Restructuration nécessaire pour les producteurs de pétrole

© GETTY IMAGES

L’Arabie Saoudite et d’autres pays pétroliers de la péninsule arabique sont à la recherche d’autres revenus.

Cela fait des dizaines d’années que les producteurs de pétrole arabes se trouvent dans une situation délicate. Avec la baisse des prix, ils promettent de détisser les liens entre leur économie et l’or noir. Mais les prix très bas signifient également qu’ils ne peuvent pas se permettre de réforme coûteuse. La production chute à son tour, la demande augmente, et les prix remontent alors. Les caisses se remplissent à nouveau et la nécessité d’une réforme urgente disparaît.

En privé, certains fonctionnaires se demandent si ce cycle n’arriverait pas à sa fin et si les réformes ne deviennent pas inévitables. En 2020, la chute de la demande due à la Covid-19 a fait baisser le prix du pétrole Brent à 21 dollars le baril. En 2021, les prix devraient remonter quelque peu, mais ne dépasseront tout de même pas les 50 dollars. La plupart des pays producteurs de pétrole du Moyen-Orient ne pourront donc toujours pas équilibrer leur budget.

Dubaï fantomatique

L’Arabie Saoudite, le plus gros producteur de la région, continuera à chercher des sources de revenus sans lien avec le pétrole. L’année dernière, le pays a fait passer la TVA de 5 à 15 pour cent. Les Saoudiens qui espéraient que cette augmentation serait temporaire se rendent aujourd’hui compte que ce n’est pas le cas. Cependant, le déficit ne fera qu’augmenter. Les entrepreneurs travaillant pour le secteur public vont faire face à des problèmes d’arriérés. Pourtant, le royaume ne compte pas mettre un terme à la construction de ses projets ambitieux. Citons par exemple Neom, une ville “haute technologie” située dans le désert du nord-ouest, dont le coût s’élève à 500 milliards de dollars, ainsi qu’un projet de station balnéaire le long de la mer Rouge, dont la surface dépassera celle de certains pays européens. Encore plus de migrants seront éjectés du marché du travail, ce qui libérera les postes à faible revenu pour les citoyens du royaume. Pendant ce temps, la nuit, Dubaï prendra des allures de ville fantôme, avec ses immeubles et ses villas luxueuses vides et sombres.

Les Émirats arabes unis vont perdre environ 1 million de migrants, un dixième de leur population. Certains vont perdre leur emploi et quitteront le pays. D’autres verront leurs revenus baisser et renverront leur famille au pays pour emménager dans des appartements plus petits et donc moins coûteux. Les nouvelles constructions vont à nouveau faire chuter le prix de l’immobilier, après une diminution de 10 pour cent en 2020. Avec un peu de retard, l’ouverture de l’exposition universelle en octobre 2021 redonnera un nouveau souffle à la ville.

Le Koweït va exploiter les marchés obligataires pour tenter de combler un déficit budgétaire qui pourrait atteindre 15 % de son PIB. Les générations futures devront alors rembourser davantage de dettes pour un secteur public démesuré. Pour le Bahreïn et l’Oman, où la situation n’est plus au beau fixe depuis longtemps, emprunter de l’argent deviendra encore plus compliqué.

Pas d’amélioration

Il n’y aura aucune perspective d’amélioration. La demande de pétrole restera en dessous de la normale. Du côté de l’offre, les membres de l’OPEP+ qui ont respecté des limites de production strictes en 2020 augmenteront leur production afin de gagner des parts de marché. Avec la nouvelle politique vis-à-vis de l’Iran menée par le président américain Joe Biden, davantage de pétrole se retrouvera sur le marché. Les rois et les ministres se rendront alors finalement compte que leur économie mérite d’être restructurée. Ils se demanderont également s’il n’est pas déjà trop tard.

Gregg Carlstrom, Correspondant Moyen-Orient pour The Economist

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content