Un toute nouvelle organisation pour la centième édition du Salon de l’Auto de Bruxelles
Le retour du Salon de l’Auto, en janvier, s’accompagne d’une réorganisation de son promoteur, la Febiac, l’association des importateurs de voitures.
Les importateurs de voitures n’ont pas renoncé au Salon de l’Auto, qui se tiendra du 14 au 22 janvier prochain dans les palais du Heysel. Pendant deux ans, l’organisateur – la Febiac (fédération des importateurs de voitures et de motos) – a été contraint de renoncer à cet événement pour cause de pandémie.
Les turbulences du marché automobile, qui a reculé (en immatriculations) jusqu’en juillet en Belgique, n’ont pas découragé le secteur. La remontée des livraisons depuis août semble encourager les initiatives commerciales et des investissements comme celui de ce salon, qui a toujours été populaire. C’est une occasion unique d’attirer des centaines de milliers d’amateurs, intéressés par un achat, et même prêts, pour une bonne partie d’entre eux, à payer un ticket d’entrée.
Rien ne reviendra comme avant
Il ne faut toutefois pas se méprendre: rien ne reviendra comme avant. Sous les apparences de continuité, le centenaire de l’événement marque de profonds changements à la fois dans son organisation et au sein de son propriétaire, la Febiac.
Le salon, comme la fédération, connaissent un recentrage. Le premier fait un retour à son core business: la voiture. Partout dans le monde, les salons se cherchent, souvent parce que beaucoup de marques n’y viennent plus. Celui de Paris, en octobre dernier, a été un demi-échec. Ceux de Munich (ex-salon de Francfort) et de Tokyo cherchent à élargir leur objet vers la mobilité en général, où vélos, motos, trottinettes, transports partagés, en commun, ont aussi leur place. La première page du site de l’IAA Mobility, à Munich, du 5 au 10 septembre prochain, comporte plus de vélos que d’autos. Le salon bruxellois avait tenté cette diversification vers la multimodalité, avec un palais dédié, We Are Mobility. La formule actuelle abandonne cette velléité.
La fréquentation attendue se situe aux alentours des 300.000 visiteurs contre 500.000 lors des belles années. Le prix du ticket est réduit de 15 à 12 euros.
“Nous aurons une excellente représentativité du marché car 95% des marques, en parts de marché, seront présentes”, déclare Gabriel Goffoy, directeur de la communication de la Febiac et du salon. “Ce sera un salon plus concentré, plus qualitatif, plus informatif”, assure Jean-Paul Renaux, président du comité salon à la Febiac. Certes, il sera plus compact que la formule d’avant- covid, avec environ 30% de surface en moins, sur cinq palais. Il devrait rester plus grand et plus représentatif que le prestigieux Mondial de Paris, bien terne. La fréquentation attendue à Bruxelles se situe aux alentours des 300.000 visiteurs contre 500.000 lors des belles années. Pour tenir compte d’une taille plus compacte, la Febiac a réduit le prix du ticket de 15 à 12 euros.
L’objectif est d’attirer le public des amateurs de voitures, passionnés ou candidats à l’achat à la recherche de renseignements et de comparaisons. Un public plutôt déboussolé avec les zones à basses émissions et la tendance à l’électrification des véhicules. Pour toucher les jeunes, le salon ouvrira une zone de 700 m2 de postes de conduite virtuelle d’e-sport, imaginée par Meta, un acteur belge du jeu numérique et des simulateurs de F1. Pour les nostalgiques, une exposition de 15 modèles historiques marquera les 100 ans du Salon, de la Ford T à la DS en passant par la VW Coccinelle.
Peu d’absents
La grande majorité des marques seront présentes, y compris Tesla. Toutefois, Volvo, Mercedes, Jaguar et Land Rover feront l’impasse. Mercedes, qui occupait naguère un demi-palais, a préféré ne pas venir. Elle sera symboliquement présente à travers trois véhicules dans un espace partagé appelé The Avenue, présentant des voitures d’exception, mais il n’y aura pas de stand à proprement parler. “Pour nous, l’événement aura lieu dans les concessions, déclare Bastien Van den Moortel, directeur des relations publiques de Mercedes en Belgique. Il y aura des offres salon.” Volvo suit la même approche, qui est en fait une politique globale de la marque, qui ne va plus dans les salons et se concentre sur les concessions.
Les absents sont toutefois bien moins nombreux que pour le salon de Munich, l’IAA. Ou celui de Paris, le Mondial, qui s’est tenu en octobre dernier, sans aucune marque allemande, japonaise ni coréenne. Il n’occupait que trois palais. Quelques marques chinoises s’y sont fait remarquer, pas toutes. MG, marque rachetée par le groupe SAIC (Shanghai), n’était pas venue à Paris alors qu’elle connaît une percée avec un modèle électrique compact à tarif attractif, la MG4. Elle sera à Bruxelles en janvier, où la MG4 devrait être une des attractions du salon. En même temps que d’autres marques chinoises nouvelles en Belgique, dont BYD.
Renault occupera une surface à peine plus réduite qu’avant la pandémie. Le groupe sera aussi présent avec les marques Dacia et Alpine. Le stand sera constitué d’éléments utilisés au salon de Paris où le groupe français était l’un des principaux exposants, ainsi que quelques concept cars, dont celui d’une future Renault 4 électrique.
Le salon de Bruxelles sera aussi un peu un salon de mini-salons. Chaque importateur aura une grande liberté sur ce qu’il souhaite exposer. BMW, qui est toujours numéro un du marché belge (un véhicule sur dix dans les immatriculations) jusqu’en novembre, occupera environ 1.500 m2, y montrera des voitures mais aussi quelques motos. Certains stands présenteront des utilitaires légers (camionnettes). “Nous n’avons pas mis de quota pour l’exposition d’utilitaires”, précise Jean-Paul Renaux. Le cas le plus net sera D’Ieteren qui loue un palais entier et présentera toutes ses activités, et pas seulement les marques importées (VW, Audi, Skoda, Seat, Cupra, etc.). “Notre activité de vélos Lucien sera représentée”, confie Jean-Marc Ponteville. Ainsi que l’incubateur de mobilités alternatives Lab Box qui supervise notamment Lizy (leasing de voitures d’occasion) et Poppy (voitures et trottinettes partagées).
Un effectif réduit
Le salon reflète les changements qui touchent la Febiac. Son directeur général, Andreas Cremer, a mené une réorganisation durant la période du covid. L’effectif est passé de 46 à 20 équivalent temps plein. C’est le résultat d’une “réinitiatilisation” annoncée dans les pages de Trends-Tendances en janvier dernier. “Nous devons réduire notre dépendance au salon”, avait-il annoncé. C’est chose faite! La Febiac dépendait en partie des recettes du salon pour son financement. Ce n’est plus le cas. Le business model de l’événement prévoit un équilibre ou une rentabilité “normale”.
“Ces changements sont le résultat de réflexions qui remontent à avant la pandémie”, commente Andreas Cremer, ex-secrétaire général d’Audi Brussels à Forest, en fonction depuis octobre 2020. Des discussions avec les membres, les importateurs, ont été menées pour déterminer les attentes des importateurs et les services qu’ils souhaitent de leur fédération. Elle n’a plus d’équipe pour le salon ni pour la formation. Ces fonctions sont désormais sous-traitées. Pour le salon, la société Fast Forward s’occupe de l’organisation pratique (montage de stands, des espaces gérés par la Febiac) ; AddRetail, du ticketing et la communication ; le tout sous la supervision d’un comité de la Febiac. “Nous avons aussi cessé l’activité de business center, de location de salles à notre siège”, poursuit Andreas Cremer. Le salon occupait en interne une équipe de sept à huit personnes. Côté revenus, la Febiac cherche à développer la vente de données sur le secteur, à travers son département data service.
La fin de la dépendance
Les comptes de Febiac en 2020 et 2021, années sans Heysel, affichent chaque fois des pertes de plus de 4 millions d’euros, qui reflètent en creux la dépendance financière de la Febiac au Salon de l’Auto dans l’ancienne équation. “Ces 4 millions de pertes ne représentent pas totalement l’apport financier du salon à la Febiac, précise Andreas Cremer. Nous avons aussi eu des frais pour la préparation des salons finalement annulés.” Les comptes de la Febiac, qui est une ASBL, sont dotés d’un fonds social important (le capital, pour une ASBL), d’environ 10 millions, produit par les marges des salons précédents, une réserve entamée par les années sans salon.
A présent, l’événement ne devrait plus être indispensable pour financer la fédération. “Faut-il un salon tout court? Nous nous sommes posé la question”, indique Andreas Cremer. Nous nous sommes mis à l’écoute de nos membres, ce sont eux qui ont souhaité un salon.” Mais pas de motos, car beaucoup de marques de deux roues n’en voulaient pas. Le salon sera donc centré sur l’auto alors que naguère il présentait un vaste espace moto.
Retrouver une voix pour le secteur
Ces changements reflètent aussi ceux qui affectent les membres confrontés à des remous provoqués par la crise du covid et celle de la guerre en Ukraine, ainsi qu’à l’évolution vers l’électrification à marche forcée. Cela crée des pénuries, des retards dans les livraisons, donc dans les revenus. Les membres espèrent aussi une Febiac plus efficace dans leur représentation auprès des pouvoirs publics dans le contexte des changements réglementaires (zones à basse émission, évolution de la fiscalité fédérale, régionale, péage kilométrique à Bruxelles, etc.) pour lesquels le secteur a du mal à se faire entendre. Pour l’électrification, l’idéal serait, par exemple, de parvenir à une table ronde public-privé, comme les Pays-Bas l’organisent sous le nom Formule e-Team, pour discuter des mesures favorisant une transition vers les véhicules zéro émission.
Conditions salon, vraiment?
L’une des attraction du Salon de l’Auto, pour le public, est la tradition des “conditions salon”: des remises ou des options gratuites qui aident à attirer les commandes. Toutes les marques contactées assurent que la tradition sera respectée. Pourtant, il ne faut pas se faire trop d’illusions. Les temps ne sont pas à la générosité et ces derniers mois, les tarifs ont plutôt augmenté. Les livraisons sont ralenties. Les meilleures conditions salon seront donc surtout la capacité à livrer dans un délai raisonnable ou un stock disponible. D’Ieteren assure disposer de 2.420 véhicules en stock (à la fin novembre). Renault mise aussi sur une nouvelle forme de financement, un crédit “ballon”, un contrat de location avec option d’achat où le montant est généralement assez faible, compensé par une option d’achat élevée. C’est une manière de vendre des véhicules dont les prix sont plus élevés aujourd’hui. La nouveauté pour Renault est un dispositif à trois options: soit le client restitue le véhicule en fin de contrat, soit il le rachète, soit il en acquiert un autre en utilisant le véhicule du contrat comme acompte.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici