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Taxation des comptes-titres: “ce ne sont pas les riches qui vont payer le plus, mais la classe moyenne”

Le Syndicat National des Propriétaires et des Copropriétaires n’est pas en faveur la taxation des comptes-titres. “Cette mesure est le prélude à un impôt sur la fortune sur l’épargne mobilière et immobilière en Belgique avec une base taxable que l’on voudra sans cesse élargir, un seuil d’entrée rabaissé et un taux en augmentation”, écrit son Président dans une carte blanche.

D’aucuns pourraient s’étonner de voir le SNPC, dont l’action se développe principalement au profit des propriétaires immobiliers, intervenir contre une telle taxe.

De rappeler que l’article 3 de ses statuts du SNPC précise :

“L’association a pour but la défense du droit de propriété privée immobilière ou mobilière, la promotion et la défense de l’épargne, l’esprit d’initiative et la liberté individuelle”.

Il reste donc pleinement dans son objet social sans compter qu’à défaut en Belgique d’une association de défenseurs des épargnants, il faut bien que quelqu’un se mouille.

Les investisseurs et les épargnants ne peuvent qu’être surpris par la dernière mesure envisagée par la majorité fédérale de taxer les comptes titres à partir de 500.000 E avec un taux de 0,15 % (applicable dès le premier euro si le compte titre dépasse 500.000 E).

Initiative d’un gouvernement qui se dit pourtant de centre droit et qui adopte une mesure à contre-courant par rapport à ce qui se fait dans d’autres pays et notamment la France qui va supprimer l’impôt sur la fortune (ISF) sur les valeurs mobilières pour soutenir l’investissement.

Le président Macron est en outre bien placé en regard de ses anciennes activités professionnelles pour connaître les dégâts de l’ISF sur la vie économique française avec la multiplication des exilés fiscaux.

Et que l’on ne se trompe pas le débat actuel porte sur une question de principe car il est clair que cette mesure est le prélude à un impôt sur la fortune sur l’épargne mobilière et immobilière en Belgique avec une base taxable que l’on voudra sans cesse élargir, un seuil d’entrée rabaissé et un taux en augmentation.

En Belgique, par cette nouvelle taxe, on va sanctionner le capital à risque et la soi-disant mesure envisagée pour l’encourager est un leurre complet (faiblesse du montant retenu et mécanisme complexe).

Or nos entreprises pour assurer leur développement ont besoin de capitaux importants et ne mentionnons que l’exemple récent de Solvay qui a augmenté son capital de 1.500 millions euros dans le cadre du rachat de Cytec.

Comment demain expliquer à celles et ceux qui vont participer à des augmentations de capital de sociétés que ces valeurs, outre d’avoir déjà vu le précompte mobilier passé en fonction des valeurs de 15 à 30 %, vont être soumises à une taxe de 0,15 %.

Il ne faut aussi pas perdre de vue que les dividendes de sociétés, pour les actionnaires sont ce qui reste après que les sociétés aient payé l’ISOC. En soi le précompte mobilier constitue déjà pour eux une double imposition et d’aucuns se souviendront qu’avant que le précompte mobilier ne devienne libératoire dans leur déclaration à l’IPP, les actionnaires de sociétés pouvaient imputer un crédit d’impôt.

Veut-on aussi faire disparaître l’ancrage belge d’un certain nombre de nos entreprises et voir leur actionnariat devenir mondial et les centres de décisions ailleurs qu’en Belgique.

Les Français dans le cadre de l’ISF l’avaient compris en retenant des exonérations dans le cadre de pactes d’actionnaires et ce pour préserver l’actionnariat familial, l’ancrage français, etc…. Il s’agissait du “pacte Dutreil ISF” : sous certaines conditions, les parts ou actions d’une société faisant l’objet d’un engagement collectif de conservation sont exonérées d’ISF à hauteur de 75 % de la valeur vénale réelle des parts ou actions visées par l’engagement de conservation.

Mais il n’y a pas que le capital à risque qui est dans le collimateur.

A titre exemplatif, un bon de caisse à 5 ans (Belfius) rapporte 0,30%. Après déduction du précompte, il reste un rendement de 0,21%. Pour les détenteurs d’un compte titres avec un solde supérieur à 500.000€, il faudra encore déduire 0,15%. Bref le rendement final sera de 0,06%. Dans ce cas, la ponction fiscale sera de 80% ; difficile de faire pire !

Soutenir par ailleurs que le patrimoine ne serait pas taxé en Belgique et qu’il faut rééquilibrer la taxation des revenus avec la taxation du patrimoine n’est pas acceptable.

Le patrimoine même si pour certains, il se transmet de génération en génération, il est le fruit d’un travail qui a été taxé et bien. Est-il devenu si péjoratif de se constituer une épargne pour ses vieux jours et arrondir sa pension, de vouloir transmettre quelque chose à ses enfants.

La taxation du patrimoine existe bel et bien en Belgique et ce n’est pas peu.

Le patrimoine immobilier est déjà lourdement taxé via le précompte immobilier (revenu cadastral indexé chaque année et les taux communaux et provinciaux n’ont cessé d’augmenter), l’impôt des personnes physiques (revenu cadastral indexé x 1,40 que le bien soit loué ou non et taxation sur les loyers réels pour les locations commerciales et professionnelles – cumul aux autres revenus), les droits de donation et de succession, les droits d’enregistrement etc…

Pour le patrimoine mobilier, nous nous sommes déjà étendus ci-avant mais de rappeler que si il peut bénéficier de droits de donation réduits par contre les droits de succession jouent en plein.

Il ne sera pas perdu de vue aussi que le placement en actions, donc le soutien aux entreprises et à l’activité économique présente un risque qui mérite une prime. Les actionnaires de Fortis ou de Dexia sont bien placés pour le savoir.

Enfin, trop d’impôt tue l’impôt et les différentes augmentations du précompte mobilier ont eu pour effet de réduire les recettes de l’Etat sans compter que la taxe sur les plus-values a fait chuter de manière assez impressionnante la taxe sur les opérations de bourse.

Et que dire de l’attrait de destinations pas si lointaines (La Libre Belgique y a d’ailleurs consacré une série estivale) tant sur l’aspect fiscal que sur l’aspect coût de la vie qui pourraient à nouveau séduire un certain nombre de nos compatriotes.

C’est fort bien d’avoir voulu faire revenir des capitaux dans le cadre des DLU successives mais si c’est pour maintenant se rattraper, les épargnants ne seront pas longtemps dupes et le seuil de tolérance déjà atteint.

Et cerise sur le gâteau, ce ne sont pas les super riches qui vont payer le plus car ils ont les moyens de mettre en place des mécanismes d’évitement de la taxe mais la classe moyenne et la classe moyenne supérieure.

En France en 2016, sur les 351.000 assujettis à l’ISF pour des recettes totales de 5.178 milliards d’euros, les 1000 premiers contribuables concernés ne sont intervenus que pour 400 millions d’euros !!!

Par Olivier HAMAL, Président du Syndicat National des Propriétaires et des Copropriétaires (SNPC)

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