Trois erreurs typiques des PME innovantes

Voilà déjà quatre ans qu’Opal-Systems, une “spin-off” de l’université de Liège, se démène pour convaincre le marché de la plus-value de sa solution unique de chauffage par le sol. Comment combattre les idées reçues, faire connaître un produit innovant auprès des clients finaux et des professionnels du secteur quand on dispose de moyens limités ?

Il y a vingt ans, le chauffage par le sol avait mauvaise réputation : problèmes de circulation, surchauffe, fuites impossibles à colmater… Aujourd’hui, le produit regagne du galon, surtout dans les nouvelles constructions. Mais l’installation traditionnelle d’un tel système empêche de moduler facilement la température ambiante en cas de variabilité causée par un facteur externe – le soleil donnant sur des baies vitrées, par exemple.

“Opal-Systems est la réponse idéale à cette contrainte”, affirme Michael Gilis, responsable des ventes et du marketing de l’entreprise. “Intégré dans un support en MDF très fin, grâce à une technologie unique en aluminium, notre système est directement en contact avec le revêtement de sol et permet donc un chauffage très dynamique.”

La solution d’Opal-Systems a donc plus d’un atout pour convaincre les particuliers comme les entreprises et les collectivités. Mais pourquoi peine-t-elle tant à se faire connaître ? A partir de ce cas d’école, Trends-Tendances a analysé les difficultés qui touchent la plupart des start-ups.

Erreur n°1 : Se fier à sa seule compétence technique

Opal-Systems est le fruit des recherches de deux entrepreneurs belges, Olivier Cornil et Pierre-Yves Franck. Le premier, régulièrement au Japon pour des raisons professionnelles, y découvre un système innovant de chauffage par le sol permettant de réaliser de sérieuses économies d’espace. Le système doit cependant subir quelques adaptations pour pouvoir être transposé chez nous. Avec le chercheur de l’ULg Pierre-Yves Franck, spécialisé en énergétique du bâtiment, il met alors au point, en 2007, une technologie unique, Opal-Systems. S’il est incollable sur le plan technique, le duo manque surtout de temps à consacrer à la prospection. Pendant trois ans, Opal-Systems vivote d’installations qu’elle réalise essentiellement au niveau local. Mais l’activité ne décolle pas encore réellement.

Solution : Engager un responsable marketing et communication

En 2010, Opal-Systems s’adjoint les services de Michael Gilis, ancien commercial dans le secteur du béton. L’objectif ? “Professionnaliser la communication, stimuler les contacts externes et promouvoir la solution Opal-Systems”, explique l’intéressé.

Erreur n°2 : Compter sur le seul bouche à oreille

Si l’ajout dans l’équipe d’un élément commercial était indispensable, il n’est probablement pas suffisant. En deux ans, plusieurs actions de communication ont effectivement été menées, avec pas mal de retombées médiatiques à la clé. La page Facebook d’Opal-Systems, qui montre notamment les images des chantiers en cours et les plans des dernières installations, génère une centaine de visites par semaine. “Toutes les images sont signées “Opal-Systems – chauffage dynamique par le sol”, afin d’accroître au maximum notre présence dans les résultats de recherche sur Google”, pointe Michael Gilis.

“De même, lorsque nous travaillons sur un chantier, nous invitons tous les architectes situés à proximité à venir découvrir de visu notre produit.” Mais, pour Eric Cloes, rédacteur en chef du magazine Je vais construire, une démarche plus structurée et menée à plus grande échelle est fondamentale. “Le secteur de la construction est vaste et difficile à approcher”, note-t-il. “Pour qu’un produit nouveau perce, c’est-à-dire qu’il soit installé par des entrepreneurs, il faut qu’il soit repris dans le cahier des charges des architectes. Et quand bien même ceux-ci seraient sensibilisés à la qualité et aux avantages du produit, encore faut-il que le client lui-même en soit convaincu. Le bouche à oreille est donc loin d’être suffisant.”

Solution : Etablir un plan média à destination de toutes les parties concernées

Pour Eric Cloes, la seule façon de toucher les quelque 50.000 Belges occupés par un projet de construction ou de rénovation est de mettre en place un plan média qui cible simultanément les architectes, les entrepreneurs et les clients finaux. Il faut en outre fournir des explications suffisamment détaillées pour chaque partie, afin d’asseoir sa crédibilité et assurer la confiance mutuelle entre tous les acteurs concernés. “Nous nous apprêtons à lancer une campagne d’e-mailings destinée aux architectes”, avance Michael Gilis. “Mais nous n’avons pas les moyens d’être présents à Batibouw.”

Erreur n°3 : Vouloir assurer seul la promotion

On en vient donc toujours au même écueil : les finances ! “Un salon comme Batibouw, c’est au minimum 10.000 euros d’investissement pour le stand, sans compter les heures passées à la préparation, au montage, les déplacements et les dépenses liées à la documentation commerciale”, déplore Michael Gilis. “Pour une PME comme la nôtre, qui dispose d’une trésorerie et d’une équipe réduites, c’est pratiquement impossible.”

Solution : S’appuyer sur des partenaires dotés de vrais moyens marketing

Pour pallier le manque de moyens financiers, Opal-Systems a pris conscience de la nécessité de s’allier à des partenaires qui jouissent d’une plus grande visibilité. “Mitsubishi a manifesté son intérêt pour notre solution, et nous avons déjà eu accès à un salon par l’intermédiaire de leur stand”, se réjouit Michael Gilis. Mais il y a mieux. “Samsung a développé une nouvelle pompe à chaleur permettant de connecter à la fois un système de chauffage par le sol et un système de création d’air chaud. C’est dans ce cadre qu’ils nous ont contactés afin d’envisager des synergies.” Si l’on ne parle pas de partenariat officiel, Opal-Systems compte bien sur cet allié d’envergure pour booster la promotion de sa solution. “Pour autant que nos marges soient respectées et que la vente conjointe soit un véritable partenariat win-win“, nuance Olivier Cornil.

Pour Eric Cloes, la seule chance de survie d’Opal-Systems réside précisément dans ce genre d’alliance. “C’est l’unique moyen pour cette petite structure de déployer une machine marketing suffisamment rodée et crédible pour pouvoir toucher l’ensemble des acteurs du secteur.” Pour être rentable, Opal-Systems devrait installer 1.000 mètres carrés de chauffage par mois. Aujourd’hui, la moyenne se situe entre 300 et 500 mètres carrés, avec des chantiers en Belgique, au Luxembourg, en France et aux Pays-Bas. La route est encore longue… Mais le potentiel est, lui, bien présent.

Camille van Vyve

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