Sunrise rachetée par Microsoft : “Nous gardons notre indépendance”

Jeremy Le Van, cofondateur de cette start-up basée à New York. © DR

Microsoft officialise le rachat de Sunrise. Le Belge Jeremy Le Van, cofondateur de cette start-up basée à New York, accorde à Numerik sa première interview.

Sunrise est une superbe success-story. Deux ans à peine après son lancement, la start-up – qui a développé un calendrier connecté, disponible en ligne sur tous types de plateformes (cliquez ici pour en savoir plus) -, est rachetée par le géant Microsoft, qui vient de confirmer la nouvelle. Sunrise a été cofondée par Pierre Valade et le Belge Jeremy Le Van. Nous avions rencontré ce jeune entrepreneur bruxellois l’été dernier à New York. Il se confie pour la première fois sur le deal conclu avec Microsoft.

Comment se sont passés les premiers contacts avec Microsoft ?

Microsoft nous a contactés il y a six mois. Nous avons tout de suite constaté que des synergies étaient possibles des deux côtés. Microsoft a mis au point Exchange et Outlook, des solutions très utilisées dans les grandes sociétés. L’entreprise connaît donc très bien le produit “calendrier”, et a parfaitement compris l’intérêt de notre application. Il nous a paru logique de collaborer avec eux, même si cela a mis un peu de temps à se formaliser. Aujourd’hui encore, tout n’est pas écrit noir sur blanc.

Le site spécialisé TechCrunch cite un montant de 100 millions de dollars au moins pour le rachat de Sunrise. Pouvez-vous le confirmer ?

Non. Mais on se situe dans la bonne fourchette de prix.

Quelles sont les raisons qui ont poussé Microsoft à acquérir Sunrise ?

Depuis qu’il est arrivé à la tête de Microsoft il y a un an, le CEO Satya Nadella a mis en place une série de changements dans l’entreprise. Pour y arriver, il a décidé d’aller chercher du potentiel à l’extérieur de sa société. En décembre dernier, Microsoft a racheté Acompli, une solution pour la gestion des emails sur mobile. C’est la même logique avec le rachat de Sunrise, cette fois dans le domaine de la gestion du temps et du calendrier.

Que va apporter Sunrise à Microsoft ?

Pour Microsoft, ce qui compte aujourd’hui c’est d’avoir la meilleure application. Microsoft a perdu la bataille de la plateforme mobile [NDLR la part de marché de Windows Phone reste minime par rapport à iOS (Apple) et Android (Google)], la société doit dès lors se focaliser sur le produit. Elle est en compétition directe avec Google, qui a été très agressif sur ses applications cloud (Gmail, Google Calendar, Google Drive, etc.). Pour se replacer dans cette compétition, Microsoft veut revenir à la base, à ce que l’entreprise fait le mieux : des outils de productivité performants. Sunrise est bien outillée pour y contribuer.

Comment se dérouleront les futurs développements de l’application ?

Sunrise garde son indépendance et reste à New York. Nous intégrons le groupe Microsoft, comme un Skype par exemple, mais notre manière de fonctionner reste intacte. Malgré nos “petits moyens” [NDLR Sunrise a levé 2,2 millions puis 6 millions de dollars en 2013 et 2014] nous avons démontré que notre postulat de départ était juste. Ce postulat est le suivant : l’agenda numérique a très peu évolué ces dernières années. Il fallait donc aller plus loin et c’est ce que nous avons fait, en intégrant des applications tierces dans Sunrise, en misant sur le design. La feuille de route ne change pas. Nous continuerons nos développements, et bénéficierons pour cela des ressources de Microsoft. Nous avons encore énormément de projets pour les prochains mois qui restent au planning, notamment dans le domaine de la prise de rendez-vous, où il y a encore beaucoup de choses à faire.

La marque Sunrise va-t-elle disparaître ?

Nous voulons continuer à faire évoluer le produit. Mais nous n’avons pas encore précisé avec Microsoft si la marque allait être conservée ou si elle serait intégrée dans un “nouveau Outlook” rebrandé. Cela dit, Sunrise est une marque qui sort de l’ordinaire, et qui a réussi à s’imposer. Nous avons aujourd’hui dépassé les 2,5 millions d’utilisateurs, nous sommes proches des 3 millions. Notre cible dépasse le simple cadre utilitaire : Sunrise est utilisé par des mères de famille, des étudiants, etc.

Quelle est la stratégie poursuivie par Microsoft derrière l’intégration de Sunrise et Outlook ?

Microsoft reste surtout une entreprise B2B. Elle a un peu loupé le train du B2C, mais son nouveau CEO veut rattraper le retard. Sunrise apporte justement un calendrier présentant un aspect sympa, attirant. Il a un côté accessible, un peu “à la Google”. Outlook est plutôt vu comme un outil professionnel. Il est utilisé par des centaines de millions de personnes, dans quasiment toutes les entreprises du monde, mais Microsoft se rend compte qu’il faut le moderniser. Parce qu’aujourd’hui, le fossé entre outils professionnels et outils privés est en train de s’estomper. Des sociétés comme Dropbox, Box ou Evernote l’ont bien compris. C’est la raison pour laquelle Microsoft tient à mettre les bouchées doubles, notamment dans son environnement One, pour développer les meilleurs produits possibles.

Vous êtes le designer de Sunrise. Quelle est l’importance du design dans le monde des applications aujourd’hui ?

Avec l’émergence des tablettes et des smartphones, le design a pris une énorme importance. Des applications comme Twitter, Facebook ou les applis d’Apple présentent un design très abouti. Tous les outils que l’on utilise se modernisent en permanence, il faut donc rentrer dans cette course. Jusqu’ici, Microsoft n’était pas vraiment réputé pour son design. C’est pourquoi la société a désormais la volonté de s’entourer de personnes qui savent que le design, c’est important.

Quand vous avez lancé Sunrise en 2013, avez-vous imaginé que vous pourriez vous faire racheter par une entreprise comme Microsoft ?

Pas du tout. Pierre Valade et moi n’avions pas d’attentes particulières à ce sujet. Nous voulions délivrer la meilleure expérience possible aux utilisateurs et convaincre un maximum de gens d’utiliser notre application. Quand Microsoft nous a contactés, nous avons compris que le concept sur lequel nous étions partis venait d’être validé.

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