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Et si la BCE payait la note ?

Pourquoi ne pas détruire les mauvaises dettes détenues par la BCE ? La BCE pourrait donc annuler une partie des dettes publiques.

Le communiqué de la Federal Reserve (Fed), publié la semaine passée, a suscité de nombreuses réactions sur les marchés financiers. La banque centrale américaine y annonce notamment qu’elle prendra les mesures nécessaires pour “ramener, à terme, l’inflation à des niveaux appropriés”. Elle a également préparé le terrain pour relancer les rachats d’actifs comme elle l’avait fait durant le plus fort de la crise, afin de soutenir la reprise économique.

“Cette déclaration confirme le phénomène important de monétisation des dettes privées et publiques”, explique notre chroniqueur Bruno Colmant. En d’autres mots, la Fed rachète les mauvaises dettes et fait tourner la planche à billets en contrepartie, créant ainsi un taux d’inflation plus important.

Cette stratégie pour alléger la charge faramineuse de la dette publique est prônée par certains experts comme étant la solution. Alain Minc déclarait récemment qu’un niveau aussi important de dettes publiques, en Europe et aux Etats-Unis, “ne peut s’éponger que par la guerre ou l’inflation”. On aurait tendance à opter pour la seconde formule… L’économiste en chef du Fonds monétaire international, Olivier Blanchard, a également invité l’Europe à consentir à une inflation annuelle de 4 %. Dans ce cas de figure, les prix augmentent, et par effet de rattrapage, les salaires également tout comme les impôts alors que le poids de la dette diminue, grâce notamment à des taux d’intérêt réels négatifs. Ce fut le scénario observé après le choc pétrolier des années 1970.

Pour diminuer l’endettement des Etats, cette solution paraît une alternative intéressante et certainement moins douloureuse qu’une coupe drastique dans les budgets publics ou une augmentation très importante de la pression fiscale.

Par contre, le recours à l’inflation pénalise les très nombreux épargnants dont les placements ne seront que très modestement rémunérés ou, pire, seront victimes de taux réels négatifs.

Ce scénario a également ses limites en Europe. En effet, malgré la monétisation déjà importante d’actifs privés et publics, l’inflation reste très mesurée dans l’Union européenne. La globalisation, combinée notamment à un taux de chômage très important tout comme l’opposition de l’Allemagne à une inflation trop élevée, freine ce scénario. Nos voisins outre-Rhin restent, en effet, traumatisés par le taux d’inflation galopant des années 1920 et pèsent de tout leur poids pour éviter des taux d’inflation trop importants.

Face aux différentes solutions pour diminuer l’endettement des Etats, nos autorités monétaires devraient donc choisir entre la peste et le choléra. L’économiste français Patrick Artus, de Natixis, dessine une alternative intéressante et originale. Il propose qu’une partie importante des dettes publiques se retrouvent sur le bilan de la Banque centrale. Celle-ci, comme pour les actifs privés, monétisera la dette publique.

Cette formule n’épargne évidemment pas les Etats de payer les intérêts de la dette. Patrick Artus va donc un pas plus loin : pourquoi ne pas détruire les mauvaises dettes détenues alors par la BCE ? La BCE pourrait donc annuler une partie des dettes publiques. Ce serait évidemment lourd pour le bilan de la BCE mais, comme argumente l’intéressé : “Il est moins grave de spolier ainsi la Banque centrale que de spolier l’épargnant par l’inflation”.

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