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Le fossé Nord-Sud s’approfondit sans cesse

Au cours de la période 2010-2012, la croissance économique dans les pays du Nord (l’Allemagne en tête) sera chaque année supérieure d’environ 1 % à celle enregistrée dans les pays du Sud.

Un fossé de plus en plus profond se creuse dans la zone euro. Au cours de la période 2010-2012, la croissance économique dans les pays du Nord (l’Allemagne en tête) sera chaque année supérieure d’environ 1 % à celle enregistrée dans les pays du Sud. Ces pays “Club Med” subissent également un taux de chômage qui augmente chaque mois (l’Espagne vient en tête avec 20 % de sa population active) alors que le Nord connaît un taux de chômage peu élevé. En Allemagne, ce taux est aujourd’hui substantiellement plus bas qu’avant le début de la crise (6,8 % contre 8,4 %).

Alors que le Nord s’attaque à ses problèmes budgétaires avec un léger vent dans le dos, les mesures prises dans le Sud ne sont qu’un emplâtre sur une jambe de bois. Ces pays sont pris dans un cercle vicieux de déficits élevés, de mesures d’économie et de hausses des impôts, de croissance négative, de dettes croissantes. Après la constitution du fonds de stabilisation européen de 1.000 milliards de dollars, les investisseurs n’ont toujours pas confiance et font grimper le taux d’intérêt des pays PIGS – Portugal, Italie, Grèce, Espagne – à des hauteurs records, ce qui est mauvais pour leurs budgets…

La “petite fête de 1 milliard de dollars” du mois de mai a suscité cinq mois d’euphorie. Mais aujourd’hui, le différentiel de taux de la Grèce est à nouveau plus élevé qu’avant l’eurocrise. Permettre à ce pays de contracter de nouvelles dettes alors qu’il ne peut pas payer les anciennes n’est pas une solution mais un renforcement du problème. D’autre part, il souffre d’un manque de compétitivité, notamment parce que l’euro est beaucoup trop cher pour ce pays pauvre. La solution préconisée par l’Europe peut donc se comparer au fait de donner une camisole de force à un patient atteint d’un ulcère à l’estomac. Pour les Grecs, s’accrocher à l’euro n’est pas une option durable mais un supplice : la monnaie chère étrangle le tourisme et les exportations.

Dévaluation contrôlée

En voyant la Grèce se cramponner à l’euro, on ne peut s’empêcher de songer à l’Argentine d’il y a 15 ans. Le pays restait farouchement accroché au dollar qui à l’époque avait entamé une forte hausse. Alors que le pays voisin, le Brésil, a compris le caractère intenable de cette situation et s’est détaché du dollar, l’Argentine a continué à suivre le billet vert jusqu’à ce qu’elle s’effondre, victime d’un infarctus économico-financier en janvier 2002. Le pays s’est trouvé en faillite. Huit ans plus tard, la situation est encore toujours désespérée. Les choses se sont passées tout autrement pour le Brésil. Il a d’abord connu une dépréciation contrôlée par rapport au dollar et ensuite, une série de dévaluations plus rapides. L’emprise étouffante du dollar a disparu plus vite et le pays a ainsi également reçu de l’oxygène pour mettre en route d’autres réformes.

Avec une dépréciation contrôlée par la BCE de 7 % par an, pendant cinq ou six ans, la Grèce pourrait devenir plus compétitive. Cette solution ne procurerait pas non plus de bénéfice aux spéculateurs. Si on y ajoute un moratoire sur les intérêts de quelques années, le pays pourrait aussi remettre de l’ordre dans ses affaires sur le plan budgétaire. Une telle “parité à crémaillère” (crawling peg) d’un “euro du Sud” n’est pas prise au sérieux et est qualifiée d’impossible. Mais le fait de s’accrocher à l’euro signifie aussi que le Nord devra payer pour des transferts vers le Sud pendant une génération ou plus. Et cela, est-ce défendable ? Cet entêtement sans espoir durera-t-il encore six ans comme dans le cas de l’Argentine ou interviendra-t-on plus rapidement et envisagera-t-on un autre scénario ?

Réactions : trends@econopolis.be

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