Les métallos allemands veulent coûte que coûte les 28 heures

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Le début d’année s’annonce tendu dans le secteur de la métallurgie en Allemagne, le syndicat IG Metall menaçant de grèves pour arracher un droit à une semaine de 28 heures avec une perte de salaire limitée.

Si les partenaires sociaux ont entamé dès l’automne des négociations, qui concernent quelque 3,9 millions de salariés, ils rentreront dans les détails en janvier, après l’expiration le 31 décembre du précédent accord salarial et de facto de la trêve qui interdit tout conflit social.

Les compromis conclus dans ces branches essentielles de la première économie européenne, comme l’automobile, les machines-outils ou l’électronique, ont souvent vocation à servir de modèle pour les autres secteurs.

Après les premiers pourparlers, où conformément à une tradition bien rodée, chacun a exposé ses réclamations, les nerfs sont déjà à vif.

Au lendemain de Noël, le patron d’IG Metall -plus grande organisation syndicale d’Europe- a annoncé des débrayages dans toutes les régions à partir du 8 janvier.

“Si les employeurs ne révisent pas leur position d’ici la fin janvier, alors nous réfléchirons à l’opportunité de recourir à des débrayages sur 24 heures ou d’organiser un vote pour des grèves dans tout le pays”, a déclaré Jörg Hofmann mardi à l’agence allemande DPA. Cela ne s’est pas produit depuis 2002.

‘Paillassons’

IG Metall veut une augmentation salariale de 6%, Gesamtmetall propose 2%. Rien d’inhabituel. En général, les parties se retrouvent à mi-chemin.

Les vrais raisons de la colère du syndicat portent sur le rejet catégorique par les employeurs de son projet de semaine de 28 heures.

Il ne s’agit pas d’un modèle similaire à la semaine des quatre jours en vigueur entre 1994 et 2006 dans les usines allemandes du constructeur automobile Volkswagen, dont l’objectif à l’origine était de sauver des dizaines de milliers d’emplois.

IG Metall veut permettre à des salariés soumis à un travail épuisant, ayant des enfants en bas âge, ou un parent nécessitant des soins particuliers, de réduire leur temps de travail de 35 à 28 heures, mais sans perdre la totalité du salaire pour ces sept heures travaillées en moins.

La formule, limitée à une période de deux ans, prévoit aussi l’assurance de revenir à un emploi à plein temps.

On a toujours demandé plus d’efforts aux travailleurs, “l’heure est venue d’exiger plus d’autodétermination pour adapter les heures de travail à leur situation personnelle”, a argumenté le chef du syndicat lors d’une rencontre avec la presse en octobre à Francfort.

Les salariés ne veulent pas être toujours “les paillassions de la flexibilisation”, a-t-il martelé, pointant les bénéfices en forte hausse dégagés par les industriels qui ne doivent pas récompenser les seuls actionnaires.

“Trop coûteuse”, “injuste” et même “contraire à la loi”, réplique le chef de la fédération patronale Gesamtmetall. “C’est la règle: celui qui travaille plus gagne plus, celui qui travaille moins gagne moins”, a insisté Rainer Dulger dans un récent entretien à la presse régionale.

‘Idée moderne’

Le patron de Gesamtmetall dit aussi craindre un recours massif à un tel droit car il pourrait conduire à une aggravation du manque de main d’oeuvre qualifiée dans le secteur.

Pour Holger Schmieding, chef économiste de la banque Berenberg, la mesure est susceptible surtout “d’affecter les petites et moyennes entreprises”, vitales pour l’industrie allemande. Et “répliquée dans toute l’économie, elle pourrait causer de sérieux dommages”, indique-t-il à l’AFP.

Gustav Horn, directeur de l’institut de recherche économique de la fondation Hans Böckler, proche des syndicats, juge lui l’idée “très moderne” car elle adapte le travail aux phases de vie des salariés.

Le débat ne manquera pas d’accompagner les discussions début janvier entre les sociaux-démocrates et les conservateurs d’Angela Merkel pour former un nouveau gouvernement.

La sociale-démocrate Andrea Nahles, ancienne ministre du Travail, a déjà qualifié de “bonne chose” le fait qu’IG Metall ait placé le thème de l’aménagement du travail au coeur de ses revendications.

Celle qui avait tenté -en vain- d’imposer aux employeurs de reprendre leurs salariés à plein temps après une période à temps partiel, sera l’une des principales négociatrices des pourparlers gouvernementaux à venir.

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