La faillite de Brink’s entachée de fraude, selon le ministère public

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Malgré la désignation de deux administrateurs provisoires, le dépôt de bilan reste possible. Le point avec des spécialistes du droit social.

Le transporteur de fonds ne transporte plus grand-chose depuis le 27 octobre, date à laquelle la grève a débuté. Après des pourparlers stériles avec les syndicats, Brink’s, entreprise US basée à Richmond en Virginie, a même déposé le bilan pour sa filiale belge, prenant de court tous les acteurs de ce conflit social.

Manoeuvre dilatoire, ont immédiatement clamé les syndicats, suivis par le ministère public, qui a qualifié la faillite de “frauduleuse”. Si le tribunal de commerce suit le procureur du roi, les dirigeants de Brink’s seront renvoyés dans les cordes. Cela veut-il pour autant dire que le scénario de a faillite est purement et simplement abandonné ? Kris De Schutter, avocat spécialisé en droit social chez Loyens & Loeff, ne le pense pas : “Si l’entreprise fait à nouveau aveu de faillite dans quelques semaines, et que cette fois le tribunal estime que les conditions sont réunies, rien ne pourra s’y opposer”, indique-t-il. Brink’s devra alors une nouvelle fois tenter de démontrer que son crédit est ébranlé et que la société se trouve en état de cessation de paiement.

Agenda caché ? En attendant, Alain Zenner, administrateur provisoire désigné par le tribunal, tentera de faire jouer les dispositions de la loi sur la continuité des entreprises, qu’il connaît sur le bout des doigts pour l’avoir corédigée. Mais l’attitude étrange de Brink’s depuis le début du conflit ne plaide pas pour un règlement à l’amiable. L’aveu de faillite, s’il n’est pas écarté, ou s’il resurgit au bout de la mission d’Alain Zenner, pourrait même cacher un autre agenda, craignent les organisations syndicales. Après liquidation de Brink’s Belgium, le transporteur pourrait recréer une nouvelle entité, lui permettant de reprendre des travailleurs “au rabais”, en les engageant sous un statut social moins avantageux.

Si telle est l’intention de l’entreprise américaine, pas sûr qu’elle ait bien compulsé ses codes de droit social. “En cas de faillite, c’est le curateur qui est aux commandes, rappelle Aurore Gillet, avocate senior chez Loyens & Loeff. Il peut décider de vendre les assets de l’entreprise à un concurrent, ou encore mettre fin aux activités de l’entreprise. Au terme de la procédure, l’entreprise faillie ne reprend pas forcément les activités résiduaires.” Par ailleurs, la reprise du personnel doit elle aussi respecter certaines règles. “S’il y a reprise d’activité dans les six mois, l’entreprise est obligée de reprendre le personnel, ou une partie du personnel, aux mêmes conditions collectives de travail”, précise Kris De Schutter. Le transporteur devra manoeuvrer finement pour arriver à ses fins.

Gilles Quoistiaux

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