Twitter: la dernière d’Elon Musk

Elon Musk n'est nullement assuré de l'emporter et le reconnaît lui-même. © belgaimage
Robert Van Apeldoorn
Robert Van Apeldoorn Journaliste Trends-Tendances

Le patron de Tesla et de SpaceX aime tellement tweeter qu’il propose de racheter Twitter. Il en a les moyens, mais il affronte de sérieux vents contraires.

Le surprenant projet d’offre publique d’achat (OPA) d’Elon Musk sur Twitter rencontre un obstacle de taille. La direction du réseau social annonce la mise en place d’une “pilule empoisonnée”, mécanisme rendant difficile, voire impossible, une OPA hostile.

En annonçant cette OPA le 14 avril dernier, le patron de Tesla et de SpaceX a été accueilli avec plus de crainte ou de défiance que ne le fut Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, lors du rachat du Washington Post en 2013. Car Elon Musk adore utiliser Twitter, parfois sans tenir compte des règles d’information des sociétés cotées. Ainsi, la Commission boursière américaine (SEC) l’a poursuivi après un tweet annonçant la sortie de la cote de Tesla (jamais réalisée ni initiée). Elon Musk a bien sûr également annoncé l’OPA sur Twitter dans un message très bref, “I made an offer”, diffusé le 14 avril. Il propose 54,2 dollars par action, soit une valorisation de plus de 43 milliards de dollars.

Que veut faire de Twitter le patron américain? Libérer la parole sur la plateforme, en limiter la modération. “Twitter est devenu de facto une sorte de place de village, a-t-il expliqué dans une conférence Ted. Il est alors important que les gens aient la perception qu’ils peuvent parler librement dans les limites de la loi.”

Le mécanisme anti-OPA annoncé par les dirigeants de Twitter consiste à organiser une augmentation de capital réservée aux actionnaires existants, à prix réduit, qui exclut “l’agresseur”. Elle se déclenche à partir d’un seuil atteint par le candidat à l’OPA, comme 15%, ce qui dilue ses parts. Elon Musk a annoncé le 14 avril avoir atteint le seuil de 9%. Il a reconnu dès le début que le succès de son opération n’était pas acquis. Mais il peut fort bien contrer la décision de Twitter s’il parvient à rallier des actionnaires, peut-être en augmentant son offre, pour obtenir la suspension de ce mécanisme de pilule empoisonnée.

Un Citizen Kane digital?

Rien n’est joué, de toute façon. Twitter n’a pas encore annoncé officiellement la mise en place dudit mécanisme. De la même manière, Elon Musk n’a pas encore lancé officiellement d’offre ni fourni de détail sur son financement, ce à quoi il devra s’astreindre en cas d’OPA hostile. Sur le papier, il a les moyens de financer seul l’opération, sa fortune tournant autour des 200 milliards de dollars. Mais il devrait revendre des actions, ce qui pourrait déstabiliser le cours volatile de Tesla. Le mieux serait donc de recruter des partenaires.

La fascination pour la plateforme Twitter est plus forte qu’Elon Musk. Sa rentabilité négative ne l’inquiète pas. ” I don’t care about the economics at all“, je me fous complètement de l’économie, a-t-il tweeté. Les commentaires les plus critiques le soupçonnent de vouloir devenir un Citizen Kane digital, comme l’a désigné le New York Times. Le héros du film d’Orson Welles était une référence à un éditeur bien réel, William Randolph Hearst, qui lors de la première moitié du 20e siècle, utilisa ses journaux pour “poursuivre son agenda personnel, mettre en scène les événements du monde, et harceler ses ennemis.”

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