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Pourquoi j’ai attendu cinq ans avant de lever des capitaux

Lorsqu’un entrepreneur lance sa start-up, une question vient fatalement hanter ses nuits: “Comment vais-je financer ma boîte?”. Car il faudra tôt ou tard payer du développement, des employés, des bureaux, etc.

Deux options se présentent: soit l’autofinancement (ou bootstrapping en langage start-up), soit l’appel à des financements externes, souvent par le biais d’investisseurs en capital-risque aussi appelés venture capital.

Admettons-le,cette deuxième option est extrêmement attirante pour des fondateurs. Tout d’abord, c’est la garantie de pouvoir tirer un salaire de subsistance pour quelques années. Cela “dé-risque” beaucoup de choses sur le plan personnel, car le quotidien d’un entrepreneur est un défi constant pour la vie de couple et de famille. Ensuite, dans un monde où les levées de fonds font quotidiennement la une, c’est la certitude d’obtenir une reconnaissance publique qui flatte l’ego. Néanmoins, lever des fonds dès le début présente deux désavantages qui, dans le cas d’easyvest, nous ont fait attendre cinq ans avant de passer à l’acte.

Vivre sur ses propres deniers insuffle un esprit de frugalité et d’urgence à attirer des clients.

Premièrement, c’est une perte de liberté. Sans actionnaires externes, vous êtes seul maître à bord. Vous avez le contrôle absolu dans la direction donnée à votre entreprise. Vous ne rapportez à personne et cela vous permet de prendre des décisions rapidement. Vous vous concentrez sur vos opérations plutôt que de passer des mois à attirer des investisseurs.

Deuxièmement, c’est une perte d’argent pour les fondateurs. En effet, en échange d’un financement en capital, vous donnez des parts de votre société aux nouveaux investisseurs. C’est ce qu’on appelle la dilution. Si une start-up n’a encore rien prouvé, qu’elle ne possède ni produit, ni client, le pourcentage de parts qu’elle devra céder sera généralement très important.

A contrario, dans le monde des start-up technologiques, chaque euro de revenu généré sans l’aide de financement externe multiplie par un facteur X la valeur de l’entreprise, valeur que les fondateurs ne doivent pas partager ensuite avec les potentiels investisseurs. Dans notre cas, ce facteur est d’environ 30, ce qui nous a incités à acquérir un maximum de clients seuls afin de réduire la dilution des fondateurs.

Vivre sur ses propres deniers insuffle aussi un esprit de frugalité et d’urgence à attirer des clients. Des qualités appréciées par les investisseurs externes qui y verront une diminution de leur risque et donc de leur prétention au capital.

Ceci étant, lever des fonds peut devenir inéluctable. Dans le cas d’easyvest, l’engagement de personnel pour le lancement d’un nouveau produit et le financement de campagnes publicitaires d’envergure furent nos déclencheurs. Mais parce que nous avons attendu, nous avons pu lever rapidement 3 millions d’euros en échange de moins de 30% de la société. Le fait de tirer le plus longtemps possible sur la corde de l’indépendance nous a permis de conserver plus de valeur en tant que fondateurs et ainsi d’attirer l’attention des meilleurs investisseurs, ceux qui apportent une vraie expertise. Bref, on y revient toujours: qui ne risque rien n’a rien. Ou en tout cas, moins.

Par Matthieu Remy, cofondateur et CEO d’Easyvest, spécialisée dans l’investissement et la planification de pension en ligne.

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