The Flow 2: on a mesuré la qualité de l’air qu’on respire à Bruxelles

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Développé en partenariat avec le CNRS, le capteur The Flow promet de mesurer en instantané la qualité de l’air, où que l’on se trouve, intérieur comme extérieur. Nous l’avons testé pendant deux semaines à Bruxelles. Les résultats sont saisissants.

Apparus il y a à peine quelques années sur le marché, des capteurs comme le Wave d’Airthings permettent de mesurer avec précision le taux de pollution intérieure. Avec un capteur portatif et une application de collecte des données, la start-up européenne Plume Labs repousse ces limites : elle permet à chaque citoyen volontaire de séquencer la qualité de l’air. Où qu’il soit. Au bureau, à la maison, dans la rue, à pied, à vélo ou dans les transports.

12 cm de haut, 70 grammes, The Flow – c’est son nom – possède 24 heures d’autonomie et s’accroche facilement à un sac. Il permet de mesurer en temps réel la qualité de l’air que l’on respire à l’intérieur, comme à l’extérieur. Le capteur comptabilise la présence des cinq molécules les plus toxiques dans l’air : les composants organiques volatils (surtout présent en intérieur, ce sont les solvants type butane, éthanol, acétone, benzène, etc.), le dioxyde d’azote, ainsi que les particules fines PM10, ultra-fines PM 2,5 et les PM 1 (les plus dangereuses car elles pénètrent le plus profondément dans le sang et les poumons).

À quoi peut bien servir un capteur de pollution ?

La start-up Plume Labs s’est donnée une mission : permettre à chacun de cartographier de manière personnelle et instantanée son exposition à la pollution. En compilant ces données, la start-up parvient à créer une carte de la pollution de plus de 400 grandes villes du globe. Nous avons utilisé Flow durant deux semaines à Bruxelles, en l’accrochant simplement à un sac-à-dos. Facile à utiliser, il suffit de presser le capteur pour savoir quel niveau de pollution vous entoure. Votre Flow changera instantanément de couleur : vert si c’est bon, orange si c’est tolérable, ou rouge si la qualité de l’air est mauvaise. Voire violet quand vous frôlez le pire.

Au-delà des codes couleurs, des mesures beaucoup plus précises s’affichent en temps réel sur le smartphone relié par Bluetooth. Aussitôt connecté en wifi, l’application livre un graphique très détaillé selon l’itinéraire de la sortie (grâce au GPS du téléphone), avec une synthèse de la journée. L’appareil calcule ensuite un indice de qualité de l’air, le “Plume AQI”, à partir des principaux polluants répertoriés. Il donne une valeur (entre 0 et 101 +) indiquant si l’on est dans une zone de pollution faible (0 à 20 AQI), modérée (21 à 50), élevée (51-100) ou très élevée (101+).

La bonne information au bon moment

Premier enseignement : l’air que je respire dans ma maison est globalement bon. Le matin, il est intéressant de constater un pic régulier de composés organiques volatiles vers 6-7h du matin. Surtout dans le bureau, récemment remis à neuf. Rien de rédhibitoire, mais la couleur passe vite à l’orange pour une pollution modérée. Logique quand on prend le temps d’y penser, puisque la plupart des produits ménagers, certaines peintures ou certains meubles en bois mélaminé dégagent des polluants nocifs, comme le formaldéhyde. Il suffit d’aérer la pièce 15 minutes pour faire redescendre rapidement les données.

Second enseignement : l’air est parfois plus pollué en sous-sol qu’en surface. Pouvant se fixer facilement à un sac ou un guidon, The Flow est ultra-pratique pour mesurer sur son itinéraire la pollution à laquelle on est exposé lors d’un trajet cycliste. En ce jour ouvré de l’ère Covid, une fine pluie s’abat sur Bruxelles. Il est 9 heures. J’emprunte les grands axes longeant la petite ceinture. Les voitures sont peu nombreuses. La piste cyclable est à 5 mètres de celles-ci, avec souvent un vent important. Et pourtant, l’indicateur du Flow oscille entre l’orange et le rouge sur tout l’itinéraire. Sur l’appli, on constate des pics de particules fines et de dioxyde d’azote. Rien de neuf quand on sait à quel point le parc automobile belge reste addict aux énergies fossiles.

Mais c’est dans les entrailles de Bruxelles, dans la rame de métro, que la réponse du capteur est la plus alarmiste. Sur le trajet du M1, entre Arts-Loi et le rond-point Montgomery, le capteur s’emballe avec un taux de pollution aux particules ultra-fines très élevé (indice : 72 de PM 2.5) et de particules fines modéré (indice : 37 de PM10). À quai, le capteur relève aussi une forte pollution au dioxyde d’azote (indice : 53 de NO2). Sur le trajet retour, à l’heure de pointe, mon Flow se teint de violet. Ce qui est le pire stade de pollution (très élevé). Comme la grande majorité des réseaux de transports souterrains, les métros de la Stib n’ont pas été pourvus de systèmes de ventilation efficaces. Ce qui est plutôt dérangeant en période de pandémie. Ainsi, circuler pendant 2 semaines en métro à Bruxelles fait invariablement passer le capteur dans le rouge (pollution forte).

Notre verdict

Si ce test n’a pas valeur scientifique, il se base sur des données certes aléatoires, susceptibles de varier d’un coin de rue à l’autre, mais extrêmement précises. The Flow a été développé en partenariat avec le CNRS et le centre de politique de l’environnement de l’Imperial College London. Il a remporté plusieurs prix internationaux. Pour concevoir la V2 de ce capteur nomade, la société Plume Labs a repensé le circuit électronique et l’a combiné à ​une nouvelle génération d’algorithmes pour une précision accrue. Très bien pensée, l’appli vous transmet chaque jour un récapitulatif avec votre taux moyen de pollution ainsi que la courbe afférente. Petit extra : les développeurs de The Flow ont conçu une fonctionnalité d’export de données qui permet de combiner les données recueillies par le capteur avec des données tierces, pour créer ses propres visualisations. À défaut de concurrencer les rares capteurs installés par les Régions, The Flow complète leurs données en plaçant un outil simple et efficace entre les mains de chaque citoyen. Surtout, il permet d’enfin relever la pollution atmosphérique à hauteur d’homme. Et d’attirer l’attention des usagers (motorisés ou pas), en les sensibilisant à la qualité de l’air qu’ils respirent… au quotidien.

Rafal Naczyk

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