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‘La révolution numérique menace même les médecins’

J’ai reçu un e-mail d’un lecteur qui heureusement apprécie cette chronique économique, mais pense qu’elle est parfois trop pessimiste ou qu’elle relaye des informations trop négatives.

Je me suis posé la question de savoir s’il n’avait pas raison. Au final, je pense que mon rôle n’est pas de masquer la réalité, ni de la noircir plus que de raison, mais au contraire d’attirer l’attention des lecteurs pour qu’ils soient mieux informés et prennent des décisions utiles.

Prenons le cas de la révolution numérique et de son impact sur le monde médical. D’ores et déjà, les médecins qui m’écoutent savent que les patients arrivent chez eux surinformés via Internet. C’est assez normal, une personne malade est psychologiquement vulnérable et cherche à se rassurer en cherchant de l’information, hier chez son voisin ou dans une encyclopédie, aujourd’hui sur Internet. Les médecins peuvent le regretter, mais que peuvent-ils faire à part s’y adapter ? J’imagine mal qu’on supprime aux patients l’accès aux téléphones portables et à Internet. Qu’on le veuille ou non, le patient d’aujourd’hui, et encore plus de demain, est surinformé.

Par ailleurs, l’autre danger pour la pratique des médecins, c’est de voir l’éclosion de sites sur le Net qui sont un peu des clones de TripAdvisor, autrement dit des sites qui permettent aux malades de juger leurs médecins. Faut-il laisser faire ? La question mérite d’être posée, car si le patient peut noter son médecin sur sa qualité d’écoute, son empathie, le temps consacré à son dossier… Le patient n’est cependant pas armé pour juger de ses compétences scientifiques. Sans oublier qu’il est parfois difficile sur ces sites de vérifier l’authenticité des commentaires, comme c’est d’ailleurs le cas sur certains sites de voyages !

Demain, le rôle du médecin pourrait consister à signer des ordonnances conçues par des algorithmes…

Mais ce n’est pas tout, un technophilie visionnaire comme le Docteur Laurent Alexandre n’hésite pas à dire qu’une bonne partie du corps médical risque de se retrouver déclassée par la révolution numérique. Il n’exclut pas par exemple que le rôle du médecin de demain consistera à signer des ordonnances conçues par des algorithmes, ce qui revient à jouer le rôle de coach et d’assistant social. C’est inévitable, selon lui. Pourquoi ? Parce qu’aucun cancérologue au monde, même le plus brillant, ne sera jamais capable de traiter les 20.000 milliards d’informations qu’il y a dans l’analyse génétique d’une tumeur ! C’est impossible. Vous avez des arbres de décisions avec des millions de branches, dit-il, et le simple fait de les passer en revue sur un fichier Excel prendrait trois mois ! Donc, seul un système doté d’une intelligence artificielle est en mesure de traiter ces données.

Or, cette intelligence artificielle existe déjà, et selon Laurent Alexandre, les facultés de médecine sont criminelles de ne pas avoir assez introduit la médecine 2.0 dans le cursus. On peut discuter de cette thèse, ou de sa conclusion, mais n’est-ce pas le rôle d’une bonne chronique d’éveiller ses auditeurs à un futur proche. Rien n’est jamais écrit d’avance, mais comme le disait mon professeur de mathématiques, poser la bonne question, c’est déjà résoudre la moitié de l’équation.

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