Un Américain attaque AB Inbev car la Leffe n’est pas brassée dans une abbaye

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Un consommateur de Floride, Henry Vasquez, s’estime trompé par AB Inbev, car la Leffe n’est pas produite à l’abbaye homonyme, à Dinant, mais dans une usine à Louvain. Il lance une procédure pour lancer une class action.

Un Américain vient de s’apercevoir qu’une bière d’abbaye belge n’est pas produite par des moines et dans une abbaye. Henry Vasquez a lancé une procédure à Miami, à la Federal Court. Il estime avoir été trompé par l’emballage des bières Leffe, qui laisse entendre que ces boissons ont été brassées par des moines alors que la boisson sort d’une usine d’AB Inbev à Louvain.

Un settlement de 20 millions de dollars pour la bière Beck’s

Ce n’est pas la première fois qu’AB Inbev est attaqué aux Etats-Unis sur des allégations trompeuses. La même cour avait été le théâtre d’un procès au sujet de la bière Beck’s. Qui avait abouti, en octobre dernier, à un settlement de 20 millions de dollars. Les plaignants estimaient avoir été trompés car la Beck’s est vendue aux Etats-Unis comme bière allemande. Or elle est brassée sur le territoire américain. Mais vendue au tarif d’une bière d’importation, avec des arguments qui tendent à confirmer le germanité de la boisson, notamment en faisant référence à la loi sur la pureté de la bière de 1516.

Plus de bière à Leffe depuis deux siècles

Henry Vasquez vient de découvrir ce que beaucoup de Belges savent : hélas quasi aucune bière d’abbaye ne sort d’une abbaye.

L’abbaye de Leffe ne produit plus de bière depuis plus de deux siècles. L’édifice avait été vendu comme bien national lors de la Révolution française, la communauté religieuse a été dissoute et la brasserie a continué à fonctionner jusqu’en 1809 sous l’égide d’anciens religieux. C’est du reste un des arguments de la procédure. Le plaignant mentionne dans son recours que l’abbaye n’a plus produit de bière depuis la Révolution française.

Renaissance en 1952

La bière Leffe a ressuscité en 1952 lorsqu’une communauté religieuse avait occupé à nouveau l’abbaye Notre-Dame de Leffe. A la recherche de finances, le père abbé Nys a conclu un accord avec un brasseur d’Overijse, Albert Lootvoet, pour sortir une bière selon d’anciennes recettes de l’abbaye. De fusion en rachat de brasseries, la Leffe est devenue un fleuron premium du groupe AB Inbev, elle est devenue une marque internationale. Leffe a contribué à la vogue des bières d’abbayes qui ne se comptent plus.

Parmi les bières dites d’abbaye, il n’y a guère que les bières de l’abbaye de Val Dieu (pays de Herve) qui soient encore produites par une communauté religieuse. Il existe tout au plus un label “Bière belge d’abbaye reconnue” pour désigner les bières produites sur le site ou avec l’accord explicite d’une abbaye. La Leffe bénéficie de ce label. Qui est bien léger : il assure juste que la bière ne soit pas créée ex-nihilo, sans lien avec une abbaye en fonction. Pour être absolument certain de boire une bière brassée dans une abbaye, seul le label “trappiste” peut fournir cette assurance, car c’est une condition pour son attribution par l’Association Internationale Trappiste, qui concerne les bières et fromages de 20 monastères de l’Ordre Cistercien de la Stricte Observance.

Un faux secret

Cette situation n’est du reste pas un vrai secret. Si les emballages et les publicités des bières d’abbaye sont généreux en images de moines et en bâtiments religieux, le site de la bière Leffeet celui de l’abbaye ne font pas mystère de la situation réelle et des accords entre brasseurs et religieux. Les abbayes (Leffe, Maredsous, Grimbergen,…) acceptent généralement de prêter leur nom pour obtenir des recettes sous forme de royalties.

Robert van Apeldoorn

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