Les navettes autonomes font leurs premiers kilomètres en conditions réelles

Projet de bus autonome De Lijn. © belgaimage

Des navettes électriques et sans chauffeur circulent depuis peu dans des conditions encore contrôlées mais réelles à Bruxelles, en Wallonie et en Flandre. Compactes et silencieuses, elles véhiculent la promesse d’une mobilité plus fluide et plus durable d’ici quelques années. Mais la technologie, encore perfectible, va devoir gagner l’adhésion du public.

Son trajet n’est pas long mais il est semé d’obstacles. Sur à peine 400 mètres, la navette autonome du campus médical de la VUB, à Jette, doit franchir un passage pour piétons puis un rond-point sur une route fréquentée tant par des voitures que par des cyclistes. Autant de mouvements et de pièges qui nécessiteraient l’oeil averti d’un chauffeur. Sauf qu’il n’y en a pas. Seuls les capteurs, les caméras et le GPS permettent au véhicule, dont la vitesse ne dépasse pas 20 km/h, de reconnaître son parcours et ses arrêts, tout comme les imprévus.

Depuis son lancement par l’ULB et la VUB, le 23 août, “on n’a pas connu de grosses difficultés”, assure Elias, l’opérateur qui se tient prêt à reprendre les commandes manuelles en cas de problème. Mais les usagers du campus doivent encore s’y faire. “Beaucoup de gens viennent voir et prendre des photos mais peu osent faire le voyage. D’autres sur la route laissent passer la navette de peur qu’elle ne s’arrête pas”, ajoute-t-il, alors que la phase de test consiste à étudier, pendant six mois, les interactions des citoyens avec la machine ainsi que la conception des espaces publiques pour ce type d’engin. Car d’ici quelques années, les navettes électriques et autonomes pourraient bien reconfigurer la mobilité urbaine.

Depuis peu, les tests en conditions réelles se multiplient. Après un premier essai à Han-Sur-Lesse, puis un deuxième à Braine-l’Alleud effectués par l’Institut Vias, en charge de la sécurité routière, la société bruxelloise des transports publics mène, elle aussi, deux expériences pilotes. Une dans le Parc de Woluwe jusqu’au 22 septembre et l’autre, prévue de novembre à février, sur le site de l’entreprise Solvay à Neder-over-Heembeek, “très semblable à une ville miniature”, explique la Stib. De son côté, la société flamande De Lijn a lancé un projet sur le site de Brussels Airport.

D’après l’Institut Vias, les enseignements tirés des premiers tests s’avèrent plutôt positifs. A Braine-l’Alleud, où une navette sans chauffeur a circulé pendant deux mois sur un trajet de plus de deux kilomètres, “le véhicule a bien réagi dans la plupart des situations et n’a embouti personne”, se réjouit le porte-parole, Benoît Godard.

Toutefois à peine sortie des laboratoires, la technologie censée améliorer un jour la sécurité routière doit encore faire ses maladies de jeunesse. “La navette s’arrête face à ce qu’elle perçoit comme un obstacle, une voiture mal garée par exemple, alors qu’idéalement elle devrait la contourner. Nous craignions également que les averses et le brouillard occultent les capteurs, mais finalement les trajets sous la pluie se sont bien passés”, ajoute Benoit Godard, selon qui ces défauts devraient disparaître de la prochaine génération de véhicules autonomes, les ingénieurs y travaillant “d’arrache-pied”.

Pour Geoffrey Grulois, du Laboratoire Urbanisme, Infrastructures et Ecologies (LoUIsE) de l’ULB, “les défis concernent avant tout l’intelligence du système”. A l’heure actuelle, “certains obstacles peuvent bloquer la navette. La présence d’un opérateur à bord est encore nécessaire en cas de problème”, précise-t-il.

Un prochain essai prévu au Salon des Mandataires de Marche-en-Famenne, en février 2020, devra tester les interactions entre deux navettes autonomes.

Entretemps, la perfectibilité technique et la sécurisation des équipements (contre les cyberattaques, par exemple), combinées à l’adhésion sociale des citoyens conditionnent la mise en service des navettes sans chauffeur.

A ce jour, aucun plan ne prévoit de déploiement à grande échelle, même si les acteurs de terrain s’accordent à dire que ces navettes pourraient déjà apparaître d’ici deux/trois ans sur des campus, parkings ou dans des parcs d’attraction, puis à plus long terme dans le centre des villes pour de courtes distances.

A la Stib, malgré les tests en cours, “il n’y a pas encore de calendrier, ni de projet défini de faire circuler ces navettes sur les routes”, précise sa porte-parole, Cindy Arents. Mais la société bruxelloise étudie bien la possibilité de compléter son offre pour les “premier et dernier kilomètres”, soit la distance séparant un lieu d’un arrêt de bus, tram ou métro le plus proche, avec ce type de navettes.

De Lijn espère quant à elle lancer son bus autonome dès la mi-2021 à Brussels Airport.

Partner Content