20.000 euros pour transformer son idée en start-up

Bryan Bogdanic (Make It) et Claire Munck (Be Angels) Make It Capital I place l'entrepreneur qui nourrit une idée dans les meilleures conditions pour se lancer. © pg

Le réseau Be Angels et le studio start-up Make It s’associent pour lancer Make It Capital I, un fonds dont l’objectif consiste à financer des idées technologiques. Une manière de doper la création de futures licornes ?

Après de longues années de mise en place, on pensait l’écosystème des start-up tech totalement équipé pour financer les projets naissants ou en croissance. Trouver des fonds ne semblait pas vraiment un problème avec des business angels intervenant assez tôt dans le lancement des start-up et des fonds plus structurés comme Volta Ventures ou Fortino pour assurer le suivi et les grandes (premières) étapes de la croissance. C’était même plutôt le contraire : pas mal d’investisseurs nous disent encore régulièrement ” pleurer ” pour trouver de bons projets à financer. Il y aurait, selon certains, plus d’argent sur le marché que de porteurs de (bons) projets.

C’est dans ce contexte que Be Angels, réseau de business angels belges, et le studio start-up wallon Make it créent la surprise en lançant un concept assez nouveau : Make it Capital I. Concrètement, il s’agit d’un fonds (pour l’instant lancé comme pilote et donc doté seulement de 200.000 euros) dont l’objet consiste à investir dans des idées. Là où la plupart des structures de financement et d’accompagnement se concentrent sur les start-up déjà nées (et les entreprises constituées), ce mini-fonds s’emploiera à dénicher les idées les plus prometteuses et à leur donner vie.

Quatre à six mois pour créer la boîte

Comment ? Les porteurs de projets qui seront sélectionnés par Make It – qui vient de lancer son ” appel à projets ” – pourront obtenir l’aide du studio, financé pour cela par les investisseurs de Be Angels.

Concrètement, le fonds compte sélectionner 10 idées qui disposeront chacune de 20.000 euros pour valider, avec l’équipe Make It, les principales hypothèses et les mettre à l’épreuve. ” C’est ce que nous savons faire, soutient Bryan Bogdanic, CMO de Make It. Nous avons de nombreuses compétences en interne pour passer du stade de l’idée à la phase d’exécution, et notamment veiller à ce que les idées puissent rapporter du chiffre d’affaires. ” Selon lui, l’intervention du studio consiste à ” dérisquer ” ou, en tout cas, ” minimiser autant que possible le risque “. Cette phase devrait durer entre quatre et six mois.

L’atout de Make It, dont l’activité consiste à la fois à faire de la ” consultance ” pour des boîtes à la recherche d’innovation et à lancer de start-up ? S’être spécialisé, depuis six ans, dans l’exécution. Pour l’instant, Make It a lancé quatre boîtes en Belgique et travaillerait sur autant de projets aux Etats-Unis.

” Avec 20.000 euros, on ne va vraiment pas très loin, épingle toutefois un spécialiste de l’univers start-up. Quand on voit les fonds nécessaires pour arriver à un MVP ( produit minimum viable, Ndlr), c’est souvent bien plus que cela. ” La grande question réside bien sûr dans l’apport de Make It sur les idées et la mise en place du projet. ” C’est clair qu’il faut arriver à faire évoluer l’idée le plus loin possible avec le moins d’argent possible, répond Bryan Bogdanic. Mais tout n’est pas toujours question d’argent à ce stade. Même avec 50.000 euros, je ne suis pas sûr qu’on irait vraiment beaucoup plus loin : la créativité est souvent clé à ce niveau. Et surtout, on n’a pas déterminé ce montant n’importe comment : entre 2018 et 2019, nous avons travaillé sur plus de 70 projets en phase de validation et on sait dès lors que ce montant est réaliste pour arriver à ce qu’on veut faire. ” Il faut, du reste, bien comprendre que l’objectif n’est pas d’arriver avec un projet qui tourne directement, ou avec l’ensemble du prototype voire un produit : le concept de Make It Capital I consiste bel et bien à placer l’entrepreneur qui nourrit une idée dans les meilleures conditions pour se lancer.

La part des anges : 8 %

Lorsque l’idée aura été analysée et aura évolué, son ou ses porteur(s) de projet pourront créer leur boîte, puis commencer à lever des fonds en pre-seed, éventuellement auprès de Be Angels et des business angels de son réseau. Sans obligation : ” Il n’y a pas d’exclusivité, prévient Claire Munck, CEO de Be Angels. Les entrepreneurs peuvent aller trouver l’argent où ils veulent. Même si, bien sûr, on leur demande de présenter le projet aux angels du réseau. S’ils décident finalement d’aller ailleurs, il n’y a pas de souci. ”

Le fonds, de son côté, prend directement et avant la première levée de fonds 8% du capital de la start-up dès qu’elle se constitue. Un pourcentage que certains jugent très élevé à ce stade. ” C’est une question sur laquelle nous avons évidemment planché, répond Bryan Bogdanic. Cela peut paraître beaucoup car certains entrepreneurs peuvent trouver 20.000 euros auprès des family, friends and fools ( soit le cercle proche et les “fous” qu’ils parviennent à convaincre, Ndlr) en cédant moins de leur boîte. Notre différence, c’est qu’on amène l’entrepreneur et son idée dans les meilleures conditions pour sa première levée de fonds. ” En gros, l’idée est valorisée à 250.000 euros si elle mène à des développements ultérieurs.

Selon Claire Munck, il existe un vrai créneau et un vrai besoin sur le marché. ” Tout le monde n’a pas la possibilité de trouver des fonds auprès de ses proches et les initiatives comme le W.IN.G ( fonds d’investissement de Digital Wallonia, Ndlr) tendent désormais à aller vers le financement de plus gros montants avec un focus particulier dans la deep tech. Je pense donc qu’il y a un véritable intérêt et cela permet à nos business angels d’avoir un deal flow de projets naissants, ce que certains cherchent. ”

Reste que Make it Capital ne sera pas totalement le seul sur ce créneau. Digital Attraxion accorde également des prêts convertibles de 25.000 euros dans des projets à un stade très précoce pour ” s’essayer “. ” On accorde régulièrement ce montant aux entrepreneurs qui doivent encore avancer sur leur projet, terminer un premier prototype ou générer leur premier chiffre d’affaires, précise Sébastien Doyen, directeur de Digital Attraxion. Ensuite, ils reviennent en comité pour lever plus. ” Des étudiants entrepreneurs ont ainsi obtenu ce ” ticket à 25K ” – pour reprendre l’expression de Digital Attraxion – pour persévérer dans leur projet de start-up.

Sébastien Doyen pointe aussi l’intérêt de faire appel à un start-up studio pour jouer le rôle de l’associé tech dans le projet, ce qui fait parfois défaut. Un rôle d’associé, certes, mais pas dans l’actionnariat.

Make It ne prend pas de part dans la société qui sera constituée : il se rémunère simplement sur base des 20.000 euros consacrés par le nouveau fonds à chaque idée. De là à dire que ce fonds subsidie la consultance de Make It, il n’y a qu’un pas que certains franchissent : ” Ce n’est pas 200.000 euros qui permettraient de financer un studio de 15 personnes sur payroll, fait remarquer Bryan Bogdanic. Cela ne représenterait qu’environ 15% de notre chiffre d’affaires. Ce n’est pas comme cela qu’on voit les choses “. Car Make It revendique pas moins de 300 clients pour lesquel il travaille, en plus d’un portefeuille de start-up qui atteindrait, d’après nos sources, une valorisation de 20 millions.

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