La guerre intestine chez Tata mine l’influente communauté parsie

Ratan Tata © Reuters

Dans la petite mais influente communauté parsie de Bombay, les différends se règlent normalement à huis clos. Chez ces zoroastriens, les explosifs règlements de compte en public au sommet du groupe Tata font donc grincer des dents.

Composant l’une des communautés les plus riches d’Inde dont le conglomérat Tata est le symbole, comptant dans leurs rangs certains des plus grands industriels ou scientifiques du pays, les Parsis sont des adeptes du zoroastrisme, l’une des plus vieilles religions du monde.

Les zoroastriens croient en un dieu unique qu’ils vénèrent dans des temples du feu, le feu étant le symbole de la pureté de Dieu.

La prospérité des Parsis, arrivés en Inde il y a plus d’un millénaire pour fuir les persécutions en Perse, est indissociable de l’histoire de Bombay, capitale économique du pays.

Mais le renvoi brutal la semaine dernière de Cyrus Mistry, membre d’un important clan parsi, de la direction du groupe Tata par Ratan Tata, le patriarche de la famille, fait grand bruit dans ce microcosme feutré.

“Les Parsis sont fâchés car la querelle entre Mistry et Tata s’est faite en public au lieu de se cantonner à des négociations à huis clos. Nous espérons que cela sera bientôt réglé”, explique à l’AFP Jehangir Patel, rédacteur en chef d’un magazine de la communauté, Parsiana.

Le différend entre les familles Tata et Mistry, deux piliers de la communauté, inquiète d’autant plus que les Parsis traversent une crise démographique provoquée par des mariages toujours plus tardifs et un taux de natalité en baisse.

Il y a désormais moins de 60.000 Parsis en Inde, soit une population réduite de plus de moitié par rapport aux années 1940.

“Le nombre des figures morales et de membres (de la communauté) à des postes à responsabilités décroit”, indique M. Patel.

Cyrus Mistry, 48 ans, premier PDG du siècle et demi d’histoire du groupe Tata à ne pas être issu de la famille éponyme, a été débarqué à la surprise générale de la direction de la holding familiale Tata Sons, quatre ans seulement après son arrivée à ce poste.

Mécontent de la direction empruntée par Cyrus Mistry, qui poursuivait une stratégie de désinvestissement détricotant en partie son oeuvre, Ratan Tata, 78 ans, a évincé le successeur qu’il avait lui-même adoubé.

Un Allemand à la tête de Tata ?

Les échanges au vitriol et coups bas entre les deux clans rivaux à l’intérieur du groupe font depuis dix jours les choux gras de la presse indienne.

La brouille est d’autant plus compliquée que la famille Mistry, par l’intermédiaire du groupe de Shapoorji Pallonji, père de Cyrus, est le plus important actionnaire individuel de Tata Sons – à hauteur de 18,4%.

Un souci préoccupe Dinshaw Mehta, ex-président de la plus importante organisation parsie de Bombay, Bombay Parsi Punchayet: que le futur patron du conglomérat Tata ne soit pas un Parsi.

“Tata est un legs du business parsi et nous espérons qu’un Parsi prendra le poste de PDG. Nous ne voulons pas de candidats d’autres communautés”, dit-il.

Si le demi-frère de Ratan Tata, Noel Tata – incidemment beau-frère de Cyrus Mistry car marié à sa soeur -, serait dans la course, les analystes évoquent également des noms extérieurs.

Le chef de Tata Consultancy Services, N. Chandrasekaran, originaire de l’Etat sud-indien du Tamil Nadu, ou encore l’Allemand Ralph Speth, président de Jaguar Land Rover, reviennent régulièrement dans la bouche des commentateurs.

Le duo a d’ailleurs été promu au conseil d’administration de Tata Sons après le renvoi de M. Mistry, ce qui a été interprété comme un signe.

Pour certains Parsis, la diminution du nombre de talents dans leurs rangs fait que le groupe Tata n’aura pas d’autre choix que de s’ouvrir.

“Que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur du groupe Tata, aucun Parsi n’a la carrure et le CV suffisants pour endosser le costume de PDG”, constate le rédacteur en chef Jehangir Patel.

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