On a testé le magasin sans caisse d’Amazon
Lors d’un séjour dans la capitale mondiale des start-up, nous avons fait l’expérience d’Amazon Go, l’une des premières boutiques physiques du géant de l’e-commerce, qui a décidé de totalement reléguer les caissières au placard.
En plein coeur du financial district de San Francisco, à côté des restos japonais, des organismes bancaires et à 500 mètres du siège de LinkedIn, se trouve un Amazon Go, la fameuse boutique sans caisse du géant de l’e-commerce. Au coin d’une petite ruelle, se dresse un espace pas plus grand qu’un petit City Delhaize où seul le grand logo lumineux de la firme laisse penser que ce commerce a quelque chose de différent. A l’entrée, un garde à la veste orange accueille le visiteur par un ” how you doin’, guy ? “, enjoué, en le regardant dégainer son smartphone. Car pour entrer dans la boutique, le client doit franchir une barrière qui ne s’ouvrira qu’après avoir scanné le code QR de l’application Amazon Go. Celle-ci aura été préalablement installée sur le smartphone et activée grâce à son login Amazon (pour l’instant, celui d’un compte américain reste nécessaire).
Magasin réel, panier virtuel
Une fois dans les rayons, plus rien à faire. Amazon Go mise tout sur la facilité, le ” sans friction “, comme c’est également le cas sur sa plateforme d’e-commerce. Via des affiches disposées à l’un ou l’autre endroit de la boutique, la firme de Seattle rappelle la procédure à suivre, ultra-simple : il vous suffit de choisir dans les rayons les produits qui vous intéressent puis de les placer dans votre panier personnel ou dans un des sacs en papier disponibles à l’entrée et qu’on achète d’un simple clic sur le bouton vert de l’appli.
Dès qu’un article est pris en main, il est alors automatiquement ajouté, comme par magie, à votre ” panier virtuel ” d’Amazon Go. Mais l’inverse est également vrai : si le produit est remis en rayon, il est tout aussi automatiquement retiré de ce panier. Exemple avec nos canettes de Coca : nous les avions sorties du rayon puis redéposées. Effectivement, elles n’ont pas été facturées, tandis que les six produits emmenés ce jour-là ont bien été comptabilisés, sans erreur.
Amazon ne dévoile pas sa recette miracle pour réussir cette prouesse. La firme de Jeff Bezos se contente de préciser qu’elle utilise différentes techniques comme l’intelligence artificielle, la computer vision et les datas provenant de divers capteurs. On imagine donc que, sans l’indiquer, le magasin est truffé de caméras qui détectent le client et le suivent dans ses achats. Celui-ci pourrait bien être identifié ” physiquement ” à son arrivée (au moment où il scanne le code QR de son appli pour entrer dans la boutique) puis suivi durant tout son parcours sur place. Les caméras pourraient alors détecter les produits qu’il saisit, en même temps que des capteurs en rayons notent leur sortie. Un croisement de données donc.
Ticket de caisse par e-mail
La théorie de reconnaissance faciale fait sens puisque si le client souhaite effectuer des achats en groupe, il lui est demandé, à l’entrée, de scanner son code QR pour chaque personne qui l’accompagne. De quoi lier les visages identifiés à un même compte ? Chaque produit retiré par une de ces visiteurs sera en tout cas ajouté au panier virtuel du compte de l’appli scannée. Voilà pourquoi, d’ailleurs, Amazon demande aux clients de ne pas prendre en rayon des produits pour d’autres visiteurs…
L’assortiment d’Amazon Go est assez complet pour un magasin de ville : boissons, épicerie, plats préparés, sandwichs, sushis, glaces, viandes, etc. Et les produits sont de marques, donc pas labellisés Amazon. En fait, le seul moment où l’on se rappelle que l’on se trouve bien dans une des boutiques du géant de l’e-commerce, c’est quand les produits recherchés ne sont plus disponibles et qu’une plaquette affiche en rayon un So good, it’s gone, avec la flèche souriante du logo d’Amazon. N’était ce détail, rien ne distingue donc l’endroit d’autres superettes… Sauf, bien sûr, l’absence de caisses.
Car tel est bien le concept de ce ” Just Walk Out shopping “. Après avoir rempli ses sacs, le visiteur quitte l’endroit sans passer devant aucun contrôle, sans devoir scanner le moindre article, le moindre code-barre ou tag. Et le montant de l’ensemble des produits achetés est débité du compte Amazon – confirmation envoyée par e-mail dans les 10 minutes après la sortie de la boutique. Ce montant reste également disponible, avec les photos de chaque produit acheté, dans un des onglets de l’appli.
Pas de doute, Amazon a bien réussi à appliquer l’expérience utilisateur simplifiée de son site d’e-commerce à des magasins physiques.
La Silicon Valley est obsédée par l’expérience utilisateur. Au coeur de toutes les préoccupations des géants du Net comme des start-up, ce concept vise à améliorer au maximum l’expérience des usagers par un design simple, et à lever tous les freins possibles vers l’acte d’achat : facilité d’inscription, simplification des recherches, suppression des étapes fastidieuses, paiement le plus automatisé possible, etc. Cette quête du ” sans friction ” – dans le jargon du Web, on parle de seamless – constitue l’un des facteurs clés du succès dans le secteur du numérique. Mais à San Francisco, berceau des acteurs mondiaux du Net, l’amélioration de cette expérience utilisateur anime également pas mal de commerces qui comprennent l’enjeu et l’appliquent au monde physique. Amazon Go est actuellement l’exemple ultime. Reste qu’une simple visite dans la boutique de chaussures branchées Allbirds donne une autre bonne idée de la direction que prennent de plus en plus de boutiques. Dans ce magasin épuré où quelques chaussures en démo sont accrochées au mur, pas de caisse traditionnelle non plus. Mais un comptoir où l’on vient retirer le modèle et la taille de chaussures souhaitées. Le paiement se fait soit avec son mobile, soit avec une carte de crédit, grâce au terminal accroché au smartphone du vendeur, à n’importe quel endroit du magasin. Ici, pas de ticket de caisse non plus : celui-ci est envoyé par e-mail immédiatement après l’achat.
A San Francisco, cette recherche de la simplicité dans l’expérience des consommateurs est visible même jusque dans la rue. Il suffit en effet de jeter un oeil sur les moyens de transport : trottinettes et vélos partagés sont disponibles partout et, surtout, très largement utilisés. Avec la même facilité…
désormais accessibles aux Etats-Unis. Trois à Chicago, deux à San Francisco et quatre à Seattle, qui accueille le siège social de la firme de Jeff Bezos.
Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici