Liège, une métropole qui se rénove et se développe

Le site de coronmeuse rassemblera à terme 1.300 logements et diverses infrastructures, dont un porte de plaisance. © ALEXIS HAULOT

Depuis quelques années, le développement de Liège se concentre sur ses pôles métropolitains et notamment le nord-est de la ville, avec la requalification de Droixhe et la création d’un écoquartier à Coronmeuse. Les efforts se poursuivent aussi dans le centre et tout au long du tracé du futur tram, un véritable axe structurant pour la Cité ardente.

A Liège, il est aujourd’hui difficile de se déplacer en ville sans apercevoir de chantiers ou être dévié à cause de ceux-ci. De nombreux travaux sont en cours notamment pour donner vie à la très attendue ligne de tram dont la mise en service complète est prévue pour 2024. Son tracé traversera la ville depuis Sclessin au sud-ouest jusqu’à Bressoux et Coronmeuse au nord-est. C’est justement dans cette dernière zone que nous avons rendez-vous avec une conseillère de la cellule Stratégie de la Ville pour découvrir un futur pôle important de Liège. Coronmeuse, c’est un site de 25 hectares implanté le long de la Meuse et qui était autrefois fréquenté pour ses infrastructures de loisirs et ses halles d’exposition.

Aujourd’hui, une bonne partie a été démolie et il ne reste plus qu’un chantier, ainsi qu’une poignée d’édifices qui seront conservés comme le Grand Palais et le bâtiment de l’Equerre où nous retrouvons notre interlocutrice après sa réunion hebdomadaire avec les maîtres d’ouvrage du projet. Comme elle nous le montre sur un plan affiché au mur, la transformation du site de Coronmeuse aboutira d’ici 30 ans à un véritable écoquartier avec environ 1.300 logements et de nombreux équipements tels qu’un parc, des infrastructures sportives, une maison de quartier, une maison de repos, une crèche, le siège liégeois d’Ethias ou encore un marché bio couvert. “Pas moins de 80% du site sera public et les voitures seront reléguées dans des parkings au sous-sol, laissant l’espace en surface aux transports en commun et modes de déplacement doux“, précise-t-elle.

Liège lie étroitement son développement territorial à la mobilité et des tracés comme celui du tram apparaissent petit à petit comme des axes stratégiques.

10% de logements inférieurs au prix du marché

En parcourant les allées de ce qui n’est encore qu’un vaste chantier, la conseillère nous explique que le projet en construction autour de nous est l’héritier de la candidature de Liège à l’Expo 2017: “Dès le départ, il était prévu que si l’exposition internationale avait lieu à Coronmeuse, les bâtiments utilisés pour celle-ci seraient ensuite reconvertis en logements. Malgré le verdict négatif, nous avons poursuivi la procédure de dialogue compétitif qui avait été entamée pour l’aménagement du site et cela a débouché sur l’attribution du marché au consortium Neolegia”.

Depuis lors, le développement du projet appelé Rives Ardentes s’effectue en partenariat public-privé, avec un dialogue permanent entre le consortium et les autorités locales. Ces dernières ont néanmoins imposé une série d’exigences aux maîtres d’ouvrage, dont un minimum de 60% de logements parmi les constructions, des critères de durabilité ou encore des proportions de 10% de logements quatre chambres et de logements réservés aux ménages à revenu moyen, c’est-à-dire vendus à des prix 10 à 19% inférieurs au marché selon le type d’habitat (maison ou appartement). “Il y aura aussi une série de maisons mitoyennes là, le long de la darse où seront implantés un port de plaisance et une passerelle“, précise la conseillère de la cellule Stratégie en pointant le bras d’eau qui sépare le site du quai de Coronmeuse. “Il y aura également quelques maisons-ateliers qui ont déjà toutes été vendues. On a par ailleurs tenu à avoir des logements de trois et quatre chambres car comme beaucoup de villes, Liège souffre de l’exode urbain, notamment de la part des familles avec enfants qui ne trouvent pas d’habitations adéquates.”

Liège, une métropole qui se rénove et se développe

Le nouveau quartier devrait ainsi proposer une assez large variété de logements, à des prix qui se veulent abordables: les tarifs pleins de la centaine d’unités actuellement en vente ont été fixés à 2.558 euros/m2 pour les appartements et 2.121 euros/m2 pour les maisons. “Une étude de marché a été réalisée et ces prix se situent dans la tranche basse du marché liégeois”, souligne la conseillère.

Dédensification à Droixhe

En ce qui concerne l’aspect durable mis en avant par l’appellation d’écoquartier, il se manifeste entre autres par des logements presque passifs, des potagers urbains, une gestion intelligente de l’eau et des conteneurs enterrés pour les déchets, ou encore un réseau de chauffage urbain dont l’énergie proviendra de l’incinérateur de déchets Intradel-Uvélia à Herstal. Rives Ardentes deviendra ainsi le premier site résidentiel relié à ce système de chauffage économique et écologique. “Que ce soit par sa mobilité, ses nombreux espaces communautaires ou encore sa mixité de fonctions et de générations, ce quartier favorisera véritablement de nouveaux modes de vie, estime la conseillère. Coronmeuse est aussi un point important du redéveloppement plus global de toute l’entrée nord-est de Liège.”

A quelques pas de là, de l’autre côté de la Meuse, la fonctionnaire nous montre en effet un autre projet d’ampleur: celui de la requalification de la zone Bressoux-Droixhe. C’est là qu’on peut déjà apercevoir le tout récent centre de maintenance du tram et, à proximité, une plaine (anciennement occupée par des ferrailleurs) qui accueillera les nouvelles halles de Liège Expo. Notre destination se trouve cependant un peu plus loin, au coeur de Droixhe où l’avenue de la Croix Rouge illustre assez bien la situation actuelle: de part et d’autre, quelques nouveaux bâtiments dont une maison de repos, des logements publics et une école. Mais au milieu de tout ça, des terrains encore vides. On y trouvait autrefois plusieurs tours de la Cité de Droixhe développée durant les années 1960 et 1970. A l’époque de sa construction, celle-ci était considérée comme un modèle de référence de l’architecture moderne belge. Mais elle s’est progressivement transformée en une sorte de ghetto. “Le logement n’y était plus du tout qualitatif, il a donc été décidé de requalifier le quartier avec davantage de mixité”, précise la conseillère de la cellule Stratégie de la Ville. La zone rassemble désormais une série de projets publics qui ont été réalisés en première phase, et des projets privés ou publics/privés en cours ou à venir qui concernent notamment du logement et des activités économiques. Fait plutôt inhabituel: la requalification de Droixhe s’accompagnera d’une dédensification du quartier. “Là où il y avait 1.600 logements autrefois, on n’en comptera plus que 1.000, explique notre interlocutrice. Cela inclut environ 600 habitations neuves et pas moins de 400 rénovations.

A droixhe, d'anciens bâtiments ont été détruits pour dédensifier le quartier et laisser place à de nouveaux immeubles plus qualitatifs.
A droixhe, d’anciens bâtiments ont été détruits pour dédensifier le quartier et laisser place à de nouveaux immeubles plus qualitatifs.© ALEXIS HAULOT

Les investissements publics suivis par ceux privés

Ce processus de transformation du quartier est évidemment long, mais les rénovations et constructions changent petit à petit l’image de Droixhe. Le même constat peut être effectué au quartier Grand Léopold, dernière étape de notre visite. Ce qui était autrefois une sorte de zone de non-droit très marquée par la prostitution revit petit à petit à l’aide d’opérations de soutien au commerce, et de nombreux chantiers encore en cours. Notre interlocutrice a tenu à nous y emmener car “le quartier fait partie du centre, qui reste le principal pôle métropolitain de Liège même si d’autres, comme Coronmeuse et Droixhe, se développent tout autour”. Après une grave explosion qui a fait des victimes et détruit plusieurs bâtiments en 2010, un programme de rénovation urbaine a été adopté quelques années plus tard afin de rendre la zone à nouveau attrayante. La Ville a elle-même investi dans le quartier avec la Maison de l’Habitat qui mêle services et logements, ou d’autres projets de rénovation de bâtiments. Ces investissements publics en ont attiré d’autres, émanant du privé: un immeuble à appartements a par exemple été construit sur la dent creuse à l’angle de la rue Nagelmackers, tandis que dans les rues de la Cathédrale et de la Madeleine, alternent sur quelques dizaines de mètres des chantiers portés par le public, le privé ou encore Noshaq. L’invest liégeois est en effet très présent dans le quartier, où il a transformé la Grand Poste en pôle polyvalent (coworking, food market, brasserie, etc.) et développe en ce moment des bureaux, du logement et des commerces au sein de l’îlot Madeleine longtemps laissé à l’abandon.

Comme le souligne la conseillère de la cellule Stratégie, l’intérêt des investisseurs privés se manifeste aussi dans les autres zones en redéploiement: “Un parc pour PME va, par exemple, venir se greffer à Bressoux-Droixhe (le Volta Business Parc, Ndlr), tandis qu’aux Guillemins, on voit qu’en plus de l’arrivée de Paradis Express (bureaux, logements, coliving, etc.), d’autres projets apparaissent autour. Et même les particuliers se mettent à rénover leurs bâtiments!”

“Reconstruire la ville sur la ville”

L’arrivée du tram n’est sans doute pas étrangère aux multiples investissements privés dans les quartiers en reconversion qui jalonnent son parcours. Ces dernières années, Liège lie en effet étroitement son développement territorial à la mobilité et des tracés comme celui du tram apparaissent petit à petit comme des axes stratégiques. Il en va de même pour les futures lignes de bus à haut niveau de service (BHNS) qui couvriront d’autres secteurs et permettront d’atteindre des zones plus éloignées telles que le LégiaPark ou d’anciens sites miniers comme Espérance et Bonne Fortune ou Fontainebleau-Bas Rhieu. A plus long terme, ceux-ci devraient eux aussi être reconvertis et accueillir plusieurs fonctions, dont du logement. Les pouvoirs publics liégeois désirent en effet continuer à développer des polarités métropolitaines, c’est-à-dire des centres d’attractivité pouvant accueillir diverses fonctions ou spécialités (logements, services, mobilité, etc.) comme c’est le cas à Coronmeuse ou Droixhe. Ces différents pôles ont généralement comme point commun de concerner soit des rénovations urbaines, soit des reconversions de friches. Comme nous l’explique le bourgmestre Willy Demeyer au téléphone après notre visite, c’est dans cette direction que la ville veut se redéployer: “Ces derniers temps, une dizaine de projets pourtant anciens et situés sur des terrains à bâtir ont provoqué des levées de bouclier de la part des riverains et des mouvements environnementaux, ce qui nous a amenés à reconsidérer les choses. Un schéma de développement communal est notamment en cours d’élaboration et il va aboutir à une tendance lourde qui est de privilégier certains quartiers, mais aussi et surtout la reconstruction de la ville sur la ville”.

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