Trends Tendances

La bête noire d’Amazon prend le pouvoir

Lina Khan est quelqu’un qui, dans les années à venir, devrait révolutionner notre univers. Car une vie sans Amazon, Google, Facebook ou Apple est-elle encore imaginable?

Si en vous promenant dans la rue, vous demandez qui est Lina Khan, personne ne vous donnera la réponse. Pourtant, c’est une des personnes qui, dans les années à venir, devraient révolutionner notre univers. Car une vie sans Amazon, Google, Facebook ou Apple est-elle encore imaginable?

Lina Khan est une jeune juriste de 32 ans qui vient d’être nommée par Joe Biden à la tête de la Federal Trade Commission (FTC), l’autorité de concurrence américaine. Or, elle est depuis quelques années l’ennemie publique numéro un d’Amazon. Elle avait publié en 2017, alors qu’elle n’était encore qu’une étudiante en droit, un article qui avait fait trembler la planète numérique. Il s’intitulait Amazon’s Antitrust Paradox. Dans le monde d’avant les Gafa, lorsqu’un trust ou un monopole se formait, les consommateurs le ressentaient essentiellement au niveau des prix. Une entreprise en situation de monopole pouvait en effet gonfler son prix de vente, la seule limite étant la capacité financière des consommateurs. Les autorités avaient donc pris l’habitude de réagir quand elles s’apercevaient que les prix montaient dans un marché parce que la concurrence avait disparu. Mais l’arrivée des plateformes digitales toutes puissantes a changé la donne. Le “paradoxe d’Amazon” est que sa position dominante a fait baisser les prix! Où est donc le problème?

Lina Khan est quelqu’un qui, dans les années à venir, devrait révolutionner notre univers. Car une vie sans Amazon, Google, Facebook ou Apple est-elle encore imaginable?

Le problème est que ces plateformes étouffent quand même le marché, mais autrement. Le groupe Amazon exerce une telle domination qu’il oblige une série de commerces ou d’entreprises à passer par lui, qu’il rachète des concurrents pour les éteindre, qu’il collecte et monétise “à l’insu de leur plein gré” les données au point qu’il dispose d’un algorithme qui, analysant la manière dont vous surfez sur le net, prépare déjà l’envoi d’un produit avant même que vous ayez décidé de l’acheter. Et Amazon a été pris, parfois, en flagrant délit de copie pour compte propre d’un produit commercialisé par une entreprise qui est sur sa plateforme et qui a du succès… Bref, si le monopole d’Amazon ne se traduit pas par une flambée des prix à la consommation, il exerce un impact négatif sur les choix des consommateurs, les marges des entreprises qu’il accueille et la dynamique de la concurrence en général.

La situation actuelle n’est pas tellement différente de celle qui prévalait à la fin du 19e siècle avec la Standard Oil, l’empire pétrolier des Rockefeller. La Standard Oil avait réussi, en raison de ses économies d’échelle, à réduire le prix du baril de pétrole pour les consommateurs. Mais elle avait étouffé toute émergence de concurrents. La Standard Oil était devenue tellement puissante qu’elle imposait aux compagnies de chemin de fer de tarifer au prix fort le transport de la production des quelques groupes indépendants subsistants, dont beaucoup firent faillite. En 1914, année même où fut créée la FTC aujourd’hui présidée par Lina Khan, la justice américaine ordonnait donc de démanteler le groupe en 34 entreprises indépendantes, afin de ré-insuffler de la concurrence dans le marché.

On ne sait si Lina Khan démantèlera Google ou Amazon. Mais elle est en tout cas bien décidée à s’attaquer à la toute-puissance des Gafa, déjà ciblés sur le front fiscal. Un tournant qu’il faut saluer car une politique américaine plus libérale devrait se faire sentir positivement chez nous aussi. Chez nous les consommateurs, mais aussi du côté des entreprises qui ne peuvent pas s’épanouir si les grands monopoles numériques prennent tout le soleil… Grâce à Lina Khan, elles pourraient désormais bénéficier de quelques rayons. C’est tout ce qu’on espère.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content