Lire la chronique d' Amid Faljaoui
L’immobilier surévalué de 20% en Belgique?
Benjamin Franklin est l’un des pères fondateurs des Etats-Unis, il a même droit à avoir son visage imprimé sur les billets de 100 dollars.
Si j’en parle, c’est parce qu’il est aussi l’auteur d’une célèbre phrase : à savoir, qu’en ce bas monde, “la seule chose de certaine, c’est la mort et les impôts”. Pour notre pays, je pense qu’il a oublié d’ajouter l’amour de l’immobilier, l’amour de la brique. En Belgique, nous sommes 72% à être propriétaire de notre logement. C’est au-dessus de la moyenne européenne.
En ces temps troublés, certaines études notamment celle publiée récemment par notre Banque Nationale de Belgique viennent troubler nos certitudes. La dernière étude de la BNB chiffrerait la surévaluation de l’immobilier en Belgique de… 20%, ce qui n’est pas rien. D’autant que si la Banque Nationale de Belgique parle de surévaluation, c’est parce que ses économistes sont bien élevés, bien éduqués et n’osent pas utiliser le terme plus adéquat de bulle. Bien entendu, cette bulle de 20% est le résultat d’un calcul qui mélange à la fois le revenu disponible des Belges, la démographie et la fiscalité. Bref, c’est une moyenne de différentes moyennes. D’autres banques privées en Belgique faisaient le même exercice pendant plusieurs années et à chaque fois les auteurs de ces études arrivaient à la conclusion que la brique en Belgique était surévaluée. Le seul souci, c’est que depuis que je suis homme de média, j’entends la même rengaine et à chaque fois, ces prévisions sont à côté de la plaque. Autrement dit, l’immobilier a continué d’augmenter en dépit des calculs des économistes. A croire que le réel refuse de se faire embrigader dans des équations mathématiques.
Justement, mes confrères du quotidien l’Echo ont donné la parole à des experts pour nous expliquer cette différence entre les modèles mathématiques des banques et notre réalité de simples mortels. Et ce fossé peut s’expliquer de différentes manières : d’abord, ce que ne prennent pas en compte ces calculs savants, c’est la ruée qu’a provoquée la pandémie pour des logements plus spacieux et avec terrasse ou jardin. C’est encore la frénésie du moment et c’est évidemment de nature à soutenir les prix de l’immobilier. Les modèles des banques ne peuvent pas capter la psychologie des citoyens. Ensuite ce que ne captent pas non plus ces modèles théoriques, c’est l’amour filial. En effet, si le logement est plus cher, les enfants ne se retrouvent pas pour autant exclus du marché de l’immobilier, car ils bénéficient d’un coup de pouce de leurs parents ou de leurs grands-parents. Les prix supposés être trop élevés selon la Banque Nationale de Belgique sont donc aussi le résultat de cet amour filial.
Et pour rester dans la sphère psychologique, il y a aussi ce que les boursiers américains appellent le FOMO (Fear Of Missing Out), autrement dit, la peur de rater ou de manquer quelque chose. Exactement comme certains ont peur de rater une hausse boursière, certains se disent qu’il vaut mieux entrer aujourd’hui dans le marché immobilier, car demain ce sera plus cher encore. Mais vous connaissez les économistes, ils n’abandonnent pas facilement leurs idées. Comme pour l’instant ils se trompent, ils nous prédisent que demain la baisse aura enfin lieu, car la hausse des taux d’intérêt est là, parce que les coûts de rénovation énergétiques vont pousser les prix des passoires thermiques vers le bas et qu’en plus la fiscalité va freiner nos ardeurs.
C’est vrai qu’à force d’annoncer le pire, il finira bien par arriver. Exactement comme ces montres arrêtées donnent l’heure exacte deux fois par jour.
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