Rudy Aernoudt

“Forte de ses 140 sociétés biotechs, la Belgique peut se targuer de faire partie du peloton de tête mondial”

La Belgique est depuis quelques années en perte de vitesse au classement des Etats du monde par indice de compétitivité (elle est passée de la 15e place il y a 10 ans à la 22e aujourd’hui). Mais elle se distingue dans d’autres domaines comme la biotechnologie.

Au cours des neuf premiers mois de l’année, huit entreprises belges ont réussi à récolter à elles seules pas moins de 360 millions d’euros de capital-risque, soit la quasi-totalité du marché du capital-risque belge des entreprises en expansion il y a trois ans. Le secteur représente ainsi la moitié de l’ensemble des capitaux levés en Belgique à destination des entreprises les plus dynamiques. Les biotechs à succès oeuvrent aussi bien en Wallonie qu’en Flandre. Sur les huit entreprises en question, cinq sont wallonnes et trois flamandes. Les entreprises wallonnes totalisent 75% des fonds récoltés, les entreprises flamandes 25%.

Contrairement à la Flandre, la Wallonie ne peut compter que sur un petit nombre d’investisseurs privés mais sait s’attirer les fonds de capital-risque américains et chinois.

Cet échantillon, même limité, fait apparaître des différences en termes de montants et de sources de financement. Les cinq entreprises wallonnes sont financées, outre par des fonds publics généralement impliqués depuis le début, par les Etats-Unis ou la Chine principalement. Les entreprises flamandes, quant à elles, puisent leurs ressources en Flandre essentiellement.

Quelques exemples… La palme de la plus importante levée de fonds revient à l’entreprise de Gosselies Iteos Therapeutics qui a réussi à s’approprier un tiers des fonds alloués aux biotechs, soit 114 millions d’euros, provenant principalement de deux fonds de capital-risque américains : RA Capital de Boston et Box de San Diego. La deuxième plus grande opération d’envergure est l’exploit d’une autre wallonne, Gamma Bioscience, financée à hauteur de 50 millions d’euros par le fonds new-yorkais Kohlberg Kravis Roberts & Co. Bill Gates (encore lui) a injecté, via son fonds Adjuvant Capital, 15 millions d’euros dans le producteur de vaccins Univercells. Et le wallon Nyxoah, spécialisé dans les troubles respiratoires du sommeil, a réalisé un tour de table de 25 millions d’euros auprès de ses partenaires industriels, à savoir Resmed à San Diego et Cochlear Benelux à Malines. Quant au liégeois Miracor, il a su convaincre l’investisseur chinois Yonghua de participer à sa dernière levée de fonds de 24 millions d’euros.

En Flandre, le gantois Indigo Diabetes a levé 38 millions d’euros sous la houlette du fonds louvaniste Fundplus grâce notamment aux fonds universitaires belges PMV et Ackermans Van Haren. Fundplus et PMV interviennent également chez Etherna Immunotherapies qui a récolté 34 millions d’euros pour le développement de son vaccin, racolant par la même occasion deux investisseurs chinois et un investisseur américain. Exevir Bio, une spin-off de l’Institut flamand de biotechnologie spécialisée dans les thérapies antivirales, est également financée par Fundplus à hauteur de 23 millions d’euros.

Forte de ses 140 sociétés biotechs, la Belgique peut se targuer de faire partie du peloton de tête mondial. Contrairement à la Flandre, la Wallonie ne peut compter que sur un petit nombre d’investisseurs privés mais sait s’attirer les fonds de capital-risque américains et chinois. Un constat très positif, assurément, mais n’y a-t-il pas un risque à long terme de voir ces fleurons de notre industrie belge s’expatrier dans les pays fournisseurs de fonds plutôt que le contraire ? Les fonds d’investissement flamands riches en liquidités ne passent-ils pas à côté de formidables opportunités d’investissement de l’autre côté de la frontière linguistique ? Ne faut-il pas y voir un formidable potentiel win-win qui permettrait d’assurer durablement l’avenir de la biotechnologie belge ?

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