équipe a sa préférée. Pour KBC Securities, Orange Belgium est l’entreprise télécom pour laquelle doit opter l’investisseur défensif. “Orange Belgium est un peu à la traîne dans le paysage des télécommunications. Elle n’échappe pas à la pression qui érode les marges. Mais une stricte maîtrise des coûts et une clientèle fidèle, qui génère d’abondants flux de trésorerie, lui permettent de maintenir sa marge d’exploitation aux alentours de 15 %. Sans être un leader sur son marché, Orange Belgium est une machine à cash, au profil défensif attrayant et peu endettée. Elle devrait enregistrer une croissance de son revenu moyen par utilisateur, à quoi s’ajouteront des économies de coûts. Sa stratégie commence tout doucement à porter ses fruits. L’offre de câblodistribution a très vite attiré une centaine de milliers de clients, et ce n’est pas fini. Cerise sur le gâteau : Orange Belgium va pouvoir profiter de la baisse des taux à l’impôt des sociétés.”

L’équipe d’ING Belgique, par contre, est séduite par Telenet, qu’elle qualifie de lean and mean (traduisez “épurée”). L’importance de ses flux de trésorerie disponibles permettra à l’entreprise d’enregistrer un rendement en dividende brut d’environ 8 % en 2018, estiment les analystes. “Grâce à son offre complète de services de télécommunications, Telenet fidélise davantage le client.” Le profil de croissance et la marge d’exploitation, en hausse, de l’entreprise, s’ajoutent à la liste de ses atouts. Sans compter que l’investissement a un petit côté spéculatif. “Liberty Global, qui détient 56 % de Telenet, pourrait bien décider de faire offre pour le restant des titres. Si la régulation du marché du câble constitue le principal risque, elle réserve aussi des opportunités, dans un contexte de consolidation. Ajoutons à cela les risques liés à l’endettement de Telenet, et la concurrence acharnée qui règne au sein du secteur.”

BNP Paribas Fortis Private Banking préfère Proximus, pour sa valorisation et son rendement en dividende. “Commercialement, Proximus continue de bien mener sa barque. Il conquiert des parts de marché dans le segment de la télévision, et son offre combinée Tuttimus de même que sa marque à bas prix Scarlet sont une réussite. En outre, l’explosion de la consommation de données propulse vers le haut le montant moyen des factures. En signant le rachat de l’entreprise américaine active dans la fourniture de services d’authentification et d’identification mobile Telesign, Proximus s’offre un accès à des marchés internationaux en plein essor comme le commerce virtuel, les réseaux sociaux et les jeux informatiques. De nouvelles économies de coûts, elles-mêmes dues à la numérisation, et à l’allégement de la fiscalité des entreprises en Belgique, pourraient engendrer un accroissement des bénéfices nets également.”

Sur le plan commercial, Proximus reste performant à travers la conquête de parts de marché dans le segment de la télévision, le succès de l’offre combinée Tuttimus, la marque à bas prix Scarlet et la croissance méritoire signée par les services ICT, sans oublier la croissance spectaculaire de la consommation de données. Grâce au rachat de l’entreprise américaine Telesign, spécialisée dans la sécurisation des réseaux, Proximus se ménage un accès à des marchés internationaux en plein essor comme le commerce électronique, les réseaux sociaux et les jeux informatiques. La valorisation est attrayante et le rendement de dividende intéressant. Le potentiel restant en termes de réductions des coûts grâce à la numérisation

Technologie

Econocom profite, soulignent les analystes de BNP Paribas Fortis Private Banking, de la tendance à la numérisation. “L’entreprise propose une combinaison de matériel, de leasing et de services, ajoutent-ils. La fulgurante évolution de l’environnement IT dope la demande en entreprises spécialisées dans l’externalisation des prestations informatiques, et la valeur ajoutée de ces sociétés. La direction a annoncé ses nouveaux objectifs pour les cinq années à venir : elle entend multiplier par deux le bénéfice d’exploitation, et enregistrer une croissance annuelle du chiffre d’affaires de 7 % en moyenne. Si elles peuvent paraître extrêmement ambitieuses, ces projections ne sont pas irréalistes, puisque le chiffre d’affaires a été multiplié par quatre, et le bénéfice d’exploitation, par six, au cours des 10 dernières années.” Les analystes qualifient la valorisation de “très raisonnable” par rapport à celle d’autres entreprises informatiques.

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L’entreprise biotech Biocartis commercialise l’analyseur de biologie moléculaire Idylla, dont le système de cartouches permet de poser aisément et rapidement un diagnostic. “Idylla utilise des échantillons solides et liquides, comme du plasma sanguin et du tissu tumoral. Il réalise 12 tests, dont la plupart sont axés sur le cancer des intestins, des poumons et de la peau, explique KBC Securities. Six cent quarante dispositifs (+ 60 % en glissement annuel) devraient être installés d’ici à la fin de l’année, et le nombre de cartouches utilisées pour les faire fonctionner devrait tripler, à 75.000 unités. Idylla est en effet désormais utilisé aux Etats-Unis, l’offre de tests s’est étoffée, mais surtout, l’analyseur fait l’objet d’une utilisation toujours plus intensive. C’est là justement que réside la valeur de Biocartis : une fois le système adopté, les médecins qui travaillent dans les laboratoires et les hôpitaux l’utiliseront de plus en plus, car il est moins cher, plus rapide et plus précis que les solutions actuellement disponibles.” D’après des analystes de KBC Securities, l’entreprise devrait commencer à engranger des bénéfices d’ici la fin de l’année 2019.

L’équipe de Degroof Petercam, elle, apprécie tout particulièrement Barco. “Barco est numéro 1 sur les marchés du cinéma numérique, de la présentation sans fil ClickShare, de l’imagerie chirurgicale et de nombreuses autres applications de projection professionnelle encore. ClickShare, qui enregistre une appréciable croissance à deux chiffres, dispose toujours d’un potentiel élevé de salles de réunion à équiper. La commercialisation des projecteurs au phosphore laser permettra d’accélérer le cycle de remplacement sur le marché du cinéma numérique. Barco devrait améliorer structurellement sa rentabilité au cours des prochaines années, et faire passer sa marge d’exploitation de 6 % environ actuellement, à plus de 10 %.”

Matières premières

Nous pourrions tout aussi bien classer le groupe belge de production de métaux Umicore parmi les entreprises technologiques. “Umicore est le leader, et le principal acteur, de la production de nickel – manganèse – cobalt (NMC), métaux indispensables à la fabrication de la plupart des batteries lithium-ion rechargeables qui équipent les voitures électriques, expose Degroof Petercam. Nous sommes d’avis que le groupe, qui a réussi à multiplier par six ses capacités de production et à nouer des relations à long terme avec les producteurs de l’industrie automobile, se sera attribué d’ici 2020 40 à 50 % des parts de marché. L’excellente santé de son bilan lui permettra en outre d’oeuvrer à la conservation de sa position, sachant qu’il a une belle longueur d’avance sur des acteurs comme Johnson Matthey et BASF. Unique sur le marché, son activité recyclage, située à Hoboken, lui permet de surcroît d’assurer l’intégralité du cycle de recyclage des matériaux utilisés dans la fabrication de batteries.”

Après une nette correction du cours, le groupe métallurgique Bekaert compte, d’après BNP Paribas Fortis Private Banking, parmi les entreprises industrielles dont la valorisation est la relativement attrayante. Après un deuxième trimestre décevant, la croissance organique s’est à nouveau accélérée au troisième trimestre, principalement grâce au dynamisme de la demande en faveur de l’industrie automobile et du secteur de la construction asiatique et européen. Ce que confirment les analystes de BNP Paribas Fortis : “Bekaert devrait dès 2018 renouer avec la croissance et améliorer progressivement ses marges, notamment en répercutant sur la clientèle l’augmentation des prix des matières premières et en bénéficiant d’un mouvement de rattrapage des investissements dans le secteur de l’énergie. Sur le plan technologique, il devrait également être prêt, dans un peu plus de six mois, à jouer lui aussi un rôle au niveau de la nouvelle génération de fil à scier diamanté intervenant dans la fabrication de panneaux solaires”.

Immobilier

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Deux sociétés immobilières réglementées figurent également sur la liste des favoris. Aedifica investit dans des logements pour seniors en Belgique, aux Pays-Bas et en Allemagne. D’environ 3 %, son rendement en dividende brut est inférieur à ce qu’offrent certaines sociétés immobilières belges. Selon Candriam, cette parcimonie est compensée par une croissance supérieure à la moyenne : “Depuis l’introduction en Bourse, en 2006, le portefeuille immobilier a progressé de 27 % par an en moyenne, à plus de 1,6 milliard d’euros aujourd’hui. Aedifica ne s’arrêtera certainement pas en si bon chemin : elle peut compter, d’une part, sur la croissance structurelle du marché, elle-même due au vieillissement de la population européenne et à un déficit de logements ; et d’autre part, sur ses qualités intrinsèques – l’excellence de sa gestion et de ses références. Depuis l’augmentation de capital de 219 millions d’euros réalisée en mars, la société a d’ores et déjà consenti pour plus de 418 millions d’euros de nouveaux investissements”.

ING Belgique lui préfère Retail Estates, qui investit dans l’immobilier commercial situé en périphérie des villes, le long d’axes routiers importants. “Le titre a injustement souffert du fait que les locataires, exploitants des magasins, subissent la concurrence du commerce en ligne. Mais grâce à la nature de son modèle d’affaires, Retail Estates est moins soumis à cette influence qu’on le pense. Il veut porter à 2 milliards d’euros (contre 1,2 milliard d’euros actuellement) la valeur de son portefeuille. La moitié de cette croissance sera réalisée aux Pays-Bas. Nous avons la conviction que c’est ainsi qu’il convient de procéder. Le marché de détail néerlandais s’accélère, grâce à la croissance économique dont bénéficie le pays et au rétablissement de la confiance des consommateurs. Une vigoureuse remontée des taux d’intérêt, le commerce virtuel et l’évolution de la réglementation chez nos voisins du Nord, pourraient toutefois freiner cette évolution.”

Kinepolis

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Cette année aura été pour Kinepolis l’année de la traversée de l’Atlantique. “Kinepolis a annoncé en septembre la reprise de l’exploitant canadien Landmark Cinemas, pour un montant de 84 millions d’euros, rappelle Candriam. Les investisseurs ont bien accueilli la nouvelle. Jusque-là, Kinepolis était à 100 % européen. Le rachat de Landmark lui offre une exposition à une économie florissante et au pouvoir d’achat de la population canadienne, et lui permet de répartir géographiquement les risques. De surcroît, les Canadiens ont une vraie culture cinématographique : ils se font une toile trois à quatre fois par an, contre moins de deux fois pour les Européens.”

Kinepolis devrait en principe entamer dès l’an prochain l’intégration des 44 cinémas de Landmark. “Autre continent, autre culture. Le management va devoir consacrer beaucoup de temps à l’exercice. Malgré les nombreuses reprises effectuées l’an passé, Kinepolis a une fois de plus réussi à augmenter ses revenus et son bénéfice par client.”

Ontex

Ontex, c’est l’histoire d’une croissance liée au vieillissement de la population, affirment les analystes d’ING Belgique. Le titre du fabricant de solutions d’hygiène pour bébés, femmes et adultes est pourtant sous pression. Active en Europe et dans les pays émergents, l’entreprise encaisse actuellement de plein fouet l’augmentation des prix des matières premières, l’intensification de la concurrence au Brésil, les problèmes d’intégration de Hypermarcas, récemment repris, et le déficit de capacité en Europe. “Certaines de ces difficultés seront rapidement résolues, grâce notamment à l’extension constante des capacités du groupe. Moyennant une approche appropriée, d’autres pourront être rendues moins aigues.” D’après ING Belgique, Ontex fait actuellement l’objet d’une valorisation intéressante. Il n’est pas impossible que d’autres fusions et reprises soient encore opérées, dans ce marché résolument fragmenté.

KBC

On recense plusieurs acteurs financiers parmi les titres néerlandais préférés, mais un seul financier par contre est sélectionné – par Degroof Petercam – pour la Belgique. “Le bancassureur KBC peut se prévaloir de la marge d’intérêts la plus élevée du secteur au Benelux. Ce qui, combiné à un faible ratio coûts/revenus et à des commissions relativement importantes, lui assure actuellement un rendement sur capitaux propres supérieur à 15 %. La banque constitue des capitaux plus rapidement que n’importe quel autre établissement au Benelux, à tel point qu’elle pourrait même d’ores et déjà satisfaire aux exigences en matière de capitaux propres de Bâle IV, plus sévères que les exigences actuelles. C’est la raison pour laquelle nous supposons que dès 2018, KBC paiera une part plus importante de son bénéfice sous forme de dividendes ; cela rend évidemment le titre attrayant.”

Ilse De Witte

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