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Inflation : fantasme… ou pas ?

L’inflation guette les pays émergents, avertissaient les économistes l’an dernier. A juste titre, puisque la hausse des prix de détail a, en novembre, franchit la barre des 5 % en Chine, pays qui avait pourtant pris d’énergiques mesures pour la contrer.

L’inflation guette les pays émergents, avertissaient les économistes l’an dernier. A juste titre, puisque la hausse des prix de détail a, en novembre, franchit la barre des 5 % en Chine, pays qui avait pourtant pris d’énergiques mesures pour la contrer. En dépit de la poursuite de cette politique, l’inflation chinoise ne s’est guère assagie depuis : elle atteignait 4,9 % en janvier et on attend 4,5 % sur l’année. Ce n’est toutefois pas un record, loin de là, puisque cette inflation pointait à 8,7 % en février 2008. Dès lors, pourquoi le rebond récent semble-t-il surprendre désagréablement ?

Premier constat : la crise financière et économique mondiale a bel et bien terrassé l’inflation (la Chine avait viré en déflation de – 1,8 % en juillet 2009) mais de manière finalement très éphémère. On s’est félicité que la croissance économique se soit ranimée aussi rapidement, mais on aurait sans doute voulu avoir le beurre et l’argent du beurre… Deuxième constat : à 10,3 % l’an dernier, la croissance chinoise n’a pas retrouvé les 13 % qui prévalaient en 2007, mais elle a dupliqué sa moyenne des années 1990, à savoir 10,4 %. Et durant cette décennie, l’inflation s’est inscrite à 4,25 %. Ne s’étonne-t-on pas bien à tort du niveau de l’inflation chinoise ?

Ce ne serait pas à tort, par contre, qu’on s’en inquiéterait. L’an dernier, on affirmait que l’inflation des pays émergents finirait par contaminer l’Occident. Aujourd’hui, on annonce cette contagion imminente. Pas étonnant : l’envol des prix pétroliers s’ajoute à une croissance économique mondiale plus vigoureuse qu’on l’imaginait. Au début 2010, le FMI entrevoyait ainsi 4 % ; on est finalement arrivé à 5 %. Et pour cette année, le même FMI vient de relever sa prévision de 4,2 à 4,4 %.

Cette inflation annoncée ne crève pas encore les yeux. En janvier, l’indice des prix de détail a même reculé de 0,7 % dans la zone euro, ramenant la hausse annuelle à 2,3 %. La croissance économique reste donc non inflationniste. Si l’on attend le phénomène inverse en février, ainsi que déjà annoncé dans certains pays, ce serait à cause des matières premières, pétrole en tête. Son prix pourrait toutefois reculer en cas d’apaisement politique dans la principale région de production. Fantasmerait-on sur le front inflationniste ?

Autre approche : l’indice des prix de détail s’est envolé en Belgique. La hausse atteint 3,39 % en février, venant de 0,7 % à peine un an plus tôt ! Dérapage inquiétant ? Ce n’est pas encore un drame : on a relevé une pointe à 5,91 % en juillet 2008. Rien à voir, évidemment, avec les niveaux induits par les deux premiers chocs pétroliers, soit plus de 12,5 % en 1974 et 1975, et encore 8,72 % en 1982. Par ailleurs, durant les fameuses Golden Sixties, l’inflation n’était pas au plancher. Elle fut très exactement de 2,89 % entre 1961 et 1970. Fantasmerait-on sur le front inflationniste (bis) ?

Il est quand même un autre élément qu’on ne peut passer sous silence : l’indice des prix à l’importation, très volatil mais aussi précurseur. En janvier, il a progressé de 11,8 % en Allemagne, en taux annuel. C’est énorme. Bien sûr, on est loin des 35 % relevés en mars 1974. Mais on se situe très au-delà des 8 % environ qui prévalaient en été 2008, quand les matières premières s’envolaient. Cet indice a repris de la hauteur dès l’été 2010, poussant une pointe à + 12 % en décembre. C’est bien simple : cette progression est la plus forte depuis octobre 1981. Se pourrait-il qu’on ne fantasme pas tout à fait à propos de l’inflation ?

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