Y a-t-il un réseau dans l’avion ?

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Jusqu’à présent, il était délicat d’utiliser Internet dans un avion, les compagnies évoquant le risque d’interférences avec les instruments de bord. Mais face à l’omniprésence grandissante du Net, et l’importance de ce dernier dans le monde des affaires, des pistes s’ouvrent aujourd’hui pour le faire atterrir dans les avions en vol.

Lundi matin. Aéroport de Bruxelles. Vous êtes sur le point d’embarquer pour un vol à destination de New York d’une durée de presque 9 heures, durant lesquelles vous serez coupé du monde, de vos collègues, de vos partenaires ou de vos clients. Nous le savons tous, il peut s’en passer des choses en 9 heures et pour certains il est parfois difficile de ne pas pouvoir interagir avec le reste de la planète. Mais jusqu’ici les compagnies aériennes étaient formelles : impossible d’utiliser le Net en vol, trop compliqué, trop coûteux, trop dangereux ! Pourtant la demande est forte, pour ne pas dire constante, au point que de nombreuses compagnies proposent une connectivité sur certains vols, et ce depuis plusieurs années. Nonobstant, l’année 2013 pourrait être celle du grand bouleversement avant une diffusion massive en 2014.

Un réseau dans les airs ?

Avant d’aller plus loin, faisons une courte escale pour tenter d’expliquer la technologie mise en oeuvre pour amener Internet dans un avion. A ce jour, deux méthodes sont disponibles, chacune pouvant se suffire à elle-même, ou pouvant être combinée avec l’autre. La première consiste à utiliser les antennes relais pour mobiles, que l’on trouve à intervalles réguliers sur la terre ferme. Chaque avion qui passe dans la zone de couverture peut bénéficier du réseau, un équipement particulier intégré à l’avion se chargeant de jouer les entremetteurs. Pour parfaire cette couverture, certaines compagnies ont largement investi dans le déploiement d’antennes terrestres orientées vers le ciel, et donc spécifiquement dédiées aux avions. Quoi qu’il en soit, la limite du système est qu’il ne couvre que les liaisons continentales. Parfait pour un vol New York-Los Angeles, il est inutile sur un Paris-Boston.

C’est là qu’intervient la seconde option : les satellites. Celle-ci n’a que faire de la position géographique de l’avion puisque ce sont les satellites de télécommunication qui se chargent d’apporter un réseau local dans l’avion ! C’est la solution exploitée par l’américain Row 44 pour connecter les avions, tandis que son compatriote Aircell, qui équipe depuis plusieurs années des centaines d’appareils des compagnies Delta, American Airlines ou AirTran, exploite lui le réseau terrestre, limité aux vols internes donc.

La tête dans les nuages Proposer Internet dans un avion n’est pas une idée nouvelle. En 2004 déjà, la compa- gnie Lufthansa proposait à ses passagers une connexion haut débit FlyNet sur certains vols, avant d’y renoncer deux ans plus tard faute de rentabilité. En décembre 2010, FlyNet embarque de nouveau à bord de la Lufthansa avec une nouvelle offre payante. Sur les vols continentaux d’American Airlines aux Etats-Unis, même combat fin 2009 avec l’offre Gogo Inflight Internet qui permettait, moyennant divers forfaits, de surfer sur la Toile depuis un avion. En 2011, un autre test est mené en Allemagne suite à la collaboration entre Deutsche Telekom, Alcatel-Lucent et Airbus. Aujourd’hui, l’avenir s’incarne – entre autres – dans le réseau Global Xpress d’Inmarsat qui sera déployé au cours de l’année 2013, et qui reposera sur trois satellites construits par Boeing et utilisant la bande Ka (connexion de 10 Mo/s), plus rapide et moins onéreuse que l’actuelle bande Ku. La partie matérielle sera assurée par Honeywell : “En combinant les capacités de communication par satellite d’Honeywell avec une connectivité mondiale Inmarsat Xpress, les voyageurs pourront tout faire, des médias sociaux en temps réel aux vidéoconférences en passant par des présentations multimédias en vol, pratiquement n’importe où dans le monde, avec une expérience similaire à celle de la maison ou du bureau”, assurent Inmarsat et Honeywell.

Le choc des titans

Nous le voyons, la technologie se développe à grands pas et il ne sera prochainement plus nécessaire de mettre ses appareils mobiles en “mode avion” avant d’embarquer. Mais cette avancée ne doit pas masquer la réalité du bras de fer qui se joue en coulisses. Les compagnies aériennes historiques sont victimes, depuis plusieurs années maintenant, de petits cousins low cost qui cassent les prix et permettent, sensiblement, de dynamiser le marché. L’accès à Internet, qui impose un investissement très important, pourrait donc devenir un argument commercial de poids, surtout si, comme le promettent les compagnies, les prix ne sont pas exorbitants.

Partant de là, la course entre les géants de l’aviation est bien réelle pour s’assurer du service le plus efficace, pertinent et à même de répondre aux attentes des passagers de toutes les classes, à commencer par ceux de la classe business. Sans surprise, nous assistons au- jourd’hui à l’entrée dans l’arène d’un des poids lourds européens, le groupe franco-néerlandais Air France-KLM. Ainsi au cours de l’année 2013, deux Boeing 777-300 (un par compagnie) seront équipés de deux antennes permettant de créer un réseau local GSM, et d’un routeur pour la connectivité wi-fi. La partie technique est confiée à Panasonic Avionics : “Avec ce système l’utilisateur aura accès à trois technologies : accès aux données data, la conversation et l’envoi de SMS”, explique Panasonic Avionics. Cependant, il n’est pas certain que la voix soit proposée immédiatement aux passagers…

Le 7e ciel numérique

Et pourquoi ne pas proposer la voix ? La voix n’est pas proposée sur la plupart des compagnies pour des raisons de confort dans la cabine. En effet, quoi de plus pénible que devoir supporter la conversation d’un voisin de siège indélicat ? Reste que l’accès au réseau dans un avion permet déjà de se connecter via un ordinateur portable, une tablette ou un téléphone, d’envoyer et de recevoir e-mails et SMS, de regarder des vidéos et des émissions de télévision en direct, d’accéder à un portail dédié aux passagers, et bien sûr de surfer sur Internet et sur les réseaux sociaux.

A en croire les différents intervenants du secteur, l’année 2013 sera celle du déploiement, tandis que la démocratisation est attendue pour 2014. A coup sûr, les grosses compagnies tiennent un argument que ne pourront pas contrer dans l’immédiat le low cost. De quoi pousser les hommes et femmes d’affaires à embarquer sur des compagnies équipées, et le grand public avec eux !

Thomas Debelle et Benoît Dupont

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