Le SMS n’est pas (encore) mort en Belgique

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Skype, iMessage, Viber, WhatsApp. Les alternatives gratuites (ou presque) au SMS attirent de plus en plus d’utilisateurs. Au point que certains opérateurs étrangers voient leur (lucratif) trafic de textos fondre comme neige au soleil. La Belgique échappe au phénomène. Pour l’instant…

Les alternatives aux SMS sont nombreuses. WhatsApp et Viber font partie des plus connues ( lire l’encadré), mais les constructeurs de smartphones proposent également leurs services alternatifs. Chez Apple, le système iMessage, lancé en 2011 dans l’iOS5, permet par exemple aux “iUtilisateurs” connectés de s’envoyer gratuitement des textos. Samsung, de son côté, a opté pour une variante de WhatsApp nommée ChatON.

De quoi alarmer les opérateurs de téléphonie ? Pour le spécialiste des télécoms Frédéric Debruyne, partner chez Bain & Company, la menace “se marque déjà clairement sur le marché américain et dans certains pays européens. Et même si notre marché – qui n’est pas subsidié – est moins touché en raison d’une moins forte pénétration des smartphones, ce n’est qu’une question de temps. On prédit que d’ici trois ans, les opérateurs enregistreront une baisse de 30 % de revenus provenant des SMS.”

Baisse de 28 % chez Swisscom

Dans les pays proches, l’impact est déjà réel. Le directeur de Swisscom, Carsten Schloter, admettait récemment au journal Le Temps que “le nombre de SMS facturés a chuté de 28 % au premier trimestre. La substitution vers des services alternatifs s’accélère et des concurrents tels que WhatsApp représentent une sérieuse menace.” Le néerlandais KPN enregistrait lui une chute de son chiffre d’affaires (et particulièrement des activités télécoms, en baisse de plus de 3 %) au premier trimestre 2011. Entre autres en raison de ces applications de substitution.

Chez Belgacom, on se montre toutefois serein. “On n’enregistre aucun phénomène de baisse, réagit Haroun Fenaux, porte-parole de l’opérateur. Au contraire, les revenus liés aux SMS et aux SMS premium étaient en hausse de 8,1 % en 2011 par rapport à 2010, sur le marché résidentiel.” Au premier trimestre 2012, le trafic de SMS chez Mobistar a également continué sa (forte) hausse : l’opérateur challenger avance une croissance de 16 % du trafic SMS par rapport au premier trimestre 2011. Ce qui mène à plus de 300 le nombre moyen de SMS (envoyés et reçus !) par abonné chaque mois. Des chiffres en ligne avec ceux avancés par l’IBPT selon lesquels, chaque mois, un abonné actif moyen enverrait 145 SMS.

Les forfaits comme prévention

Surprenant ? “Pas vraiment, répond-on chez Mobistar. Le coût du SMS est de moins en moins une préoccupation de la part des abonnés puisque nous proposons toute une série d’abonnements qui incluent un nombre important de SMS ou même des SMS illimités.” Les opérateurs belges, Mobistar en tête, auraient donc pris les devants avec leurs forfaits intégrant à la fois les appels, l’accès data (Internet) et les SMS.

Mais les opérateurs demeurent attentifs car le SMS reste, aujourd’hui encore, une part importante des revenus mobiles des opérateurs en Belgique. Selon les chiffres de l’IBPT, le marché du SMS en Belgique atteignait, en 2011, pas moins de 422,46 millions d’euros, en baisse de 4,7 % par rapport à 2010. Les opérateurs confirment, de leur côté, que les messages assurent des revenus non négligeables pour eux. Chez Mobistar, le SMS représentait, au premier trimestre 2012, pas moins de 30 % des revenus mobiles de l’opérateur qui se refuse à chiffrer avec précision le montant de ce poste. Mais 8 milliards de SMS auraient été envoyés en 2011 sur le réseau de la filiale du groupe Orange. Chez Belgacom, le SMS tient aussi une part non négligeable des revenus. L’opérateur leader communique des chiffres qui, à l’inverse de l’IBPT, regroupent les SMS et les SMS premium : l’opérateur tirerait 418 millions d’euros de revenus de ces courts messages de 160 signes.

Comment les opérateurs arrivent-ils à un tel montant alors que de plus en plus de clients ne paient pas leurs SMS, dé- sormais intégrés dans des formules tarifaires ? “Il s’agit d’une allocation d’une partie des revenus de nos forfaits au poste SMS, en fonction du trafic SMS sur notre réseau”, répond Mathieu Van Overstraeten, porte-parole chez Mobistar.

Data : la future bataille

Et, si le SMS reste un poste important pour les revenus mobiles des opérateurs, Mobistar admet tout de même un léger tassement de la croissance, sans en chiffrer l’impact. Il se dit, par ailleurs, que certains acteurs de la téléphonie en Europe prévoiraient de lancer, de leur côté, des systèmes proches de Whats App. L’intérêt ? “Eviter de voir partir leur client dans un autre environnement que celui de l’opérateur, même si cela ne leur permet pas de générer des revenus”, commente un observateur. Un enjeu marketing, certes, mais de micro-initiatives car, in fine, le véritable combat portera plutôt sur des plans tarifaires adéquats intégrant, subtilement, la bonne dose de SMS, d’appels mais, surtout, d’accès au Web. Car, selon Frédéric Debruyne, la vraie bataille des opérateurs se fera à court terme sur les propositions d’abonnements data (qui contiennent l’accès à Internet et aux e-mails, notamment). Aujourd’hui, les réseaux des opérateurs sont en effet engorgés par un trafic de données multiplié par trois… alors même qu’elles ne représentent qu’une petite partie des recettes. Les opérateurs souhaitent donc rétablir la balance, notamment avec des forfaits où les data seraient au coeur de l’offre.

CHRISTOPHE CHARLOT

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