Pourquoi les milliardaires sont-ils obsédés par les bunkers

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Quand l’Armageddon arrive, les milliardaires tentent de trouver une échappatoire. Même si souvent, cela ne fait qu’aggraver les problèmes qu’ils veulent fuir…

Il y a quelques années, Douglas Rushkoff, professeur d’économie à New York, a été invité à prononcer un discours dans un centre de villégiature très haut de gamme, situé dans un désert américain. Rushkoff pensait donner une conférence à des banquiers et des hommes d’affaires à propos d’un livre qu’il avait écrit sur l’Internet. Mais lorsqu’il est arrivé sur place, il s’est retrouvé face à une demi-douzaine de milliardaires, CEO d’entreprises technologiques et de responsables de fonds spéculatifs ultra-riches.

Les hommes étaient déchirés par un choix cornélien à leurs yeux: Nouvelle-Zélande ou Alaska ? Ils craignaient que le monde se dirige vers une sorte “d’effondrement environnemental, de troubles sociaux, d’explosion nucléaire, de tempête solaire, de virus incurable ou de piratage informatique qui ferait tout s’écrouler”, déclare M. Rushkoff. Ils voulaient savoir quelle région serait la plus sûre pour se retirer à l’abri de ces catastrophes. Ils demandaient des réponses à Douglas Rushkoff parce qu’il avait écrit “Present Shock”, un livre sur l’avenir de la technologie.

Cette anecdote montre à quel point des sommes colossales sont investies dans des systèmes de “protection” contre une “catastrophe imminente”. Au cours des dernières décennies, de plus en plus de particuliers se sont également préparés à des crises d’envergure. Une série d’événements, qui vont du 11 septembre 2001 à l’ouragan Katrina, en passant par la montée des tensions entre la Corée du Nord et l’Occident et la diffusion de différentes théories du complot, ont alimenté les craintes d’un effondrement de notre société.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a ravivé la menace d’une guerre nucléaire. Pas plus tard que la semaine dernière, le groupe d’assurance Axa publiait une enquête démontrant que dans les pays occidentaux quatre personnes sur cinq se sentent plus vulnérables qu’il y a cinq ans.

Cette enquête a également révélé une baisse importante de la confiance que la population place dans la capacité des politiques ou des scientifiques à faire face à ces menaces. Cela a incité les super riches à se réfugier dans des bunkers de luxe, des super-yachts, voire les deux.

L’instant de survie

La deuxième raison, pour laquelle l’histoire de Rushkoff est interpelante, est que la volonté d’organiser la vie dans les bunkers peut exacerber les problèmes. Plus les milliardaires pensent qu’ils ont le pouvoir d’échapper à l’apocalypse, moins ils ressentent cette force du désespoir de tenter d’empêcher cette apocalypse, affirme Rushkoff dans son nouveau livre “Survival of the Richest”.

Certains super-riches estiment que cette critique est injuste. Ce réflexe de se protéger, et de protéger les siens, de toute menace est un instinct humain universel, l’instinct de survie. De nombreuses personnes, parmi les plus riches, pensent qu’elles essaient de contrer les menaces. Bill Gates, par exemple, investit des milliards dans les soins de santé et la lutte contre le changement climatique.

Mais aucun milliardaire ne peut résoudre, seul, les risques catastrophiques du changement climatique, d’une pandémie ou d’une guerre. Nous avons tous besoin d’une coopération entre les secteurs public et privé. Espérons que ce regain d’anxiété nous incitera à chercher des solutions ailleurs, car sinon, l’avenir est effrayant, même depuis un bunker, aussi luxueux soit-il.

(Sources: Trends/Financial Times)

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